L’analyse de l’interview de l’Imam Dicko fait ressortir les éléments suivants
1) la médiation de la CDEAO s’est déroulée sans qu’il y ait eu de discussion entre les parties en conflit. Dicko et le M5 attendaient des négociations sur les griefs qu’ils ont contre le régime et sur les propositions de solution qu’ils ont proposé au Président.
2) la méthode de négociation de la mission CDEAO a consisté à écouter chaque partie prenante séparément et à tirer des conclusions et recommandations le dernier jour dans une conférence de presse. C’est donc par conférence de presse que les parties concernées ont pris connaissance de ces conclusions et recommandations.
Cette façon de faire au lieu d’apaiser les rancœurs les a plutôt augmenter .
Ils ont eu l’impression que la mission n’était pas neutre et veut imposée sa solution jugée partisane.
3) les revendications de Dicko et du M5 sont nombreuses mais ils les résument à une mauvaise gouvernance qui selon eux menace de faire disparaître le Mali. Ils s’appuient en cela sur le bilan du Président IBK au plan sécuritaire, de la corruption, de l’organisation des élections, du fonctionnement de la justice notamment de la CC. Pour eux la solution pour sauver le Mali est de changer rapidement la tête de l’état ou à défaut le rendre moins nuisible en lui retirant beaucoup de ses pouvoirs pour les donner à un Premier Ministre plein pouvoirs .
Étant donné que cette solution n’est pas conforme à la constitution actuelle, ils proposent alors la mise en place d’une transition qui va permettre après la démission du président de tout remettre à plat et de passer vers une quatrième république en modifiant la constitution.
4) concernant la lutte contre le terrorisme et le djihadisme Dicko n’est pas d’accord avec la stratégie actuelle qui échappe complètement à l’état malien et cela malgré que les opérations se déroulent sur notre territoire. Il reproche à cette stratégie aussi d’avoir exclue la négociation avec les djihadistes et l’insuffisance des mesures pour obtenir le soutien des populations dans cette lutte.
Il crois que les négociations peuvent aider à connaître les motivations réelles des djihadistes et de leur apporter des contre arguments pouvant démobiliser beaucoup d’entre eux. La sensibilisation des populations peut aider à réduire leur collaboration avec l’ennemi et renforcer leur soutien à l’armée notamment dans le domaine du renseignement.
Il pense que toutes ces questions ne doivent pas rester tabou et doivent être discuter dans le cadre de la sortie de crise. Face à la déception des maliens par rapport à la gouvernance du pays seule des discussions approfondies sur toutes les questions en vue de trouver des solutions consensuelles peuvent rétablir la confiance des citoyens envers leurs dirigeants.
En conclusion les médiateurs doivent changer d’approche en mettant les parties prenantes en face pour qu’elles discutent tous les points de revendications et qu’un pv soit rédigé et signé par toutes les parties en indiquant les points qui ont fait l’objet d’accord ou de désaccord.
Dicko et le M5 doivent intégrer dans leur analyse les impacts à court, moyen et long terme,des solutions qu’ils proposent sur le plan sécuritaire (stabilité du pays), économique et sociale, de nos relations avec l’extérieur, ainsi que sur le plan politique et institutionnel ( affaiblissement de l’état, risque de perturbation pendant un temps trop long des institutions etc….) En un mot ils doivent prendre en compte le prix à payer par tous ( l’état, les populations, l’armée etc..)lorsque la solution qu’ils proposent est appliquée.
Le président qui a apparemment perdu le contrôle sur la direction à prendre pour sortir de cette crise doit reprendre l’initiative en organisant rapidement le dialogue avec toutes les parties prenante. Il doit rétablir la confiance en lui en montrant qu’il est capable d’apporter les changements nécessaires pour que l’état soit plus efficace dans la solution des problèmes majeurs que connaît le pays et les maliens de toute catégorie.