Intégration sociale des filles déscolarisées : Retrouver l’estime de soi
Meguetan Infos
Selon les statistiques, les filles sont nombreuses à abandonner l’école très tôt, à partir à l’exode en ville pour chercher de meilleures conditions pour plusieurs raisons. Quelles sont les opportunités de seconde chance pour ces jeunes filles ? Quelles sont les structures qui leur offrent une seconde chance ? Avec quels résultats ?
Aminata Kanté était promise à une belle carrière. Studieuse, elle aimait les études et se voyait infirmière. Mais, ses rêves seront stoppés vite. En effet, à 14 ans, elle va tomber enceinte et pour éviter l’opprobre à sa famille, elle s’est enfuit à Bamako.
Oumou Sow, n’était pas intelligente, mais, tenait aux études. Mais, après avoir échoué au DEF deux fois, sa mère a trouvé qu’elle n’était pas faite pour les études et l’a promis à un homme. Pour y échapper, elle s’enfuit et trouve réfugie à Bamako, … dans la rue.
Depuis quelques années, beaucoup d’associations, d’organisations non gouvernementales se sont créées au Mali pour protéger les jeunes filles vulnérables ; promouvoir, protéger et défendre leurs droits ; lutter contre toutes les formes de violences à elles faites, notamment les pratiques traditionnelles ; informer, former et éduquer les femmes sur leurs droits.
Dans un bulletin statistique datant d’octobre 2018, intitulé, « la femme et l’enfant en chiffres au Mali », le Centre national de Documentation et d’Information sur la Femme et l’Enfant (Cendife), explique que 162 filles à Bamako, sur la période, ont été accueillies et hébergées, 77 autres ont été réinsérées professionnellement et 59 ont été scolarisées.
Le Bureau national catholique pour l’Enfance BNCE, pour sa part, a réinséré 53 filles en abandon scolaire, selon Amanda Coulibaly, directrice de programme de BNCE Mali.
Le BNCE existe depuis 2012. Il est une structure de promotion et de protection des droits des enfants. A Bamako ainsi que dans toutes les localités où il est, BNCE a un centre d’accueil.
« Nous sommes en partenariat avec beaucoup d’ONG nationales comme internationales, les structures étatiques et aussi les personnes de bonne volonté qui nous réfèrent fréquemment des filles. Nous avons accueilli beaucoup de filles. A ce jour, notre centre héberge une dizaine de filles », précise Amanda. Pour elle, le BNCE fait une prise en charge holistique des filles à lui référées. Il s’agit, selon elle, de mettre en confiance ces jeunes filles car beaucoup ont perdu l’estime d’elles-mêmes avant d’arriver au centre. Nombreuses sont celles qui pensent avoir gâché leurs vies. Avec les appuis psychologiques, BNCE fait en sorte qu’elles se fassent confiance en leur montrant qu’être victime de violence ou avoir un enfant n’est pas la fin du monde, et surtout que l’on peut bien se relever de ces situations et se reconstruire.
Dès leurs arrivées, au BNCE, les animatrices font comprendre aux filles qu’elles ne sont qu’en transit. Donc, on leur apprend un travail : art culinaire, agro-alimentaire, saponification coiffure, couture, tatouage henné avant de les réinsérer.
« Tout cela pour que si la fille retourne chez elle, qu’elle parvienne à se prendre en charge. Pendant ce temps, on recherche les familles pour faire la médiation jusqu’à la réinsertion familiale. On aide avec une activité génératrice de revenus », explique la directrice du BNCE.
Aïcha Coulibaly, victime confie comment elle s’est retrouvée au centre : « je travaillais dans une famille à Sogoniko à mon arrivée à Bamako. Le fils du patron m’a mis enceinte et quand les patrons ont su, ils m’ont chassé de leur maison. Quelqu’un m’a amené au commissariat et c’est comme ça je suis venue au centre. Ça me fait 3 mois que je vis dans le centre d’accueil de BNCE. Je ne travaille pas, mais je suis prise en charge ainsi que mon enfant ».
« Je crois que j’ai 15 ans. J’ai un enfant de 6 mois. Je suis venue du village avec une grossesse car j’ai accouché un mois après mon arrivée », révèle Araba Dicko.
La famille dans laquelle je travaillais m’a dit qu’elle ne pouvait pas me garder avec un bébé. C’est comme ça que je me suis retrouvée dans la rue et qu’une personne de bonne volonté m’a ramené au centre de transit du BNCE. Heureusement que ce genre de centre existe car je ne me voyais pas retourner au village dans ces conditions. Aujourd’hui par la grâce de Dieu, au centre mon enfant et moi ne manquons de rien, ajoute Dicko.
« De manière concrète, on a pu réunifier beaucoup d’enfants filles et garçons. On ne peut pas calculer le nombre d’enfants tellement car ils sont nombreux à avoir bénéficié de notre accompagnement », conclut Amanda Coulibaly, directrice de programme du Bureau national catholique pour l’enfance BNCE Mali.
Aminata Agaly Yattara
Cet article a été publié avec le soutien de JDH Journalistes des Droits Humains et NED
Mali Tribune