L’activiste Mamady Dioula Dramé, co-fondateur du Mouvement d’Ensemble pour le Redressement (MER) a disparu le week-end dernier créant ainsi de fortes inquiétudes au sein de l’opinion. Au moment où la nouvelle de son retour était annoncée au grand soulagement de ses amis et connaissances, on apprenait aussi qu’un responsable du MER, Seidina Oumar Maïga a été « brièvement enlevé et bastonné ».
Dans la nuit du 24 au 25 novembre 2022 aux environs de 23h, Sidiki Kouyaté, l’un des porte-parole du Mouvement Yerewolo a essuyé des tirs de balle sur son véhicule à sa sortie d’une émission sur la radio Dambé. Le Directeur général de la Police a instruit l’ouverture d’une enquête afin d’arrêter le ou les agresseurs de Sidiki Kouyaté.
Le mercredi 28 octobre 2020, aux environs de 17 heures vers le monument « Bougie ba » à l’ACI 2000, le président de l’Association malienne de lutte contre la corruption et la délinquance financière, Moussa Ousmane Touré a été enlevé par des hommes armés et encagoulés à bord d’un véhicule de marque Toyota 4X4. Conduit à la périphérie de Bamako, il a été sérieusement bastonné. Son ordinateur, son téléphone portable et certains documents qu’il s’apprêtait à remettre à l’Office Central de Lutte Contre l’Enrichissement Illicite (OCLEI) ont disparu.
Un chroniqueur sur le groupe Whatsapp a été victime des mêmes pratiques.
Ces actions rappellent les tristes épisodes de 2012 lors de la transition politique dirigée par le Capitaine Amadou Haya Sanogo. En juillet 2012, Abdrahame Kéïta, alors directeur de la rédaction du journal « l’Aurore » et actuellement directeur de publication de « Le Témoin » et le doyen Saouti Labass Haïdara du quotidien « L’indépendant » ont été la cible des « forces obscures ».
Si elles s’accentuent pendant les périodes de grandes confusions politico-institutionnelles comme c’est le cas lors des transitions, ces pratiques ne sont pas uniquement l’apanage des régimes militaires. Sous le Président Alpha Oumar Konaré, le journaliste Cheick Oumar Konaré a été copieusement passé à tabac. L’animateur Hamidou Diarra alias « Dragon » de Radio Klédu a été enlevé sous ATT en plein jour. Il fut torturé par ses bourreaux qui l’ont laissé dans un état très piteux avec de nombreuses blessures. Sory Haïdara, alors rédacteur en chef du journal « Le Challenger » a été physiquement agressé par les éléments de cet escadron de la terreur.
Après la lutte du M5RFP qui a mis fin au régime de Feu IBK, l’on pensait que le Mali avait tourné le dos à de telles pratiques. Le retour des « forces obscures » dans le Mali-Kura est plus que surprenant et atteste à suffisance que les anciennes pratiques ont toujours court. Les « forces obscures » n’ont pas leur place dans le nouveau Mali au sein duquel le droit et la justice doivent primer sur l’arbitraire et la barbarie. Les actions de ces « forces obscures » font aussi mal que le silence de certains acteurs en première ligne dans la gestion des affaires publiques.
Dans son éditorial « Le prix de la compromission » paru dans «L’indépendant » n°00 du 3 juin 1993, le célèbre journaliste burkinabé, Feu Norbert Zongo écrivait qu’en Afrique, la compromission des peuples s’effectue à trois niveaux. « Le premier niveau est constitué d’intellectuels opportunistes qui se servent de leurs connaissances livresques pour aider les dictateurs à donner un contour idéologique et politique à leur tyrannie. Ces intellectuels sont les concepteurs des partis uniques et iniques. Ils applaudissent et encouragent la répression. Ils légitiment et défendent les barbaries les plus abjectes des tyrans aux yeux de l’étranger : les crimes crapuleux deviennent de petits incidents, la répression la plus féroce devient un simple maintien d’ordre. Ils organisent une véritable campagne internationale de presse pour maquiller et vernir la minable personnalité des bourreaux au pouvoir. C’est avec ces intellectuels que des cancres congénitaux ânonnent leurs premières théories économiques, juridiques et philosophiques ».
Propos à méditer !
Par Chiaka Doumbia
Le Challenger