Le ministre de la Réconciliation et de la cohésion nationale, Colonel-major Ismaël Wagué a adressé, le 24 février dernier, une correspondance au ministre algérien des Affaires étrangères, Chef de file de la Médiation internationale dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger. Des mouvements signataires sont accusés de «violations» répétées de l’accord ; la médiation internationale est indexée pour son « absence de réaction », chacun y prend pour son grade dans cette missive confidentielle qui s’est retrouvée sur les réseaux sociaux, le 1er mars. Soit quelques jours après la réception par le Président algérien, Abdelmadjid Tebboune des représentants des groupes armés le 26 février dernier à Alger où ils séjournaient dans le cadre d’une consultation avec la Médiation internationale.
Cette sortie du ministre en charge de la Réconciliation accentue les incertitudes et les inquiétudes quant à l’avenir de cet accord signé en 2015. Elle pourrait même créditer certaines voix non officielles qui ont annoncé, il y a quelques semaines, l’imminence d’une reprise des hostilités afin de récupérer la ville de Kidal.
Les incertitudes actuelles auront certainement des répercussions sur l’économie et les finances publiques. Déjà, les choses ne se passent pas comme l’aurait voulu le Trésor public sur le marché des titres. Or, pour les émissions des titres publics de l’année 2023, l’Etat du Mali table sur 1 409 milliards FCFA. Soit près de la moitié du budget d’Etat ! Si l’on s’en tient à la Loi des Finances publiée sur le site du ministère de l’Economie et des Finances, les recettes et les dépenses budgétaires pour 2023 sont respectivement arrêtées à 2. 199. 907. 720. 000 FCFA et 2. 895. 902. 628. 000 FCFA. Le déficit est de 695. 994. 908. 000 FCFA.
Sur les deux dernières sorties de la Direction nationale du Trésor et de la Comptabilité publique sur le marché des titres publics, dont celle du 22 février sanctionnée par une faible mobilisation des investisseurs, il faut avouer que la quasi-totalité des souscripteurs viennent du Mali.
En cette période de fortes turbulences internationales et de dégradation de la situation interne sur les plans politique et social, avec des grèves et des concertations sur fond de rejet du projet de Constitution, Bamako devrait tout mettre en œuvre pour ne pas se mettre à dos l’Algérie. Car, quoi qu’on dise, le pays d’Ahmed Ben Bella est un partenaire incontournable pour le Mali.
A l’état actuel, il est trop risqué voire imprudent d’ouvrir un front avec les groupes armés signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Cela pourrait créer une totale confusion qui profiterait aux groupes armés radicaux afin qu’ils renforcent à leur conquête territoriale avec un risque réel de guerre civile. Sur le terrain, la situation est déjà extrêmement confuse et complexe à la lecture des mouvements forcés des populations et des dernières attaques perpétrées par les groupes armés extrémistes.
Il ne faut pas se faire d’illusion : les groupes armés radicaux, qui s’affrontent de façon atroce, n’hésiteront pas à se mettre ensemble pour combattre le Mali, « l’ennemi commun». Il y a encore de la place pour le dialogue. Il faut écouter la voix de la sagesse. Que Dieu préserve le Mali ! Amen !
Par Chiaka Doumbia
Le Challenger