Secteur minier au Mali : Le vent de la réforme
Les faiblesses de notre système de gouvernance ont fini par convaincre les Maliens de la nécessité de réformer tous les secteurs d’activités productifs du pays. Afin de pouvoir tirer profit des énormes potentiels et potentialités que regorge le pays. L’industrie minière est, en la matière, l’un des leviers de notre économie avec une contribution de plus de 400 milliards de Fcfa dans le budget 2019. Elle ne saurait alors, en la matière, rester en marge des reformes nécessaires voulues par nos compatriotes en cette période d’incertitude, mais qualifiée «d’historique» par certains, car offrant l’opportunité de poser les jalons «d’un départ nouveau et durable» pour le Mali.
Au regard de l’importance de l’industrie extractive dans la construction de ce «Mali nouveau», la chaîne de télévision panafricaine «Africable» a organisé, mardi tard dans la nuit, un débat sur le thème : «Transition et reformes : qu’en est-il du secteur minier ?» Animé par le célèbre modérateur de l’émission Politik, Robert Dissa, le forum a réuni des acteurs miniers et de la société civile.
Intervenant à cet effet, le Pr Abdoulaye Niang a plaidé, d’entre de jeu, pour un nouveau modèle économique pour le secteur minier national. Afin, précisera l’économiste, que l’or puisse briller pour tous : Etat comme zone d’accueil des compagnies manières. Cela est d’autant plus possible que les compagnies minières arrivent à rembourser, sans aucune difficulté, les crédits contractés sur le marché financier international, a développé le directeur exécutif du Centre Senè d’études stratégiques sur le Co-entrepreneuriat.
à titre d’illustration, Pr Abdoulaye Niang a déploré le fait que la population de Kéniéba (Région de Kayes), qui abrite cinq à six mines, n’a ni accès à l’eau, ni à l’électricité, encore moins aux infrastructures de communication comme les routes. à sa suite, la jeunesse de cette localité, présente dans la salle transformée, a pris la parole pour demander à l’État et aux sociétés minières de prendre à bras le corps le problème de chômage de la jeunesse afin de prévenir des tensions sociales inutiles.
En réponse à ces cris du cœur, le directeur Afrique de Barrick a révélé que, de 2008 à 2020, la Commune de Kéniéba a touché 13,18 milliards de Fcfa en termes de contributions versées par Randgold, devenue Barrick à la suite d’une fusion absorption. Chiaka Berthé a aussi précisé que sa compagnie a produit 119 tonnes d’or durant les cinq dernières années dont 112 pour Loulou/Guounkoto et 12 pour Morila.
Une production énorme qui profiterait à notre économie si l’on avait une société minière nationale, a relancé le modérateur. «La création d’entreprise nationale étatique en la matière est un choix politique. Nous avions Kalana, gérée par l’État avec l’aide des Russes», a répondu Chiaka Berthé. Pour qui, le Mali dispose aujourd’hui, à cet effet, de compétences avérées. L’État peut, comme les sociétés minières, chercher à mobiliser les ressources sur les marchés financiers dans le but de lancer ses propres compagnies minières.
Toutefois, nuancera-t-il, la mine peut entraîner autrement le développement d’un pays, mais de façon indirecte. Il faut par exemple vendre à la mine en arrivant à assurer son approvisionnement correct en produit en tout genre, préconisera l’ingénieur minier. Si les entreprises locales (privées comme publiques) arrivent à jouer convenablement ce rôle, les centaines de milliards de Fcfa dont profitent les entreprises étrangères serviront à injecter des liquidités à l’économie nationale.
Pour ce faire, il faudrait intégrer l’activité minière à l’économie du pays, a interpellé Chiaka Berthé. Par exemple, la capacité des mines en infrastructures est plus importante que celle de l’État que ce soit dans le domaine de travaux comme dans celui de la production d’électricité. Il faut alors penser à l’après-mine et voir comme profiter de ces opportunités.
Aussi, la société minière Barrick renforce les capacités des locaux. «Nous avons outillé aujourd’hui des nationaux qui exploitent une mine à l’étranger pour une société étrangère », a ajouté son directeur Afrique, précisant que presque tous les cadres de la compagnie (opérant au Mali et ailleurs) sont des Maliens.
Abondant dans le même sens, le directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest de Barrick, Mamadou Samaké a rappelé que Loulou était détenu à 51% par l’État et 49 par une société française. L’État et cette société ont cédé 51% des parts à BHP Group. Pour lui, le plus important est de faire en sorte que la mine permette à l’État de se développer et de nourrir les Maliens.
«Les nationaux sont priorisés à tous les niveaux. Plusieurs sociétés et entreprises nationales vendent à la compagnie, même si ce n’est pas suffisant », a-t-il fait remarquer, invitant à travailler davantage afin de réduire les flux financiers vers l’extérieur.
Cheick M. TRAORÉ
Source : L’ESSOR