Prévention non violente des conflits dans les pays du G5 Sahel : L’impérieuse implication des citoyens
La sécurité dans les pays du Sahel pose la problématique de la prévention non violente des conflits en son sein. C’est la motivation première de cette petite investigation que nous avons menée auprès de personnes prises au hasard. Il en ressort qu’un investissement des citoyens dans la construction de la paix et du vivre-ensemble en paix peut en constitue un pilier.
Au-delà des Etats et des instruments dont ils disposent pour prévenir et résoudre les conflits, l’implication des citoyens demeure impérieuse dans la recherche de la paix et du vivre-ensemble. De plus en plus, cette conviction s’impose, et tous, acteurs étatiques, politiques, société civile, s’accordent à la traduire en réalité.
En rappelant la complexité des phénomènes de violence et la nécessité d’une marche holistique, Moussa Diarra, chercheur, estime qu’il faut investir dans la prévention non violente des conflits en accordant un rôle actif aux citoyens. Les pouvoirs publics gagneraient à impliquer les légitimités traditionnelles, et au-delà, des couches sociales comme les jeunes et les femmes, maillons essentiels d’un point de vue numérique, ajoute-t-il.
Cela passe, analyse Seydou Traoré, par l’instauration d’espaces de dialogue à travers lesquels la cohésion sociale et le lien entre la société et l’Etat se renforcent et consolident le vivre-ensemble en paix, notamment dans les zones dites marginalisées. Préalablement, concède-t-il, il est indispensable de rechercher les causes des conflits.
Investir dans la prévention des conflits passe par là, acquiesce le sociologue Demba Berthé. Et de prôner le dialogue comme outil de prévention pour comprendre un conflit, pour apporter des réponses collectives aux causes qui le provoquent et, là où il est possible, pour tendre la main vers les acteurs de ce conflit.
Sans méconnaître le rôle central des pouvoirs publics et des acteurs politiques dans la prévention des conflits, le sociologue Berthé préconise la participation des femmes, des jeunes,des communautés locales et des familles dans le développement et la mise en œuvre des initiatives de prévention de la violence, y compris à travers leur participation à la prise de décision politique.
Il est tout aussi nécessaire, estime-t-il, d’engager un dialogue entre les forces de défense et de sécurité et les communautés, ainsi qu’entre les forces de défense et de sécurité et les responsables politiques, pour favoriser la confiance et unemeilleure compréhension de leurs rôles respectifs,pour corriger les comportements abusifs et pour donner un cadre républicain stimulant le rôle de prévention de ces forces.
En somme, Demba Berthé est de ceux qui plaident pour inscrire la culture, la citoyenneté et l’éducation(formelle mais également au sein des familles) au cœur des dispositifs de prévention des conflits. D’autant que la famille est le premier lieu de transmission et d’acquisition de valeurs sociétales. Et devrait fonctionner comme une sorte de système d’alerte précoce.
Cependant, pour cet universitaire, Baba Coulibaly, le rôle des citoyens dans la prévention non violente des conflits dans les pays du Sahel se heurte à l’érosion des institutions publiques dont les conséquences ont impacté les capacités des sociétés à faire face à la violence et aux conflits.
Sans compter l’érosion des coutumes et pratiques traditionnellesqui ont longtemps constitué un rempart auxdiscours de haine et violence. Cette érosion a, danscertains cas, entraîné une perte d’emprise de ces communautés sur la régulation sociale et parfoismême politique.
À ce propos, il recommande alors un redressement qui permette un retour aux valeurs fondamentales des pays du Sahel, à tout le moins, qui favorise l’implication indispensable des citoyens dans la prévention non violente des conflits. Oui, estime-t-il, les citoyens ont un rôle déterminant dans la prévention des conflits, mais faudrait-il qu’ils en soient partie prenante.
Pour accompagner les pays du Sahel et aider les populations à trouver des solutions face à ce fléau, le Réseau nigérien des journalistes pour l’éducation et le développement (RENJED) a, dans ce cadre, obtenu un financement auprès de l’UNICRI, une agence des Nations unies pour la criminalité et la justice, pour le renforcement des capacités de 400 journalistes du Niger, du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie et du Tchad à la prévention des conflits et à la consolidation de la paix au Sahel et influencer le comportement des citoyens et des décideurs.
La mise en œuvre du projet se fait avec l’appui des réseaux mis en place dans chacun des cinq pays. Après l’atelier régional de renforcement des capacités et l’appui aux journalistes participant à l’atelier pour la restitution des travaux dans leur pays au profit des autres journalistes, la dotation en moyens financiers a permis la mise en œuvre des activités. Ainsi, des débats radiotélévisés sur le rôle des citoyens dans la prévention et gestion non violente des conflits au Sahel ont été organisés.
Des magazines et des articles de presse en ligne et journaux ont été produits. Des reportages radiotélévisés ont été réalisés ; des productions, reportages et réalisations pour servir de plaidoyer auprès des décideurs en faveur de la gestion pacifique des conflits au Sahel.
Ce programme a permis aux citoyens des pays du G5 Sahel de bien comprendre leur rôle et responsabilité dans la gestion non violente des conflits et la lutte contre la radicalisation au Sahel.
Dioncounda Samaké