L’IMMIXTION DES RELIGIEUX DANS LES AFFAIRES DE L’ÉTAT : IBK SEUL RESPONSABLE
Depuis le rassemblement des musulmans au Stade 26 MARS, la polémique autour de l’ingérence des Religieux dans la sphère politique ne fait que s’enflammer. Tous les Maliens en parlent. Mais lorsque l’un des principaux acteurs de ce regroupement musulman, à savoir le Cherif de Nioro, dévoile sa relation et les raisons de son implication dans la politique, il y a, nous semble-t-il, matière à réflexion. 700.000.000 de francs CFA, IBK ne s’est-il pas engagé sur un terrain glissant en se monnayant ? Cette histoire relève combien même la relation IKB-Musulmans est complexe.
L’une des valeurs de la République laïque est la neutralité du Pouvoir politique qui reconnaît ses limites en s’abstenant de toute ingérence dans le domaine spirituel ou religieux. IBK n’a-t-il pas violé cette valeur lorsqu’il est parti s’apitoyer sur son sort chez le Cherif de Nioro ?
Dans une interview accordée, en mars 2018, à Alou Badara Diarra de l’ENQUÊTEUR, Mahmoud Dicko, interrogé sur l’immixtion du Religieux dans la politique, sera, on ne peut plus clair, dans sa réponse :
Tout d’abord, il expose les raisons de son implication dans la politique : «Je pense réellement que ce que les gens dénoncent comme étant l’immixtion des Religieux dans la sphère politique, les Religieux peuvent dire le contraire. Les Politiciens s’immiscent aussi dans notre champ. Aujourd’hui, personne n’est NEUTRE, aussi bien les Religieux que les Politiciens ; chacun rentre dans le domaine de l’autre…Les Politiciens, chaque fois qu’il y a élection, ce sont eux qui rentrent dans notre domaine. Ils vont aller voir les marabouts, les Chefs de religieux, mais ils ne sont jamais restés chez eux pour dire qu’ils n’ont rien à voir avec nous ; ce sont eux qui ont commencé à nous démarcher… »
Il continue en revendiquant son droit de citoyenneté avec sobriété : «Moi, je suis un citoyen libre de ce pays ; je suis Religieux, mais ça ne m’enlève pas mon droit de citoyen. Critiquer et donner mon point de vue, c’est mon droit. Je critique, j’accepte aussi que les gens me critiquent, parce que je ne suis pas détenteur absolu de la vérité…Je dénonce parce que je suis à la tête d’une organisation qui parle au nom de toute la communauté musulmane. Il serait difficile pour moi de me taire sur des questions qui, aujourd’hui, engagent ou intéressent plus de 98% de Maliens (ndlr: musulmans,)… »
Ensuite, pour élucider sa position il dira: « Nous n’avons jamais amené un projet de société à 100% musulman pour l’imposer aux Maliens. Tous les projets de société qui sont là sont des projets de société laïcs…Qu’est-ce qu’on a fait et qui n’est pas faisable ? Je ne sais pas. Est-ce qu’on a demandé l’application de la charia ou imposé certaines choses qui sont contraires à cette vie démocratique de notre pays ?… »
Enfin, il terminera par ces propos: « Il faut que nos Politiques acceptent aussi d’être critiqués. Peuvent-ils s’arroger le droit en disant qu’ils sont les seuls habilités à parler du Mali ? Qu’ils sont les seuls à conduire le Mali ? NON ! »
Il s’en suit qu’après analyse et en plus des révélations de Cherif de Nioro, tout devient limpide. IBK est seul responsable de cette situation. Il est irréel d’impliquer à ce point les Religieux dans la conquête du Pouvoir et, arrivé à bon port, leur demander de rester en marge.
Depuis l’avènement de la démocratie jusqu’en 2013, aucun candidat à la présidentielle au Mali n’a autant utilisé les Religieux à des fins politiques qu’IBK. Contrairement à ses Adversaires, il a su jouer avec les sentiments du Cherif de Nioro. Subtil et délibéré, il l’enjôle en utilisant « la technique de victimisation ». Et, pourtant, cette victimisation pour manipuler a bien fonctionné. Bouyé est tout simplement tombé dans le panneau en mettant le paquet pour que « Kankélintigui » brigue la magistrature suprême. Pour ce faire, la campagne électorale de 2013 s’est déroulée jusque dans nos mosquées et les prêches sont devenus des slogans électoraux en faveur du Dauphin IBK. Ils ont même fini par ancrer dans l’esprit de nos vieilles mamans que « voter IBK, c’est voter l’Islam et c’est voter pour le Paradis ».
Mais bon sang ! Comment aujourd’hui IBK croit-il se débarrasser facilement de ces personnes ? Lui, le « malheureux IBK » qui aurait été dépouillé de sa victoire à maintes reprises. Lui qui n’avait plus cette bonne position politique forte pour attaquer ni assez d’argent nécessaire pour suivre le rythme de la compétition. Et qu’il a fallu l’argent et l’influence du « Vieux Sage de Nioro» pour le faire sortir de sa déconfiture.
Personne ne peut le nier que sans ce support de grande taille, IBK aurait rencontré de nombreuses barrières à son ascension au Pouvoir. Cela était indéniable !
Son erreur, tout faire et tout accepter comme condition pour être Président de la République. Et dire qu’IBK n’est pas fou du Pourvoir … ?
700.000.000 francs CFA et une influence imposante sont le soutien apporté par le Cherif de Nioro pour qu’IBK puisse accéder au Pouvoir. Cela a fonctionné. IBK est devenu le Président de la République du Mali. À son tour d’être royal. Ça pouvait marcher, seulement si l’État était en position de souveraineté, libre de ses choix. Mais, ce n’est pas le cas, il n’est que l’émanation d’une volonté de l’extérieur, voire de la France.
Arrivé au pouvoir, notre Président a compris qu’il n’est qu’un « petit » de la grande classe mondiale. Il peut faire son intéressant devant son Peuple, mais la réalité en est qu’il ne pourra jamais tenir ses promesses. Ainsi, la morale que défendent toujours ceux-ci devient inopérante pour l’action des « Grands de ce monde ». Par conséquent, le danger surgi de ce fait a conduit l’essentiel de son Peuple à se détourner de lui, y compris ses alliés d’hier. Or, si l’État qui nous gouverne ne peut pas tenir ses engagements, comment reprocher aux citoyens de se comporter en rebelles pour défendre leurs propres intérêts ?
Par exemple, ce problème controversé sur l’homosexualité qui est de faire des risettes aux Dirigeants de la communauté internationale est amoral à ceux qui ont voté pour lui, IBK, compte tenu de leur foi.
Tout compte fait, le vin est tiré et il faut le boire. Maintenant, la question qui se pose est de savoir jusqu’où l’immixtion des Religieux musulmans dans la Politique nous conduira finalement. La laïcité dans notre République fera-t-elle obstacle ou non à l’émergence des musulmans dans la politique? L’avenir nous le dira…
Neimatou Naillé Coulibaly
LE COMBAT