Kamissa Camara : “Le Pacte mondial offre une opportunité pour un meilleur encadrement du phénomène migratoire” “Aujourd’hui, la communauté malienne à l’étranger est estimée à 4 millions de personnes”
La ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Kamissa Camara, a réaffirmé l’adhésion totale du Mali aux engagements contenus dans le Pacte mondial en vue d’une meilleure gouvernance de la migration. Selon elle, “la communauté malienne à l’étranger est estimée à 4 millions de personnes et l’apport de cette diaspora au développement du Mali est évalué à plus de 700 millions de dollars par an “.
C’est exactement à 21 heures (heure locale) du lundi 10 décembre 2018 à Marrakech, au Maroc que la ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Mme Kamissa Camara, s’est adressée à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’adoption du Pacte mondial pour les migrations sûres, ordonnées et régulières. Elle a pris la parole tout juste après l’intervention du ministre des Affaires étrangères de la Guinée Equatoriale.
La plus jeune ministre (elle a 35 ans) a fait un discours digne de ce nom pendant 5 bonnes minutes, en présence de son collègue des Maliens de l’Extérieur et de l’Intégration Africaine, Yaya Sangaré, de l’Ambassadeur du Mali auprès des Nations Unies à New York, Issa Konfourou et celui du Mali à Rabat, Ousmane Amadou Sy. Sans oublier d’autres personnalités présentes dans la salle de plénière.
D’entrée de jeu, elle a, au nom du président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, remercié le Maroc pour avoir abrité cette grande rencontre internationale avec succès : “Permettez-moi, tout d’abord, de remercier Sa Majesté le Roi Mohammed VI et, à travers lui, le peuple frère et ami du Maroc, pour non seulement l’aimable invitation à cette Conférence mais aussi pour l’accueil particulièrement chaleureux et toutes les marques d’attention dont la délégation du Mali est l’objet, depuis notre arrivée en cette terre africaine. Je saisi l’occasion pour vous transmettre les salutations fraternelles et les regrets du président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Kéïta, de ne pas être avec nous”.
S’agissant de la question de la migration, elle précisera : “Le Pacte mondial que nous venons d’adopter constitue une opportunité unique pour optimiser l’ensemble des avantages de la migration, mais aussi pour contenir ses effets pervers dans l’intérêt supérieur des pays de départ, de transit et d’accueil. Ce Pacte n’est certes pas parfait. Peut-être l’aurait-il été s’il avait été juridiquement contraignant mais il représente d’abord et surtout un espoir renouvelé pour les 258 millions de migrants internationaux. Cet instrument traduit notre volonté commune d’imprimer une gestion efficace aux flux migratoires entre les pays d’origine, de transit et de destination des migrants, avec un accent particulier sur les impératifs de sécurité et de respect des droits humains”.
Regret du retrait de certains Etats membres
La ministre Kamissa Camara a profité de cette tribune pour déplorer le retrait de certains Etats membres : “C’est pourquoi le Mali regrette le retrait de certains pays de ce Pacte, fruit pourtant de compromis dynamique entre les différentes sensibilités de la communauté des nations. Les questions migratoires constituent l’une des préoccupations majeures de la gouvernance mondiale contemporaine dont la prise en compte dans les politiques nationales n’est plus une option”.
Citant le rapport du Secrétaire général sur la migration et le développement, qui chiffre à 466 milliards de dollars le montant des fonds envoyés par les migrants vers les pays à faibles revenus ou revenus intermédiaires, la ministre Kamissa Camara estime que “ces envois de fonds, très souvent effectués par les migrants au prix de nombreux sacrifices personnels ont permis de tirer des millions de personnes de la pauvreté et ont concouru à des améliorations considérables dans les domaines de la sécurité alimentaires, de l’éducation, de la santé, du bien-être et du logement au profit des familles résidant dans les pays d’origine”.
En ce qui concerne le cas du Mali, la jeune ministre a rappelé : “le Mali est à la fois un pays de départ, de transit et de destination des migrants. La communauté malienne à l’étranger est estimée à 4 millions de personnes et l’apport de cette diaspora au développement du Mali est évalué à plus de 700 millions de dollars par an. En plus desressources financières transférées tous les ans vers le Mali, la diaspora malienne est également riche en ressources humaines que le Gouvernement, en partenariat avec le Pnud, a décidé de capitaliser à travers un certain nombre d’initiatives participatives dont notamment le Programme Tokten. Il s’agit du transfert de connaissance à travers des nationaux expatriés. Pour autant, le Mali reste fortement opposé à la migration irrégulière. Depuis 1992, notre pays dispose d’un ministère dédié à la question des Maliens de l’Extérieur et plusieurs autres structures et programmes nationaux ont été mis en place pour assurer un meilleur encadrement des questions migratoires au Mali. C’est le cas du Centre d’information et de gestion des migrants et de la politique nationale de migration”.
En tout cas, aux dires de la ministre Kamissa Camara : “Le Mali reste déterminé à poursuivre les actions en faveur de la création des conditions politiques, économiques, sociales et environnementales qui permettent de protéger nos populations notamment la jeunesse contre le terrorisme et autres formes de crime transnational organisé y compris les trafics en tous genres, notamment celui de la drogue, des armes, des marchandises illicites, de blanchiment d’argent et malheureusement, le trafic d’êtres humains en particulier de migrants”.
Pour terminer son intervention, elle soulignera que “les questions migratoires sont aussi vieilles que le monde et que personne ne pourra arrêter les mouvements des populations à l’échelle mondiale. Par contre, si nous décidons de travailler ensemble, nous pouvons transformer les effets pervers des migrations en opportunités certaines pour le monde. Le Pacte mondial sur des migrations sûres, ordonnées et régulières, que nous venons d’adopter dans cette ville historique de Marrakech offre une grande opportunité pour un meilleur encadrement du phénomène migratoire. Le Mali, par ma voix, réaffirme son adhésion totale aux engagements contenus dans le Pacte mondial en vue d’une meilleure gouvernance de la migration, gage de stabilité et de développement harmonieux dans les pays d’origine, de transit et d’accueil “.
El Hadj A.B. HAÏDARA, envoyé spécial à Marrakech, au Maroc
Voici les 23 Objectifs du Pacte de Marrakech
Le Pacte mondial pour les migrations sera adopté lundi 10 décembre à Marrakech par l’Organisation des Nations Unies. Il comprend 23 objectifs fixés dans un document de 41 pages. Le Pacte de Marrakech n’est juridiquement pas contraignant.
Collecter et utiliser des données précises et ventilées qui serviront à l’élaboration de politiques fondées sur la connaissance des faits;
Lutter contre les facteurs négatifs et les problèmes structurels qui poussent des personnes à quitter leur pays d’origine;
Fournir dans les meilleurs délais des informations exactes à toutes les étapes de la migration;
Munir tous les migrants d’une preuve d’identité légale et de papiers adéquats;
Faire en sorte que les filières de migration régulière soient accessibles et plus souples;
Favoriser des pratiques de recrutement justes et éthiques et assurer les conditions d’un travail décent;
S’attaquer aux facteurs de vulnérabilité liés aux migrations et les réduire;
Sauver des vies et mettre en place une action internationale coordonnée pour retrouver les migrants disparus;
Renforcer l’action transnationale face au trafic de migrants;
Prévenir, combattre et éliminer la traite de personnes dans le cadre des migrations internationales;
Gérer les frontières de manière intégrée, sûre et coordonnée;
Veiller à l’invariabilité et à la prévisibilité des procédures migratoires pour assurer des contrôles, des évaluations et une orientation appropriée;
Ne recourir au placement en rétention administrative des migrants qu’en dernier ressort et chercher des solutions de rechange;
Renforcer la protection, l’assistance et la coopération consulaires tout au long du cycle migratoire;
Assurer l’accès des migrants aux services de base;
Donner aux migrants et aux sociétés des moyens en faveur de la pleine intégration et de la cohésion sociale;
Éliminer toutes les formes de discrimination et encourager un débat public fondé sur l’analyse des faits afin de faire évoluer la manière dont les migrations sont perçues
Investir dans le perfectionnement des compétences et faciliter la reconnaissance mutuelle des aptitudes, qualifications et compétences;
Créer les conditions permettant aux migrants et aux diasporas de contribuer pleinement au développement durable dans tous les pays;
Rendre les envois de fonds plus rapides, plus sûrs et moins coûteux et favoriser l’inclusion financière des migrants;
Coopérer en vue de faciliter le retour et la réadmission des migrants en toute sécurité et dignité, ainsi que leur réintégration durable;
Mettre en place des mécanismes de portabilité des droits de sécurité sociale et des avantages acquis;
Renforcer la coopération internationale et les partenariats mondiaux pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.