Le bras de fer continue entre les autorités actuelles du Mali et la CEDEAO. Cette dernière a publié, le jeudi 27 février 2022, «une note» pour justifier les raisons qui motivent les sanctions prises contre le pays pour, précise-t-elle, un retour à l’ordre constitutionnel au Mali. La CEDEAO dit, dans la note, soupçonner « une volonté des autorités de se maintenir au pouvoir pendant une durée de plus de 5 ans.»
Dans sa note aux relents d’opération de charme, la CEDEAO souligne qu’elle « demande seulement aux Autorités de la Transition Militaire de permettre aux Maliens de choisir eux-mêmes leurs dirigeants à travers des élections démocratiques. » Les différents Sommets des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO relatifs à ce sujet, précise la CEDEAO, ont déploré un manque de volonté politique de la part des Autorités de la Transition Militaire. « Ce manque de volonté se traduit notamment par l’absence de progrès tangibles dans la préparation des élections, en dépit de la disponibilité manifestée par la CEDEAO et l’ensemble des partenaires régionaux et internationaux à accompagner le Mali dans le cadre de ce processus de normalisation », lit-on dans la note. Après avoir fait l’historique de la crise politique actuelle et « son soutien constant » au Mali pour une sortie de crise, la CEDEAO explique que « les autorités militaires prétextent de la nécessité de mettre en œuvre des réformes pour justifier la prorogation de la Transition et se maintenir au pouvoir sans élection démocratique. » « Les réformes sont nécessaires et indispensables dans tout pays pour progresser, qu’il soit en crise politique ou non. Leur mise en œuvre participe d’un processus continu et permanent, conduit par les gouvernements successifs, en vue de s’adapter aux nouvelles conditions de son environnement. Ces réformes ne peuvent donc pas être un préalable, voire une condition indispensable pour l’organisation des élections. En outre, certaines réformes doivent être engagées par des gouvernements légitimes issus d’un scrutin traduisant la volonté du peuple », selon la CEDEAO.
Elle ajoutera qu’il « convient de noter que la question sécuritaire ne saurait être un argument pour ne pas aller aux élections. » « Le Niger, le Burkina Faso et le Nigéria, trois autres pays subissant des attaques terroristes, organisent régulièrement des élections, malgré un contexte sécuritaire quasi identique à celui du Mali.
Enfin, dans un contexte sécuritaire difficile, le rôle des forces armées est justement de défendre le territoire national contre les attaques terroristes », précise, dans sa note, la CEDEAO.
« Volonté de se maintenir au pouvoir pendant une durée de plus de 5 ans »
Pour l’organisation sous régionale, la posture des autorités de la transition « laisse clairement entrevoir une volonté de se maintenir au pouvoir pendant une durée de plus de 5 ans…» Selon la CEDEAO, l’accompagnement qu’elle apporte au Mali n’est pas différent de celui qu’elle a déjà apporté à d’autres États membres se trouvant dans des situations similaires de rupture de l’ordre constitutionnel. « La période des coups d’État pour accéder au pouvoir d’État est révolue aux plans régional, continental et international. La CEDEAO s’est résolument engagée à respecter et faire respecter le processus démocratique comme seule option d’accession et d’exercice du pouvoir d’État », précise la note.
Après avoir rappelé les différentes sanctions imposées dans le passé à d’autres pays membres de l’organisation et leurs effets pour la restauration de la démocratie, la CEDEAO dit « attendre des autorités actuelles un calendrier raisonnable et réaliste pour la tenue des élections. » « Les sanctions seront levées progressivement sur la base de ce chronogramme et de sa mise en œuvre diligente et satisfaisante. Cette levée des sanctions dépend de la volonté politique des Autorités de la Transition Militaire d’organiser les élections dans un délai raisonnable », précise la CEDEAO qui dit craindre « un risque de déstabilisation grave sur la région toute entière de l’Afrique de l’Ouest » en acceptant la proposition des autorités maliennes telle que formulée. « La Communauté ne saurait s’accommoder d’une telle pratique qui, au-delà de créer l’instabilité, constituerait un recul majeur dans tous les domaines. » Selon la CEDEAO, elle « reste très attentive sur l’évolution de la situation, disponible et ouverte au dialogue pour accompagner le Mali vers un retour à l’ordre constitutionnel à travers des élections crédibles et transparentes, organisées dans un délai raisonnable et acceptable. »
M. K. Diakité
Le Républicain