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Pour “atteinte aux biens publics et complicité” dont le montant est estimé à plus de 2 milliards de Fcfa Moridjan Traoré, ex Receveur du Trésor auprès du bureau principal des douanes de Sikasso et son complice condamnés à la perpétuité

La 2ème session de la Cour d’Assises de Bamako s’est penchée sur un cas aussi complexe que délicat, car les débats se sont déroulés de 9 heures à 23 heures. En effet, il aura fallu 13 heures d’horloge pour que les honorables juges de la Cour puissent se prononcer sur l’affaire du ministère public contre Moridjan Traoré, Inspecteur du Trésor de son état, alors Receveur du Trésor auprès du bureau principal des douanes de Sikasso et Moussa Coulibaly, également Inspecteur du Trésor et Trésorier payeur régional de Sikasso au moment des faits, tous poursuivis ” pour atteinte aux biens publics et complicité ” dont le montant est estimé à plus de 2 milliards de nos francs. A l’issue des débats contradictoires, les deux inculpés ont été retenus dans les liens de l’accusation. Ainsi, ils ont été condamnés à la prison à perpétuité et au paiement intégral du montant détourné.

De quoi s’agit-il exactement dans ce dossier ultrasensible ? De l’analyse de l’arrêt de renvoi, Moridjan Traoré était le Receveur du Trésor auprès du bureau principal des douanes de Sikasso du 12 Février 2012 au 23 Juin 2017 et quant à son coaccusé Moussa Coulibaly, il était le Trésorier payeur régional de Sikasso du 18 Novembre 2013 au 27 Juin 2017. Dans leurs attributions, le Receveur du Trésor auprès du bureau principal des douanes, était chargé d’apurer dans le Logiciel “Sydonia” les différents bulletins de liquidation émis par ledit bureau et de recouvrer l’ensemble des recettes. Celles-ci seront reversées au Trésorier payeur, en numéraires, en chèques ou en compensation, contre des Déclarations de Recettes (DR).

Le Trésorier Payeur régional, quant à lui, était chargé, dans ce cadre spécifique, de recevoir les recettes susdites, de délivrer en contrepartie des Déclarations de Recettes, de procéder aux compensations éventuelles, lorsque les conditions en sont réunies et de contresigner les quittances de paiement délivrées par le comptable public, lesquelles constatent l’entrée effective des recettes concernées dans les caisses du Trésor.

Dans la pratique, chaque jeudi, le Trésorier payeur régional, à l’instar de tous ses pairs, doit envoyer à la Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique (Dntcp), les situations statistiques hebdomadaires de son ressort. En satisfaction à cette tradition, courant le mois de juin 2017, le Trésorier payeur régional de Sikasso, Moussa Coulibaly envoyait à la Dntcp la situation statistique hebdomadaire de son ressort.

Décalage significatif entre les montants des recettes recouvrées

Selon l’acte d’accusation, c’est l’examen des tableaux présentés qui a permis de constater un décalage très significatif entre les montants des recettes recouvrées suite aux liquidations effectuées par le bureau principal des douanes de Sikasso et les montants effectivement reversés à ce titre au niveau des caisses du Trésor. C’est ainsi que, suivant ordre de mission numéro 00119/DNTCP-DN du 16 juin 2017, le directeur national du Trésor et de la Comptabilité publique dépêchait une mission à Sikasso, aux fins de procéder à la vérification de la gestion du Receveur du trésor auprès du bureau principal des douanes de Sikasso pour la période allant du 1er janvier au 19 juin 2017.

Les vérifications ainsi effectuées en présence de Moridjan Traoré et constatées dans les procès-verbaux de vérification du 22 juin 2017 ont permis de déceler un déficit de reversement de 1.776.414.614 FCFA dans la gestion du Receveur, rien que pour le mois de Mai 2017.

Aussi, suivant ordre de mission numéro 00130/DNTCP-DN du 29 juin 2017, prorogé par l’ordre de mission numéro 00137/DNTCP- DN du 07 juillet 2017, le directeur national du Trésor et de la Comptabilité publique a décidé d’un approfondissement des investigations qui seront alors étendues à la vérification des recettes douanières encaissées et comptabilisées par la Trésorerie régionale de Sikasso, gérée par Moussa Coulibaly, pour la période allant du 1er janvier 2014 au 19 juin 2017

Les nouvelles investigations faites en l’absence de Moridjan Traoré et de Moussa Coulibaly et constatées dans le procès- verbal de vérification du 15 juillet 2017 ont permis de porter le montant total du détournement à la somme de 2.370.215.807 F CFA dont 1.849.649.307 F CFA au titre des quittances fictives et cent trente millions deux cent quatre-vingt mille sept cent cinquante et six francs (130.280.756 F CFA) au titre des faux ordres de virements.

Le Gouverneur de Sikasso dénonce des faits d’atteinte aux biens publics susceptibles d’être reprochés au Receveur du Trésor

Déjà, poursuit l’arrêt de renvoi, suite à la première vérification menée, le Gouverneur de la région de Sikasso a dénoncé au Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Sikasso des faits d’atteinte aux biens publics susceptibles d’être reprochés au Receveur du Trésor, Moridjan Traoré, en passant par le Commandant de Légion de la Gendarmerie de Sikasso.

Le procès-verbal d’enquête préliminaire établi par la Brigade Territoriale de Gendarmerie de Sikasso a été transmis par le Procureur de Sikasso à son homologue du Pôle Economique et Financier de Bamako. Et suite à l’enquête complémentaire menée par la Brigade Economique et Financière dudit Pôle, des poursuites ont été engagées contre Moridjan Traoré et Moussa Coulibaly pour “atteinte aux biens publics et concussion” et pour “complicité d’atteinte aux biens publics” sur la base du procès verbal de vérification du 22 Juin 2017 constatant le déficit de 1.776.414.614 FCFA dans la gestion du Receveur des Douanes et non sur la base du second procès verbal de vérification du 15 Juillet 2017 établi totalement en l’absence des deux Inspecteurs du Trésor. Inculpé, Moridjan Traoré a reconnu sans ambages les faits à lui reprochés. Quant à son complice, Moussa Coulibaly, il a nié les faits de complicité.

Notons que les conseils des inculpés, Me Youssouf B. Kéïta, Me Mohamed L. Traoré et Me Baba Dionkolon Cissoko, dans leurs observations à la clôture de l’information, ont soulevé des exceptions en faisant des demandes. Ainsi, l’exception d’illégalité des poursuites et la demande d’expertise faite par les Conseils de Moussa Coulibaly ont révélé l’incompétence de la juridiction d’instruction. Selon eux, des vices de formes ont été également constatés à la suite de l’inculpation de Moussa Coulibaly entrainant l’illégalité des poursuites engagées contre lui.

Pour les avocats de la défense, le jugement des comptes d’un comptable public de deniers publics relève exclusivement de la compétence de la Section des comptes de la Cour Suprême. Aussi, ils ont remis en cause le procès-verbal de vérification de la mission de vérification de la Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique.

Toujours, de l’avis des avocats de la défense, seul le Vérificateur Général a la qualité pour conduire une mission de vérification financière. Et de demander en outre la production par le Directeur national du trésor et par la Section des Comptes de la Cour Suprême des documents relatifs à la comptabilité mensuelle et des rapports des comptes de gestion du Trésorier Payeur Moussa Coulibaly de même que l’expertise des comptes de la Trésorerie régionale de Sikasso.

Pour appuyer leurs thèses, ils ont invoqué les dispositions de la Loi No 2012-009 du 08 février 2012 abrogeant et remplaçant la Loi No 2003-030 du 25 août 2003 instituant le Vérificateur Général, de la Loi No 2013-046 du 23 septembre 2016 portant Loi organique fixant l’organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême et de la procédure suivie devant elle et les Arrêts N° 172 du 01-11-2007 et N° 199 du 28-12-2007 de la Section Administrative de la Cour Suprême ainsi que la doctrine “Motivation” considérant qu’en droit, d’une part, si les fautes de gestion et le jugement des comptes des comptables publics de deniers relèvent de la compétence exclusive de la Section des comptes de la Cour Suprême, il n’en est ainsi que si les faits poursuivis peuvent valablement recevoir une telle qualification, que d’autre part, si le Vérificateur Général est effectivement compétent pour effectuer des vérifications financières, il n’a nullement compétence exclusive en la matière, la compétence des inspections et des autres structures de contrôle subsistant malgré son instruction.

Les exceptions soulevées par les avocats de la défense

Ils considèrent que, par ailleurs, de nouveaux actes d’investigation (production de documents supplémentaires, expertise des comptes de la Trésorerie régionale de Sikasso, par exemple) ne s’imposent que si lesdits actes peuvent être déterminants dans la manifestation de la vérité par rapport aux faits qui sont réellement poursuivis. Aussi, ils estiment qu’en l’espèce, le procès-verbal incriminé est un procès-verbal de vérification de la gestion de la Trésorerie régionale de Sikasso et que cette vérification entre dans les missions de la Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique.

A ce titre, ils disent que dans ledit procès-verbal, il ne s’agit pas de fautes de gestion, mais plutôt d’actes de soustraction frauduleuse de deniers publics, de fabrication de faux documents et d’altération de la substance d’actes et de leur contenu, dans le but de disposer frauduleusement des biens publics. Selon eux, de tels agissements s’apprécient, non comme des fautes de gestion, mais comme étant constitutives de malversations et de fraudes qui tombent sous le coup des dispositions pertinentes des articles 106 et 107 du Code Pénal.

A leur analyse, ce sont ces agissements qu’ils s’agit en l’occurrence ici et non d’un quelconque reproche portant sur les comptabilités mensuelles et les rapports du compte de gestion du Trésorier Payeur dont la correction apparente n’a pas été remise en cause, si bien qu’il n’est pas utile d’ordonner une nouvelle expertise, surtout que les faits reposent sur des constatations faites par la mission de vérification et qui ont été rendues contradictoires à travers l’interrogatoire des inculpés sur tous les aspects de ces constatations.

Aussi, c’est sur dénonciation faite par le Gouverneur de la région de Sikasso, que le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Sikasso a été saisi des faits, lequel a transmis pour attribution, le dossier à son homologue du Pôle Economique et Financier de Bamako.

Et suite à l’enquête menée par la Brigade Economique et Financière de Bamako, le Procureur du Pôle Economique et Financier de Bamako ouvrait une information judiciaire contre Moridjan Traoré pour “atteinte aux biens publics et concussion et complicité d’atteinte aux biens” contre Moussa Coulibaly, le ministère public estime qu’en vertu de l’article 58 du Code de Procédure Pénale, “le Gouverneur de Région étant une autorité constituée à pouvoir sinon même le devoir de dénoncer au Procureur de la République des faits susceptibles d’être qualifiés d’atteinte aux biens, il ne saurait être question en l’espèce de poursuites illégales au motif que la procédure n’a pas passé par la Section des Comptes de la Cour Suprême. Il s’ensuit que le Juge d’Instruction saisi pour instruire l’affaire est bien compétent pour le faire. Que de tout ce qui précède, il sied de dire que la demande d’expertise et les exceptions de nullité et d’incompétence soulevées par les Conseils de Moussa Coulibaly ne sauraient prospérer”.

Moridjan Traoré a reconnu sans ambages les faits d’atteinte aux biens publics et de concussion

Sur la demande de mise en liberté de Moussa Coulibaly, la défense considère que l’instruction préparatoire étant terminée, l’inculpé Moussa Coulibaly doit répondre devant la Cour d’Assises du crime d’atteinte aux biens publics par détournement de la somme de 390.285.824 Fcfa et sa détention n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et sa remise en liberté ne serait pas de nature à troubler l’ordre public. Cependant, pour garantir sa représentativité et les condamnations pécuniaires, il convient d’assortir la mesure de paiement d’un cautionnement conformément à l’article 155 du Code de Procédure Pénale que dès lors, il y a lieu d’ordonner sa mise en liberté assortie de cautionnement ou de sureté

Considérant que l’inculpé Moridjan Traoré a reconnu sans ambages les faits d’atteinte aux biens publics et de concussion qui lui sont reprochés, mais a déclaré n’avoir pas pu reverser à la trésorerie Régionale de Sikasso la somme de 1.779.414.614 Fcfa représentant une partie des droits de douane qu’il a recouvrés pour le compte du mois de Mai 2017 en sa qualité de Receveur des Douanes, manquant décelé lors du contrôle de sa gestion pour la période du janvier 2017 au 19 juin 2017 pour des vérifications de la Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique, Moridjan Traoré a expliqué que ce manquant de 1.776.414.614 Fcfa dans sa gestion est le cumul de plusieurs déficits s’échelonnant sur plusieurs années et qu’en réalité, son déficit a débuté depuis 2014, suite à la suppression des Acomptes sur divers impôts (Adit). Et de poursuivre qu’il monnayait les Adit des opérateurs économiques moyennant le taux de 10 % de leurs montants. Selon lui, en fin 2014, date de suppression des Adit, il avait au niveau de certains opérateurs économiques des Adit déjà payés d’un montant de 600 millions Fcfa et que depuis, il retardait le reversement des recettes douanières pour pouvoir utiliser les recettes du mois actuel pour combler le trou dû, jusqu’à son arrestation donnant ainsi l’impression que les droits de douanes recouvrés par lui étaient intégralement reversés au terme de chaque mois.

Interrogé par le Magistrat Instructeur, Moridjan Traoré a déclaré n’être pas en mesure de donner les noms des opérateurs économiques auxquels ces prétendus Adit auraient été payés et n’être pas aussi en mesure de produire des documents au motif qu’il les aurait détruits. C’est donc dire que déjà en 2014, Moridjan Traoré avait détourné pour ses fins personnelles la somme de 600 millions Fcfa sur les recettes douanières recouvrées. Et depuis le montant détourné sur les recettes douanières recouvrées par lui et qu’il devrait reverser au Trésor, s’élevant de mois en mois, d’année en année et a atteint la somme de 1.776.414.614 Fcfa à la date de la mission de vérification de la Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique, du 19 juin 2017 au 22 juin 2017.

Il ajoutera que le montant de son déficit a été surtout gonflé par des sommes d’argent exorbitantes qu’il remettait fréquemment au Trésorier Payeur Moussa Coulibaly à son domicile sans décharge pour acheter le silence de celui-ci sur son déficit né de la suppression des Adit. Et d’affirmer que sur le montant de son déficit de 1.776.414.614 Fcfa, le Trésorier Payeur Moussa Coulibaly a reçu de lui plus d’un Milliard de francs Cfa. Cependant, il n’a pu apporter aucune preuve pour appuyer cette allégation et il est même curieux que sur un montant détourné, le complice ait utilisé plus que l’auteur lui-même.

A l’issue de cette vérification du mois de mai 2017, sur les droits de Douane liquidés, le Receveur du Trésor avait encaissé la somme de 1.922 730.087 Fcfa et n’avait reversé à la Trésorerie Régionale de Sikasso que la somme de 146.314.473 Fcfa.

1.776416.614 Fcfa non reversés au trésor public

En tout état de cause, lors du contrôle de sa gestion effectué en sa présence du 19 juin au 22 juin 2017 pour des vérifications de la Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique, le Receveur du Trésor à la Douane, Moridjan Traoré, n’a pu apporter aucune pièce justificative fût-elle fausse du manquant de 1.776.414614 Fcfa. A l’information également, il n’a pu produire aucune pièce justifiant ce déficit. II a soutenu, comme il l’avait fait à l’enquête préliminaire, que ce montant des recettes douanières non reversées par lui au Trésor public est composé du montant de 600.000.000 Fcfa d’Adit qu’il a laissé au niveau des opérateurs économiques non identifiés plus les multiples sommes d’argent qu’il a remises au Trésorier Payeur Moussa Coulibaly pour acheter le silence de celui-ci sur son déficit et pour camoufler son déficit né depuis 2014, le Régisseur du Trésor Moridjan Traoré, au lieu de transmettre ses comptabilités mensuelles à la fin de chaque mois, les produisaient toujours en retard afin de pouvoir utiliser une partie des recettes douanières d’un mois pour camoufler le déficit du mois antérieur.

A titre d’illustration, les comptabilités mensuelles du Receveur des Douanes des mois de janvier, février, mars et avril 2017 ont été produites respectivement les 27 février, 23 mars, 20 avril et 13 juin 2017, alors qu’elles doivent être produites juste à la fin du mois (le dernier jour du mois). Aussi, à titre d’illustration et toujours à dessein de camoufler son déficit, le Receveur du Trésor a utilisé des recettes recouvrées sur les liquidations de mai 2017 pour des versements de recettes douanières de mars et avril 2017 alors que les recettes recouvrées sur les liquidations d’un mois doivent être reversées au trésor pour le compte dudit mois. Ainsi, les chèques N°6983919 et N°6983920 du 06 juin 2017 émis par la Sodima pour payer respectivement les bulletins de liquidation L 2809 et L 2810 du 12 Mai 2017 ont été utilisés, par le Receveur des Douanes, dans ses versements de mars et avril 2017 et les exemples pareils sont nombreux, il n’y a qu’à consulter le premier procès verbal de vérification établi. Avec cette pratique contraire aux règles de la Comptabilité Publique que Moridjan Traoré a reconnu avoir fait en l’absence de la moindre pièce justificative et même fausse du déficit de 1.776.414.614 FCFA dans la gestion du Receveur du Trésor à la Douane Moridjan Traoré, force est de conclure que celui-ci a détourné à son profit ce montant des recettes douanières destinées au Trésor Public. En conséquence, il doit répondre devant la Cour d’Assises du crime d’atteinte aux biens publics à lui reproché.

Moussa Coulibaly déclare n’avoir jamais décelé depuis 2014 un déficit de 600 millions Fcfa dans la gestion du Receveur du Trésor à la Douane

Il convient de préciser que Moridjan Traoré est en outre inculpé de crime de concussion et qu’il a reconnu également ces faits. En effet, tant à l’enquête préliminaire qu’à l’information, il a avoué qu’il puisait sur les recettes douanières pour payer des Adit à des opérateurs économiques moyennant un taux de 10 % des montants payés à son profit. Quant à son coaccusé, Moussa Coulibaly, ce dernier était alors le Trésorier Payeur à Sikasso. Il a été poursuivi et inculpé pour complicité du crime d’atteinte aux biens publics reprochés à Moridjan Traoré. Interrogé, tant à l’enquête préliminaire qu’à l’information, il a nié les faits de complicité à lui reprochés, contrairement aux déclarations de Moridjan Traoré. Aussi, il a déclaré n’avoir jamais décelé depuis 2014 un déficit de 600.000.000 Fcfa dans la gestion du Receveur du Trésor à la Douane Moridjan Traoré à cause des Adit que celui aurait eu à payer à des opérateurs économiques. Il ajoutera qu’à la date de sa prise de service à Sikasso, le 18 Novembre 2013, les Adit n’existaient plus au Mali. Donc, il n’a, en conséquence, reçu de Moridjan Traoré aucune somme d’argent afin de ne pas le dénoncer pour son déficit.

L’accusé, Moussa Coulibaly, a précisé devant le Magistrat Instructeur qu’il n’a reçu aucune somme d’argent de Moridjan Traoré à son domicile sans lui remettre la quittance de paiement du même montant. En tout état de cause, sur la somme de 1.776.414.614 Fcfa dont le détournement est reproché à Moridjan Traoré, ce dernier n’a pu dire combien il a donné à Moussa Coulibaly, Trésorier Payeur. Aussi, ni devant les vérificateurs, ni à l’enquête préliminaire, encore moins à l’information, il n’a pu produire le moindre reçu ou décharge quelconque signé de Moussa Coulibaly et attestant que celui-ci en a reçu. Selon ses avocats, dans ces conditions, le Trésorier Payeur Moussa Coulibaly, inculpé, ne saurait être renvoyé devant la Cour d’Assises pour complicité d’atteinte aux biens publics par recel. Par ailleurs, l’inculpé Moussa Coulibaly, Trésorier Payeur, a soutenu tout au long de l’information et même auparavant á l’enquête préliminaire qu’il n’a jamais décelé un déficit dans la gestion du Receveur du Trésor à la Douane Moridjan Traoré. A en croire la défense, les déclarations de recettes qui étaient remises à Moridjan Traoré après ces versements mentionnaient qu’il s’agissait des recettes douanières de tel mois indiqué sur les bordereaux de versement du Receveur du Trésor, Or, il a été constaté par les vérificateurs, et cela a été reconnu par Moridjan Traoré, qu’il retardait ses versements de recettes douanières pour pouvoir utiliser une partie des recettes d’un mois pour camoufler son déficit antérieur.

Les Inspecteurs décèlent 20 quittances de paiement fictives signées par le Trésorier Payeur Moussa Coulibaly

Et c’est pourquoi, le Trésorier Payeur Moussa Coulibaly à l’instar d’autres contrôleurs, n’a pu, malgré son contrôle annuel de la gestion de Moridjan Traoré, déceler de déficit qu’il avait dans sa gestion des recettes douanières. Dans ces conditions, il ne saurait non plus être renvoyé pour complicité passive du crime d’atteinte aux biens publics reproché à Moridjan Traoré, étant entendu que le Trésorerie Payeur Moussa Coulibaly, aussi bien que le Régisseur des Douanes Moridjan Traoré, avaient tous affirmé n’avoir jamais reçu le manuel de procédure administrative comptable et financière de décembre 201 sur lequel les vérificateurs se sont appuyés dans leur vérification et le contraire n’avait pas été prouvé.

Par ailleurs, les Inspecteurs de la Dntcp avaient, au cours de leur contrôle mené à Sikasso du 29 juin 2017 au 15 juillet sur la gestion des recettes douanières pour la période du 1er janvier 2014 au 19 Juin 2017, en l’absence des deux inculpés, constaté que 13 déclarations de recettes signées du Trésorier Payeur Moussa Coulibaly d’un montant de 130.280.756 Fcfa avaient été justifiées par des ordres de virement Bceao. Toutes choses que Moussa Coulibaly a contestées lors de son interrogatoire devant le Magistrat Instructeur.

Et de préciser que les ordres de virement étant des ordres donnés pour acquitter des dépenses à la charge du Trésor Public, ne sauraient être utilisés pour justifier des paiements des droits de douanes. Ce qui est vraisemblable. Cependant, le ministère public révèle que lors du même contrôle effectué du 29 Juin 2017 au 15 juillet 2017, les Inspecteurs avaient décelé 20 quittances de paiement fictives signées par le Trésorier Payeur Moussa Coulibaly pour justifier des recettes douanières. Ces 20 quittances de paiement fictives totalisant la somme de 390.285.824 Fcfa ont été établies et signées par le Trésorier Payeur Moussa Coulibaly, entre 2014 et 2015 pour couvrir le paiement des droits liquidés au niveau du bureau principal des douanes de Sikasso, la liste exhaustive desdites quittances de paiement fictives se trouve à la page 28 du procès-verbal de vérification signé le 15 juillet 2017 figurant au dossier. Ces quittances de paiement fictives ont été toutes utilisées par Moussa Coulibaly, Trésor Payeur, pour établir de fausses déclarations de recettes remises à Moridjan Traoré, Régisseur des douanes comme si lesdites recettes douanières avaient été encaissées par le Trésor public, alors qu’il n’en est rien. En fait, ces fausses déclarations de recettes constituaient des décharges que Moussa Coulibaly lui donnait des sommes d’argent à domicilié ou en tout cas en dehors des circuits normaux. Et comme seule explication par rapport à ces 20 quittances de paiement fictives et aux 20 déclarations de recettes y rattachées, le trésorier payeur Moussa Coulibaly disait devant le juge d’Instruction qu’il s’agit d’erreurs d’imputation.

Dans ces conditions, les faits reproches à Moussa Coulibaly initialement qualifiés de complicité de crime d’atteinte aux biens public reproché à Moridjan Traoré devraient être requalifiés de crime d’atteinte aux biens publics par rapport au montant des 20 quittances de paiement fictives qu’il a établies pour justifier des déclarations de recettes dont les montants ont été utilisés par lui à ses fins personnelles que Coulibaly remettait à Moridjan Traoré, chaque fois.

Sur le renvoi devant la Cour d’Assises des inculpés, il résulte de l’information des charges suffisantes contre que Moridian Traoré et Moussa Coulibaly. Après des débats houleux de 13 heures d’horloge, les inculpés ont été retenus coupables des faits à eux reprochés. Ainsi, ils ont été condamnés à la prison à perpétuité et au paiement intégral des montants

Boubacar PAÏTAO

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