Imbroglio diplomatique autour des 46 mercenaires ivoiriens : Comment le Mali a contraint Alassane Dramane Ouattara à laisser paraître qu’il n’est soucieux que des malfrats maliens réfugiés chez lui
Meguetan Infos
A malin, malin et demi. L’octogénaire aux commandes de la Côte d’Ivoire grâce à un frauduleux troisième mandat doit se poser mille questions. Parmi celles-ci, celle qui le turlupine le plus est de comprendre comment il s’est facilement laissé pris au piège des jeunes colonels maliens.
En libérant sous les auspices de la diplomatie togolaise trois femmes soldats parmi les 49 mercenaires ivoiriens capturés à l’aéroport international Modibo Keïta Bamako-Sénou le 10 juillet dernier, les autorités de la transition ont réussi un coup de maître. Elles ont indiqué leur bonne foi quant à une solution négociée entre Africains pour parvenir à un dénouement heureux d’une affaire hautement sensible qui visait la déstabilisation de leur pays par un pays frontalier (que l’on sait du reste au service d’une puissance extra-africaine), mais elles ont surtout amené la Côte d’Ivoire d’Alassane Dramane Ouattara à reconnaître devant les yeux du monde son forfait tout en s’engageant à respecter désormais son voisin. Cet avis aurait dû être accompagné d’un geste fort d’Abidjan si l’intelligence diplomatique avait été la chose la mieux partagée. La Côte d’Ivoire aurait pu, entre autres gestes, notifiés dans la foulée aux opposants maliens réfugiés sur son sol de quitter le pays puisque, plutôt que de les obliger à un devoir de réserve, elle leur avait laissé la liberté totale de s’en prendre au Mali par diverses voies. L’un de ces opposants maliens, le plus rigolo par eux, Ibrahima Aïné Camara, avait même pu se proclamer désormais président de la transition et envisagé de venir prendre ses fonctions au Mali. Le ridicule ne tuant pas, il demeure au bord de la lagune Ebrié sans manifester à ce jour la moindre capacité politique de prendre à exercer les plus hautes fonctions au Mali. Mais dans un entretien téléphonique qui a fuité, c’est Alassane Dramane Ouattara lui qui, parlant avec Boubou Cissé, ancien Premier ministre du Mali, le dernier de l’ère IBK, qui se moquait de Bamako en se demandant s’il y avait de vrais économistes dans l’équipe dirigeante à Bamako, pour conclure que la transition malienne ne tiendrait plus que quelques mois. Ce qui, de toute évidence, laissait paraître des complots en préparation.
L’affaire des 46 derniers mercenaires déférés devant la justice va ainsi connaître des développements inattendus. La Côte d’Ivoire, qui ne cessait de vouloir culpabiliser le Mali, tenait publiquement des menaces peu voilées, tout en ameutant secrètement l’ensemble des chefs d’Etat de la sous-région pour qu’ils exercent sur Bamako des pressions qui contraindraient les Maliens à relâcher au plus vite les soldats en captivité car l’affaire est en train de créer des tensions de plus en plus vives dans le pays et contre le président Ouattara et son régime accusés de tous les maux par l’écrasante majorité des Ivoiriens parmi lesquels les activistes et les artistes les plus en vue. Avertis de cette réalité, le Colonel Assimi Goïta et ses équipes ont courtoisement reçu différentes délégations africaines venues plaider la cause des 46. Macky Sall, président du Sénégal et président en exercice de l’Union Africaine, est venu plaider. Damiba, alors président du Faso, l’a suivi. Les avocats se bousculant au portillon du palais de Koulouba, Assimi saisit l’occasion de l’intervention du ministre des Affaires du Nigeria le 09 septembre pour lâcher l’explosif sur le bloc de granit derrière lequel se blottissait Alassane Dramane Ouattara. Pourquoi la Côte d’Ivoire n’extraderait au Mali les opposants maliens réfugiés Abidjan et protégés par le président ivoirien ? Cette éventualité, qui ne manque pourtant pas de bon sens, en diplomatie comme en justice, a créé la panique chez ADO ; il n’a vraiment pas de réponse appropriée à cette demande à laquelle il n’avait pas du tout réfléchi. Sa seule réaction, c’est de réunir son conseil de sécurité, comme pour faire répondre à une déclaration de guerre faite par le Mali. Réponse déraisonnée : la Côte d’Ivoire n’accepte pas le chantage du Mali et saisit la CEDEAO pour qu’elle statue sur cela et, au-delà de cette échéance, elle n’attendra plus rien. Forte menace dont Bamako se moque royalement en notifiant que le Mali n’est nullement concerné par le prochain sommet de la CEDEAO qui se tiendra hors d’Afrique. En réalité, ADO s’est fait découvrir lamentablement. Il a laissé paraître qu’il est plus soucieux du sort des opposants maliens réfugiés à Abidjan grâce à sa bienveillante protection que de celui de mercenaires dont tous ne sont d’ailleurs pas des Ivoiriens, même si parmi eux il y a quelques Ivoiriens dont la situation est de plus en plus insupportable par leurs familles et par leurs concitoyens qui expriment au quotidien leur ras-le-bol, risquant de provoquer des soulèvements populaires.
Bref, le sommet de la CEDEAO à New York a vécu en marge de la 77ème session de l’assemblée générale des Nations Unies. Sans s’entendre avec les autorités maliennes, il décide de l’envoi à Bamako le mardi, 27 septembre, d’une délégation de haut niveau comprenant trois chefs d’Etat. Avec politesse, le Mali fait savoir que pour des contraintes d’agenda, ladite délégation ne peut être reçue que le 29 ou le 30 septembre. Diplomatiquement, le Mali administre la leçon de souveraineté des Etats à respecter, mais surtout une leçon de respect tout court, voire d’humilité. Mais, pas plus que pour la CEDEAO, la politesse n’est pas la chose la mieux observée par le pouvoir ivoirien sous ADO. Alors que les chefs d’Etat sont annoncés pour le 29 septembre, Alassane Dramane Ouattara, qui n’en sera pas à une provocation près ou est-il complètement désorienté, profitant des dispositions sous régionales de libre circulation des personnes et des biens dans l’espace commun, dépêche au Mali une délégation conduite par le ministre Aly Coulibaly et comprenant des résidents maliens en Côte d’Ivoire. Il n’en avertira pas les autorités maliennes qui notent le manque de politesse et de courtoisie, si ce n’est tout simplement pas un manque d’éducation ou un signe de mépris et d’arrogance, mais ignorent la délégation ivoirienne qui se rend librement à Nioro du Sahel, auprès de la respectable personnalité de céans, le Chérif M’Bouillé, à plus de 700 kilomètres de Bamako. On imagine bien ce qu’Aly Coulibaly sont allés faire à Nioro du Sahel. La méthode favorite d’Alassane Dramane Ouattara, c’est d’offrir des mallettes d’argent, toujours, pour recruter des mercenaires ou pour corrompre des personnalités. Mais il a oublié cette fois-ci deux éléments d’analyse. Premièrement, le Chérif de Nioro est un fervent patriote qui soutient la transition et nourrit pour le Président Assimi Goïta des sentiments quasi filiaux. Deuxièmement, le haut dignitaire religieux de Nioro est le fils de Chérif Hamaoula, saint homme qui a refusé toutes les distinctions honorifiques et autres largesses de l’administration coloniale française de la période de la deuxième guerre mondiale. Pour ces raisons, il a subi d’horribles injustices, notamment de nombreuses déportations loin de son Sahel, pour finir par décéder en France en janvier 1943, où sa noble sépulture se trouve à Montluçon. Il va falloir réclamer à l’injuste et criminelle France le rapatriement de ses dépouilles pur qu’il vienne reposer, enfin, définitivement dans sa lumineuse cité de Nioro à l’occasion du 80ème anniversaire de son décès en janvier 2023, c’est-à-dire dans quelques trois mois.
Dans la triste chronique de l’agitation de la CEDEAO, de l’ONU et de certains Maliens sous parapluie français autour de l’affaire des 46 derniers mercenaires détenus au Mali, on aura noté que Nana Akuffo du Ghana et Adama Barrow de Gambie sont repartis le 29 septembre sans déclaration. La CEDEAO, leur mandataire, a pourtant fait le lendemain, 30 septembre, une déclaration sur la nouvelle situation survenue au Burkina Faso. Allez-y comprendre pourquoi.
Sy Eric
Amadou N’Fa Diallo
Le National