Exercice du pouvoir d’état au Mali : Le problème n’est pas IBK, mais l’institution qu’il incarne !
La Constitution adoptée à l’issue du référendum du 12 janvier 1992 et promulguée par décret N°92-073 P-CTSP du 25 février 1992 est une copie aménagée au goût local de la Constitution française de 1958. Elle en partage tous les inconvénients sans en posséder les avantages. Car la France ne saurait être le Mali. Les deux Constitutions font du Président élu la clé de voûte du dispositif institutionnel de la République. À ce titre le Président est un « monarque élu » : tout part de lui et tout revient à lui. Son « bon vouloir » peut peser sur le fonctionnement des institutions et la marche des affaires de la République.
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Notre constitution prive de sens les institutions en les laissant flotter sur le corps social sans jamais le pénétrer. Cette Constitution est personnalisée et organise l’hypertrophie des pouvoirs présidentiels.
La pratique institutionnelle organise une subordination totale de l’Assemblée Nationale (parlement), pourtant premier pouvoir dans la tradition démocratique, à l’imperium présidentiel, le minimum d’existence que la loi fondamentale confère aux autres institutions constitutionnelles comme le gouvernement est effacé par l’hyper interventionnisme présidentiel qui perçoit toute initiative premier ministérielle comme une tentation et une tentative d’instaurer une dyarchie, une velléité de dualité au sein de l’exécutif.
L’Assemblée nationale est instrumentalisée pour assumer la responsabilité d’initiatives motivées de desseins inavoués. Quant au pouvoir judiciaire, il est encore en quête d’une identité forte, d’une indépendance garantie pour rendre en toute sérénité la justice.
Le régime politique qui préside aux destinées de notre pays depuis l’avènement de la démocratie fait du Président de la république l’épicentre du pouvoir, le détenteur de la prérogative de définir la politique de la nation, de nommer et de révoquer ad nutum à tous les emplois publics, en un mot de décider de tout.
Seul détenteur de l’ensemble des pouvoirs qu’il peut, à sa guise, déléguer de droit et de fait à n’importe qui (autorité officielle ou non), le Président ne fait l’objet d’aucun contrôle et n’est responsable ni devant l’Assemblée nationale, ni devant n’importe quelle autre instance sauf dans le cas hypothétique, indéfinissable et non aménagé de la haute trahison.
Une telle Constitution, comme nous pouvons le constater après près de trente ans d’exercice démocratique, a permis tous les abus : depuis la dérive autoritaire jusqu’aux dérives corruptrices, voire mafieuses…
Sambou Sissoko