Oui grand-père ! Dites au colonel Assimi Goïta de ne pas effacer la mémoire de “Mars 91”. Les pays, les Etats, les Nations ont tous des mémoires. Des mémoires qui leur permettent d’exister, de rester et de résister. Oui cher grand-père ! Ces mémoires qui ont fait le Mandé et la Charte de Kurukanfuka. Ces mémoires de la bataille de Kirina. Ces mémoires de la fin de Wagadu Bida.
Oui grand-père ! Ces mémoires de la pénétration française, de la colonisation, des deux guerres mondiales et des luttes héroïques de l’indépendance. Ces mémoires de la lutte contre l’esclavage et la Traite des Noirs. Ces mémoires des famines et de la sécheresse. Ces mémoires des grands combats et des vrais “Non”. Des mémoires comme Modibo Kéita, Mamadou Konaté, Fily Dabo Sissoko, Hamadoun Dicko, etc.
Oui grand-père, dans l’ère de la démocratie, Mars 91 est la plus grande mémoire. Une mémoire de grande lutte clandestine, de grandes marches, de grands meetings et de rassemblements. Une mémoire de grands combats idéologiques des grands professeurs, Abderrahmane Baba Touré, Mamadou Lamine Traoré, Ali Nouhoun Diallo, Dioncounda Traoré et des grandes dames, Adame Ba Konaré, Sy Kadiatou Sow. J’en passe.
Cher grand-père, une nouvelle Constitution effacera le vendredi noir, la marche interdite et le 26 mars 91. Une nouvelle Constitution effacera la mémoire des Martyrs. Une nouvelle Constitution brisera ce rempart démocratique et noiera la grande conférence constituante de 91 dans l’oubli.
Nous perdrons le repère démocratique. Une nouvelle Constitution fera oublier la lutte héroïque contre un régime militaire dictatorial. Une nouvelle Constitution enlèvera aux Martyrs, leur titre et fera d’eux des “Morts-Pour-Rien” (MPR).
Oui ! Mars 91 est un nouveau départ, une nouvelle ère, un Rempart démocratique. On n’efface pas comme ça une mémoire si on n’a rien de plus grand à offrir. Une nouvelle Constitution dérivant d’un coup d’Etat militaire contre un président démocratiquement élu, doit-il remplacer toute une mémoire réfléchie et bâtie sur le droit, la République, la justice et la liberté ? Faut-il perdre une mémoire bâtie sur la démocratie pour une mémoire de lutte contre la mauvaise gouvernance ? Non cher grand-père !
Nous avons notre mémoire de résistance coloniale, notre mémoire de luttes d’indépendances et nous avons notre mémoire de Mars 91. Ce qui fait de nous des “libres, indépendants et démocrates”. N’effaçons pas cette mémoire. Ces repères ! Car à des moments donnés de la vie d’une Nation, nous serons obligés de retourner à nos mémoires pour nous retrouver. Mars 91, est la mémoire de l’ère démocratique. Il nous unit à la démocratie par la Conférence nationale constituante et la Constitution de 1992.
Cher grand-père ! Organisons les élections. Quid à qui se présente mais élisons d’abord un président et une Assemblée et ensuite, révisions notre Constitution ! Conformons-nous d’abord en elle pour ne pas perdre ce repère démocratique ! Organisons les élections qui permettront de la réviser et ensuite, révisons-la !
C’est là que se trouve la stabilité politique et institutionnelle de l’avenir. Une Constitution est sacrée. Elle est pour les démocrates, ce qu’est le Coran pour le musulman et la Bible pour le chrétien. Notre Constitution de 1992 a été écrite en lettres de sang par nos Martyrs. A mardi prochain pour ma 56e lettre.
Lettre de Koureichy
Mali Tribune