Au Mali, contrairement à la sous-région, la loi n’a pas fait des MGF un délit. Malgré tout, elles constituent des atteintes à l’intégrité physique des victimes. Qu’en pensent les textes révélés, les OSC et les juristes ?
La mutilation génitale, qui remonte à la nuit des temps, a retiré à de milliers de femmes la possibilité de ressentir du plaisir pendant les rapports sexuels, la possibilité d’enfanter.
Malgré toutes les luttes, tous les combats des ONG, des OSC,…, du tort est causé jusqu’à ce jour aux filles et femmes au Mali.
Pourtant, les textes communautaires ou internationaux, les traités et conventions ratifiés, par le Mali criminalisent la mutilation génitale des femmes.
« Etant donné que ces choses se font dans la clandestinité et qu’il n’y a pas de dénonciation, il n’est pas facile de dire le nombre par an, ni même le nombre de victimes », affirme Moussa Bocoum, juriste, travaillant pour une ONG internationale de soutien à la dispensation de la justice. Il ajoute : « du point de vue du droit, c’est une infraction. Par rapport aux textes révélés le débat est posé suivant notre obédience, notre religion. Et les personnes à même de répondre à ça sont les religieux ».
Selon Kalilou Doucouré, imam, certains estiment le début de la circoncision à 4000 av. J.-C. [72] tandis que d’autres la réfèrent au prophète Abraham (2000 av. J.-C.). « Il a été authentifié sous l’autorité du Prophète, (PSL), un hadith spécial au sujet de l’excision. Il est venu dans la Sunna sous l’autorité d’Umm Atiyah Al-Ansari, qu’une femme à Médine avait l’habitude d’exciser les filles. Ainsi, le Saint Prophète lui a enseigné la méthode louable. Dans une autre narration est venu le mot (ashmee), et sa signification est de prendre un peu de la peau c’est au-dessus de la sortie de l’urine, comme la crinière d’un coq, et c’est dans la Sunna qu’est prescrite l’excision des filles », explique notre religieux.
Bien entendu, son argumentation est battue en brèche par d’autres religieux qui affirment que des textes plus récents tirés des hadiths et de la sunna contredisent ce que dit notre imam. « En aucun moment, l’islam ne soutien les MGF », disent-ils.
« Grace à la reconstruction clitoridienne, je suis enfin une femme », confie madame F. M., promotrice d’école. « Les faits se sont déroulés quand j’avais 6 ans. Un matin, ma tante, la sœur à mon papa est venue avec de nouvelles robes et nous a amené (d’autres enfants de la cours et moi) chez une vielle du quartier. Sur place, nous entendions des cris alors qu’en voyant les robes, je pensais que c’est à une fête que l’on se rendait. Malheureusement pour nous, malgré la peur, les pleurs, on ne nous a pas épargné », évoque notre interlocutrice les larmes aux yeux.
Selon F. M., c’est lorsqu’elle a commencé à fréquenter les garçons, que son copain de l’époque le lui a appris. « Mon copain m’a demandé si j’étais consciente de ce que l’on m’avait fait. Toute étonnée et retournée, je lui demande la raison de ses questionnements », a-t-elle dit.
« Ma chérie, ceux qui t’ont excisé, non seulement ils ‘t’ont coupé le clitoris, mais également les petites et les grandes lèvres. Il te faudra subir une opération pour refaire cette partie pour te permettre de retrouver ta féminité. C’était très dur à entendre de la part d’un homme, de surcroit un prétendant. C’est alors ainsi que j’ai commencé à faire des recherches, à demander aux médecins pour savoir ce qu’il fallait faire. C’est à 30 ans que j’ai fait l’opération. Je suis âgée de 35 ans et je jouis désormais de ma féminité entièrement. Je n’ai pas encore d’enfants mais je garde l’espoir d’en en avoir dans un futur proche. Si seulement, nos médecins pouvaient sensibiliser les dames sur les conséquences de la mutilation génitale lorsqu’elles se rendent à l’hôpital pour les consultations prénatales ! »
Selon Mohamed Diallo, gynécologue, les conséquences de la mutilation génitale sont à moyen et à long terme. « A moyen terme, c’est l’hémorragie, la douleur, l’infection qui peuvent conduire au choc et à la mort. A long terme, ce sont des séquelles avec l’impossibilité d’accomplir le rapport sexuel, des troubles urinaires et même des complications au moment de l’accouchement ».
« J’étais sur le programme d’une ONG pour une campagne de sensibilisation sur les problématiques d’appui au développement de la petite enfance, droit sexuel et reproductif », explique Awa Samba Coulibaly. D’après elle, pendant les quelques mois qu’elle a fait à Dioila et dans les petits villages environnants, « à présent la question de mutilation génitale féminine est et reste un sujet qui ne peut pas être abordé dans tous les villages, encore moins avec tout le monde ».
Aminata Agaly Yattara
Cet article a été publié avec le soutien de JDH journalistes pour les Droits Humains et FIT en partenariat avec Wildaf.
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