Suspension du mot d’ordre ‘’démission d’IBK’’, nouvelles revendications du M5 : l’Imam Dicko dit tout !
Dans une interview audio réalisée par Issa Kaou N’djim au nom des radios Nièta et Dambé, le responsable moral du mouvement du 5 juin-rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), l’imam Mahmoud Dicko, a tout dit sur les raisons de la suspension du point concernant la démission du président de la République dans leurs revendications. Aussi a-t-il précisé qu’ils n’abandonneront jamais leur combat sans l’atteinte de leur objectif : le changement dans la gouvernance au Mali.
Issa Kaou N’djim : imam, les rumeurs sont nombreuses après les deux rassemblements du M5-RFP. Avez-vous abandonné vos revendications ? Avez-vous quelque chose à dire à vos militants ?
Imam Mahmoud Dicko : après deux sorties, tout le monde, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, est mobilisé pour la médiation. Nous sommes un grand pays, un pays de dignité, de dialogue. Nous n’avons pas abandonné nos revendications, nous n’avons pas abandonné notre combat. Mais nous sommes sages. Moi qui suis devant ce mouvement, je suis un imam. J’ai présidé le Haut conseil islamique durant 11 ans et j’ai été, environ 20 ans, secrétaire général de l’AMIPI. J’ai travaillé dans la médiation durant tous ces temps. Aujourd’hui, ce sont des gens qui nous ont démarchés pour nous proposer le dialogue. En plus de ces médiateurs nationaux, les missionnaires de la CEDEAO sont venus ici pour nous parler. Les différents Présidents ont intervenu. Nous ne pouvons pas ne pas les écouter.
IBK n’est pas un étranger au Mali. Il a participé à tous les régimes depuis l’avènement de la démocratie au Mali. Sous Alpha, il a été Premier ministre pendant six ans. Sous ATT, il a été président de l’Assemblée nationale pendant 5 ans. Et il est en tête de ce pays depuis 7 ans. Le Mali lui a tout donné. Depuis qu’il est au pouvoir, nous l’avons toujours parlé, conseillé, critiqué, mais il ne peut pas. Les difficultés sont énormes et c’est l’existence du pays qui est en danger.
En 1968, c’est le pouvoir de Modibo Keita qui est tombé, mais rien n’est arrivé au Mali. En 1991, le régime de Moussa Traoré est tombé, mais le Mali est resté. Après les évènements de 2012, on a pu signer l’Accord de Ouagadougou grâce auquel les élections présidentielles de 2013 ont pu être tenues. Après son élection, IBK a mis de côté cet accord en disant qu’il va, lui-même, chercher la solution. C’est en cherchant cette solution que le pays est tombé en 2014. Quand tout le pays est tombé, on a oublié Kidal, le centre du pays est invivable à cause des conflits intercommunautaires. Dans la région de Kayes, ce sont des anciennes pratiques bannies par la République et la démocratie qui refont surface. Tous ces maux s’expliquent par le fait que le pouvoir est tombé. Pis le pays est aussi sur le point de tomber. C’est l’existence même de la nation qui est en jeux. Donc notre combat est pour le Mali et nous ne l’avons pas abandonné.
Le M5-RFP avait demandé la démission du président de la République et de tout son régime. La revendication concernant le chef de l’État n’est plus votre objectif principal et vous dites que vous n’avez pas abandonné vos revendications. Comment ?
Nous n’avons pas abandonné nos revendications. Je ne suis pas syndicaliste encore moins politique. Je suis un imam. Ce statut d’imam m’oblige à écouter ceux qui nous démarchent pour le dialogue. Nous leur avons donc écouté et leur avons dit que là où nous pouvons faciliter, c’est le point concernant le président de la République, puisque c’est sur ce point qu’ont insisté les médiateurs. Mais là aussi, il faudrait que toutes nos autres revendications qui lui seront soumises soient appliquées. Si cela est fait, on acceptera pour l’intérêt du Mali. Mais dans le cas échéant, notre combat continuera.
Vos revendications sont, entre autres, la dissolution immédiate de l’Assemblée nationale ; la mise en place d’un Organe législatif de transition ; le renouvellement intégral des membres à la Cour constitutionnelle ; la mise en place d’un gouvernement de Transition avec un Premier ministre plein pouvoir… Et si le président ne respectait pas ses engagements ?
La promesse qu’il prendra sera faite devant tout le peuple malien et la communauté internationale. S’il ne respecte pas, les médiateurs seront témoins. Il (IBK) sera aussi responsable de ce qui se passera s’il ne respecte pas ses engagements. Ce qui est sûr, je ne mettrai pas du feu dans ce pays.
Ce que je voudrais que tous nos partisans retiennent est que nous n’avons pas changé, nous n’allons pas changer. Notre objectif, c’est de faire changer la gouvernance dans ce pays et nous allons y arriver s’il plait à Dieu.
Votre dernier mot
J’invite les Maliens à rester mobilisés. Nous allons travailler avec sagesse. Nous devons écouter les médiateurs, mais nous allons continuer à nous battre avec sagesse jusqu’au résultat final. Nous n’avons aucun agenda, sauf celui du Mali.
Interview transcrite par Boureima Guindo