La Constitution du 25 février 1992 n’est pas encore morte mais la Transition politique actuelle, qui fonctionne sur ses lois et principes, tout en ne lui reprochant rien dans le fond, décide cependant de la remplacer par une autre qui fait déjà polémique avant sa promulgation et son adoption par référendum.
Il faut dire que tous les régimes issus d’un putsch ont cette fâcheuse tendance d’élaborer à mi-parcours une constitution dont ils pensent certainement que sans ce chiffon de papier selon le mot du Général De Gaulle, ils ne sont pas considérés comme des dirigeants honorables.
Lui-même l’avait fait en 1958 en chargeant le juriste Michel Debré de lui rédiger une constitution à la hauteur de ses ambitions politiques et chez nous, le lieutenant Moussa Traoré, après 10 ans de dictature musclée (1968-1978) avait compris en 1974 la nécessité de doter le Mali d’une nouvelle constitution après la dissolution de celle de 1960.
Ainsi était née la Constitution de 1974, celle de la IIe République (1974-1991) qui mit en place l’UDPM mais dont on ne sait pas avec précision la composition de l’équipe de rédaction. En 2012, suite à la chute d’ATT, Amadou Haya Sanogo et ses copains avaient secrètement réuni des juristes qui leur sortirent une Loi fondamentale n°1 qui n’eut pas un grand avenir politique en raison de l’évolution du contexte politique qui ne permit pas au CNRDRE de s’implanter durablement dans le paysage politique.
Dix ans plus tard, en 2020, suite à la chute d’IBK, le Conseil national de salut public (CNSP), présidé par le colonel Assimi Goïta, après bien des hésitations, décide à son tour de changer de République après celle jugée pourrie des partis politiques, en chargeant une commission chargée de rédiger une nouvelle constitution comme si cela suffisait à guérir le pays de ses maux.
En 1991, tous les partis politiques qui le désiraient avaient participé à la rédaction de la Constitution lors de la Conférence nationale, mais là, l’ambition politique cachée des militaires fit qu’une commission spéciale fut seulement chargée du boulot constitutionnel, d’où tous les hiatus contenus dans le texte.
De cette manière, le Mali en est à sa 4e Constitution en seulement 63 ans d’existence politique. De ce texte, les journalistes et les analystes du droit constitutionnel en firent leur chou gras et le moins qu’on puisse dire, c’est que d’après les commentaires de la presse, la commission aux ordres a accouché d’un texte bourré de fautes et d’amalgames sans compter les imprécisions.
Mais le plus grave est que le texte crée un régime présidentialiste plus fort que celui des USA et même de la Fédération de Russie. Des commentateurs soupçonnent le président de la Transition d’organiser à travers cette constitution une élection présidentielle qui permettra à un n’importe qui de se faire élire président de la République en 2024 et dont la fin du mandat l’autorisera à revenir en 2029. En somme le scénario Poutine-Medvedev de 2011.
François Mitterrand, avant de parvenir à la tête de l’Etat français en 1981, avait qualifié la Constitution de 1958 de constitution monarchique ; on peut dire la même chose de cette constitution malienne de février 2022.
Facoh Donki Diarra
Ecrivain
Mali Tribune