Issa Kaou N’Djim : «Nous sommes dans la dynamique d’accompagner le CNSP»
Le coordinateur général des Mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) donne son appréciation sur les conclusions de la concertation nationale sur la Transition. Aussi, il explique les raisons de sa différence de vue avec certains responsables du M5-RFP sur la conduite de la Transition
L’Essor : Quelle est votre appréciation sur les conclusions de la concertation nationale sur la Transition qui vient de s’achever ?
Issa Kaou N’Djim : Pour moi, le combat du peuple a été porté par le M5-RFP, à travers le leadership des organisations au départ comme la CMAS, l’EMK (Espoir Mali Koura) et le FSD (Front pour la sauvegarde de la démocratie). Nous étions les trois entités à demander le départ du président Ibrahim Boubacar Keïta et son régime.
L’implication de la communauté internationale et le fait de se conformer aussi aux valeurs démocratiques universelles ont fait qu’à un moment donné, le Cheick respecté l’imam Dicko avait pris l’option du dialogue. Et les événements ont évolué dans le sens que nous savons tous.
On a pris acte de l’intervention du Comité national pour le salut du peuple (CNSP). Donc les trois organisations qui signent toujours, à travers Dr Choguel Kokalla Maïga de FSD, Cheick Oumar Sissoko de l’EMK et moi-même, ont décidé de faire un meeting de remerciement au peuple malien. Ce rassemblement, organisé le 11 août, avait pour but de remercier le peuple et de se féliciter aussi du travail qui a été accompli par le CNSP notamment le parachèvement de ce combat de la population malienne, porté par le M5-RFP.
Donc, à partir de cet instant précis, se féliciter d’un acte nous mettait dans une logique d’accompagnement et de responsabilité. Les partis politiques n’ont pas d’autre vocation que de conquérir et exercer le pouvoir. Le souci des syndicats qui composent le M5, c’est l’aboutissement de leurs revendications. Alors que nous (la CMAS), sommes une entité homogène.
Nous nous sommes donnés comme objectifs de partager la vision de l’imam Dicko sur des questions religieuses et de bonne gouvernance. Le patriotisme, selon la vision de notre parrain, est de promouvoir les valeurs du vivre ensemble dans le pays. Donc, nous sommes cette organisation politique qui est homogène au sein du groupe. Tout le monde sait que les prises de position et la présence de l’imam sur le terrain ont été très décisives.
L’imam a fait une déclaration sur les médias publics, notamment l’ORTM, en disant que le CNSP a fait un travail de parachèvement, et qu’on doit tenir compte du combat que le M5 a mené au nom du peuple. Il a souhaité également qu’il y ait l’inclusivité positive, c’est-à-dire en impliquant même ceux qui étaient avec l’ancien pouvoir. Si ces derniers sont d’accord pour qu’on tourne la page, qu’on aille de l’avant, pourvu que cela n’entrave pas la justice.
Le pays a besoin aujourd’hui de la réconciliation, de tous ses fils et de toutes ses filles. Nous avons aussi des terroristes qui sont partout en train d’attaquer nos forces de défense et de sécurité. Si on doit se mettre dans des querelles de positionnement, de comment et qui doit être le président ou le Premier ministre de la Transition, cela ne devrait pas être, de notre point de vue, l’objectif de la lutte. Ce qui compte, c’est d’arrêter les critères du choix des hommes et des femmes qui vont animer la Transition.
Nous avons été associés à la réflexion. Le CNSP a pris en compte le document du M5-RFP. Et le reste du peuple s’est prononcé sur le document de base présenté par le CNSP. Il y a eu une synthèse sur cette base. En démocratie, on ne demande pas les 100%, cela n’existe pas. Personne ne peut contester qu’aujourd’hui, la majorité des Maliens est d’accord avec la charte de la Transition.
À partir de ce moment, l’objectif c’est comment accompagner le CNSP avec le reste du peuple pour réussir la Transition. On ne peut pas rester dans une posture de contestation, rien que pour contester, alors qu’il y a des urgences. Nous, la CMAS, nous nous démarquons de cette position d’une partie du M5-RFP parce que le mouvement n’est pas un groupe homogène.
Le M5-CMAS qui a tout son sens, nous pensons que personne ne peut se cacher derrière le M5 pour continuer une lutte d’arrière-garde. Donc, je me réjouis de l’adoption de la charte et nous allons défendre ce document pour que nous puissions réussir la Transition.
L’Essor : Aujourd’hui, quelle est la nature du rapport entre la CMAS et le M5-RFP ?
Issa Kaou N’Djim : Vouloir dissocier le M5 de la CMAS, c’est ne pas connaître l’historique de ce mouvement. Je suis membre fondateur du M5 dont aujourd’hui, je me désolidarise d’une partie. Sans la CMAS, le M5 n’est pas total, sans fausse modestie. Toutes les réunions du M5 se tiennent au siège de la CMAS. à l’époque, Manassa Danioko disait : « la CMAS et les autres ».
Je pense que les gens doivent souvent avoir de l’humilité. Tout ce que je dis, je porte le leadership d’une organisation qui est basée sur des valeurs incarnées par l’imam Dicko. Je pense que le rapport n’est pas conflictuel mais seulement, il s’agit de montrer tout simplement que nous nous désolidarisons. Nous nous démarquons et nous sommes dans la dynamique de soutenir le peuple à travers le CNSP pour réussir la transition.
L’Essor : Quel rôle la CMAS entend jouer concrètement dans la conduite de la Transition ?
Issa Kaou N’Djim : Un rôle d’implication, de sensibilisation, de mobilisation, d’information, en ne laissant pas faire les partis politiques classiques qui ne sont pas dans la dynamique de soutenir le peuple. Pour nous, c’est la deuxième étape de la lutte. Nous avons contesté un régime considéré par beaucoup de Maliens comme incapable de continuer à gérer ce pays.