Au Mali, l’un des principaux maux de l’espace politique reste la transhumance politique. Une pratique dangereuse pour la démocratie.
maliweb.net – Après le coup d’État contre Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK), le 18 août 2020, la plupart des sondages menés par différentes organisations de la société civile ont révélé un manque de confiance des citoyens maliens en leur classe politique. Une classe qui ne leur paraît plus assez crédible. La majorité des citoyens ayant pris part à ces sondages ont jugé important de confier cette transition aux militaires qui ont abrégé leur souffrance. Mais comment les citoyens peuvent-ils avoir confiance en cette classe politique ? Pour qui voulez-vous qu’ils votent lors des élections ?
Au Mali, le jeu politique laisse comprendre que les leaders des partis ne sont opposés que théoriquement, devant le public. Mais au fond, ils semblent partager les mêmes idéologies. Les mêmes qui ont fui le Rassemblement pour le Mali (RPM) pour le parti de Soumeylou Boubeye Maïga, alors que celui-ci était Premier ministre et pressenti dauphin d’IBK, fuient l’ASMA une fois que le baron de ce parti perd son poste.
Des « groupements d’intérêts économiques »
Depuis le départ d’IBK et l’annonce des dates pour les prochaines échéances électorales, la classe politique malienne ne cesse de fortifier les citoyens dans leur conviction. La transhumance, qui a toujours caractérisé certains hommes politiques de ce pays, a repris de plus belle. Les partis où le vent est pressenti plus favorable reçoivent le plus d’adhésion et les « petits partis » se vident.
Après la mort de Soumaïla Cissé, président fondateur de l’Union pour la République et la démocratie (URD), deux grandes adhésions sont enregistrées par ce parti. Celle de Mamadou Igor Diarra et de Dr Boubou Cissé, ancien Premier ministre. L’acceptation de ces deux adhésions soulève la question de la gestion de ces entreprises politiques au Mali.
Dans ce pays victime d’une crise multidimensionnelle, nombreux sont les partis politiques qui ne représentent que « des groupements d’intérêts économiques ». Des entreprises individuelles dont tout le fonctionnement reposerait sur le fondateur. De nouveaux membres ne les rejoindraient que si le parti est susceptible de gagner le pouvoir.
Manque d’idéologie
Parmi ces adhésions dans l’URD, celle qui semble la plus problématique est celle de Dr Boubou Cissé. Le Premier ministre d’IBK qui a démissionné en même temps que le président de la République. Des démissions qui ont été l’œuvre du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces Patriotiques (M5-RFP), duquel est membre l’URD de feu Soumaïla Cissé. Tant que les intérêts se rejoignent, les ennemis d’hier peuvent toujours devenir de bons amis.
Cette « transhumance politique demeure un véritable goulot d’étranglement à l’évolution de la jeune démocratie malienne ». Tant que l’arcane politique reste marqué par un tel mouvement irrégulier des hommes politiques, tels des papillons à la recherche de fleurs plus douces, il ne faudrait pas s’étonner que le taux d’électeurs aille à la baisse.
Le nomadisme politique est la preuve que bon nombre de ces hommes politiques maliens manquent d’idéologie politique. Ceux qui sont mûris d’une véritable conviction demeurent stables pendant toute une éternité. Ce nomadisme politique est un véritable danger pour la démocratie.
Fousseni Togola/maliweb.net
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