“Je ne te serre pas la main parce que tu es Noir” : en France, neuf personnes noires sur dix disent être victimes de discrimination
Meguetan Infos
C’est dans les espaces publics (la rue ou les transports en commun) que ces discriminations se font sentir le plus, d’après les Français noirs interrogés pour le baromètre du Cran révélé par franceinfo et “Le Parisien” mardi.
Neuf personnes noires sur dix, en France métropolitaine, disent être victimes de discrimination raciale dans leur vie de tous les jours. C’est ce que révèle le dernier baromètre du Conseil représentatif des associations noires (Cran), que franceinfo et Le Parisien vous dévoilent en exclusivité mardi 14 février. Ce “racisme du quotidien”, s’exprime parfois de façon presque imperceptible.
C’est dans les espaces publics (la rue ou les transports en commun) que ces discriminations se font sentir le plus, d’après les Français noirs interrogés. En un an, en métropole, sept personnes sur dix disent avoir fait face à des attitudes irrespectueuses ou méprisantes, estimant que c’était en lien avec leur couleur de peau. “Quand je demande ma route, je sais qu’on va me juger parce que je suis Noir. Les gens se demandent si je suis mal intentionné. Ils ne s’en rendent même pas compte et moi je le vois dans leur regard. Ils ont plein de préjugés”, raconte Armel rencontré dans les rues de Paris.
Insultes racistes et racisme ordinaire
Armel est coach sportif, originaire de l’Aisne, il a grandi à Soissons. Il n’y avait que trois ou quatre Noirs dans son école. Il garde en mémoire des plaisanteries. “Des petites blagues. Quand on est dans le noir, on va te dire : souris, on va te voir. C’est pas méchant, sauf que ça te rappelle que tu es différent. L’enfant n’a pas de recul, il ne comprend pas.” À Soissons, il dit avoir subi du racisme frontal. “On m’a dit : ‘Je ne te serre pas la main parce que tu es Noir’. Et là ils ne rigolent pas. Ils étaient plus grands, ils avaient 18-19 ans et moi j’avais 12 ans. C’est ça qui marque”. Des années plus tard, Armel est désabusé.
“J’ai 22 ans, j’ai grandi en France. On a appris à l’accepter. Moi je l’accepte, et je pense qu’il faudra beaucoup d’efforts pour que les choses changent. J’ai peut-être perdu espoir.”
Armel, 22 ans
À FRANCEINFO
Insultes franches ou racisme ordinaire. Laurie l’a vécu à Paris, c’était avec l’une de ses professeures. “Pendant le confinement, on était tous en visio et tout le monde disait qu’il profitait du jardin”, raconte-t-elle. Laurie a aussi un jardin et mais n’en profite pas spécialement “parce que c’est pas trop son délire”. Son enseignante lui dit alors : “De toute façon, tu n’as pas besoin de bronzer, t’es déjà Noire.” “Il n’y a qu’elle qui m’a vraiment fait sentir cette différence, dit Laurie, mais je ne pense pas qu’elle soit forcément raciste, juste qu’elle est ignorante et un peu bête.”
Discrimination dans le travail et à l’embauche
Un racisme sociétal qui se glisse aussi au travail par de petites réflexions. “On vous fait ressentir que vous êtes moins intelligent”, témoigne Noélie qui travaille dans une crèche. “Il y a des parents compliqués. Dès que vous avez la peau noire, ils ne vous font pas trop confiance pour gérer leurs enfants. Ils ne le disent pas mais on le sent. S’il y a des collègues blanches, ils nous traitent différemment”. Les deux-tiers des personnes interrogées affirment aussi que leur couleur de peau les a déjà empêchées d’accéder à un emploi.
L’enquête nous apprend aussi que les personnes noires sont toujours deux fois plus contrôlées par la police que la population française dans son ensemble. Le Cran met aussi un coup de projecteur sur le rejet familial de plusieurs minorités visibles : un tiers (31%) des Français affirment qu’ils réagiraient “mal” si leur enfant épousait une personne noire, ou de même sexe (36%) et jusqu’à 46% si cette personne est d’origine maghrébine.
SOURCE: https://www.francetvinfo.fr/