Insécurité alimentaire grandissante dans le cercle de Goundam : L’ADCG tire la sonnette d’alarme
Le cercle de Goundam est confronté à une insécurité alimentaire grandissante. Et cela par le fait de la mauvaise alimentation en eau des lacs du système Faguibine. Saisie du problème, l’Amicale pour le développement du cercle de Goundam (ADCG) a organisé un point de presse le mercredi 6 janvier 2021 au siège de l’Ir Ganda pour alerter les autorités en vue de la mise en eau des lacs du système Faguibine, garante de la paix et de la stabilité dans le cercle de Goundam et la région de Tombouctou en général.
Dans son intervention, Issa Arsina Cissé (président de l’ADCG) a fait savoir qu’informée de la situation, l’ADCG a aussitôt pris à bras-le-corps le dossier, en initiant plusieurs actions notamment la mise en place d’un comité d’experts pour réfléchir sur la question et proposer des pistes de solution aux autorités concernées afin de mieux accompagner cette action de plaidoyer en faveur du système Faguibine pour lequel l’ADCG ne ménagera aucun effort pour sa mise en eau effective, garante de la paix et la stabilité dans le cercle de Goundam et la région de Tombouctou en général.
De son côté, Abocar Hanga Touré, président de l’Autorité intérimaire du cercle de Goundam (porte-parole de la délégation des élus du cercle de Goundam), a informé que le système Faguibine (situé dans la région de Tombouctou) qui s’étend sur 3 cercles (Goundam, Diré et Tombouctou) a des potentialités agro-sylvo-pastorales qui sont, entre autres, des ressources en terres exploitables estimées à plus de 300 000 hectares de terres fertiles aptes à l’agriculture ; des zones de pâturage en saison sèche (bourgou) estimées en moyenne à 85 000 ha ; des ressources halieutiques permettant la pêche de centaines de tonnes de poissons par an ; des ressources sylvicoles constituées essentiellement de quelques peuplements d’acacias ; une faune sauvage, jadis abondante, mais réduite à quelques antilopes, chacals, hyènes, lièvres, outardes, oiseaux d’eau, etc.
Tout ceci démontre l’importance du système Faguibine dans la vie des populations du cercle de Goundam. Cette année, a-t-il alerté, les conditions de mise en eau du système sont absolument chaotiques. Les riverains des chenaux d’alimentation des marigots et lacs ont perturbé le régime hydraulique, toute chose qui a plongé les populations dans un désarroi total. L’OMVF et les services techniques déconcentrés de l’Etat qui veillent sur le régime d’écoulement de l’eau sont absents du terrain.
“En réponse à la détresse des populations en amont et en aval du système, les populations elles-mêmes ont pris plusieurs initiatives locales à savoir, des actions volontaires ont été initiées par les collectivités et des organisations de la société civile (notamment les associations PDG et le collectif S’unir et Agir pour Goundam) qui ont envisagé de mobiliser des jeunes pour le curage des chenaux en amont et en aval ; des actions de dénonciations et d’alertes portées par les jeunes du cercle ayant abouti à la visite du conseiller aux affaires administratives et juridiques (CAJ) du gouverneur de Tombouctou aux autorités locales pour évaluer la situation et notamment les risques sur la campagne agricole. A cet effet, une mission conjointe des autorités régionales et locales en collaboration avec l’OMVF (sur financement de l’OMVF) a sillonné du 28 au 30 novembre 2020 la zone pour identifier les divers goulots d’étranglement afférents au remplissage des lacs”, a-t-il expliqué.
Selon Abocar Hanga Touré, il ressort de cette mission les constats suivants : l’occupation irrégulière des lits mineurs des chenaux, les aménagements sauvages et la gestion inadéquate de l’hydraulique agricole, les barrages de pêche obstruant les voies de passage de l’eau, la prolifération de plantes aquatiques encombrantes (tassakane…), la culture de bourgou dans les lits des chenaux, l’ensablement des seuils (Kondi, Kamaina…) Les conséquences de cet état de fait sont, entre autres, l’inondation en amont, la sècheresse en aval, l’échec de la campagne agricole 2021.
Il a fait savoir que les initiatives locales et les actions ponctuelles envisagées ne sont pas en mesure d’endiguer le problème du Faguibine, qui requiert des actions de grande envergure. “C’est la raison pour laquelle, une mission d’urgence dirigée par le président de l’Autorité intérimaire de Goundam a séjourné à Bamako en début de cette semaine. La délégation, en collaboration avec l’Amicale pour le développement du Cercle de Goundam (ADCG), qui est en alerte depuis longtemps, a rencontré le ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche et le ministre-commissaire à la Sécurité alimentaire. L’objectif était d’attirer leur attention sur la situation qui prévaut et voir avec eux les mesures urgentes à prendre à court, moyen et long termes pour soulager les populations. A l’issue de ces différentes rencontres, les ministres n’ont pas caché leur préoccupation de la situation. Et, ils ont même proposé de se rendre sur place très bientôt pour s’enquérir de la situation sur le terrain. D’ores et déjà, les principales attentes exprimées au cours des échanges s’articulent autour de deux grandes préoccupations ; à savoir : la gestion des urgences et la gestion de l’OMVF sur le moyen et long terme”, a-t-il fait savoir.
D’après lui, les actions d’urgences à envisager devront distinguer, entre autres, des actions immédiates nécessaires pour contribuer à sauver la campagne agricole en cours et celles d’assistance aux populations sinistrées, des actions pour anticiper les risques pour les campagnes à venir, en attendant le démarrage du Programme-cadre. Les mesures immédiates consistent, entre autres, à apporter un appui aux populations riveraines pour dégager le seuil de Kamaina, apporter des appuis ciblés en intrants agricoles (engrais et semences), appui aux populations sinistrées : aide alimentaire, aliments bétails, semence, appui en fournitures diverses (nattes, tantes, petits équipements…), appui en engins de pêche (filets, hameçons…)
Les actions d’anticipation pour les campagnes avenir visent, entre autres, à désigner un directeur de l’OMVF ; ramener la direction de l’OMVF à son siège à Goundam ; doter l’OMVF en ressources humaines complémentaires et en logistique appropriée à ses missions, conformément à son cadre organique ; immatriculer et inscrire les chenaux et leurs servitudes (conséquentes) comme patrimoines immobiliers de l’Etat, et obtenir une inscription budgétaire pour leur protection et leur entretien ; mettre en place un Comité paritaire de gestion et d’entretien des chenaux et infrastructures hydrauliques du système Faguibine ; créer dans cette phase de transition un cadre de concertation spécifique de proximité adapté aux enjeux de gestion du système (par exemple un cadre présidé par le président du Conseil régional avec un secrétariat assuré par le Conseil de cercle) ; diligenter une mission de terrain pour identifier tous les seuils critiques et les évaluer, entre autres.
Sur la gestion de l’OMVF à moyen et long termes, il a souligné qu’il urge, entre autres, d’inscrire les orientations dans la perspective du PC-RDSF ; de relancer la Coopération norvégienne en qualité de chef de file des PTF pour la mobilisation des partenaires du système Faguibine ; de relancer la Bad pour la mobilisation des ressources financières devant servir à mener des études d’APD pour l’aménagement hydro agricole et la construction d’un agropole dans la zone OMVF ; de diligenter les démarches auprès de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uémoa) pour débloquer les fonds pour la mise en œuvre de la composante environnementale du Programme-cadre pour la restauration et le développement du système Faguibine (PC-RDSF) en souffrance depuis bientôt deux ans.
Siaka Doumbia
Source: Aujourd’hui-Mali