Enseignement supérieur : Il faut sauver l’Université de Ségou pendant qu’il est encore temps
Meguetan Infos
Violation de textes, frustrations, démissions en cascades, injustice, disfonctionnement, climat social tendu, manque de communication. L’atmosphère à l’Université de Ségou est plus que jamais polluée. Elle est devenue au bout quelques années le creuset de la mauvaise gouvernance, jamais égalée dans un institut d’enseignement supérieur au Mali. Et cela, par la volonté d’un seul homme qui agit comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. S’il ne torde pas le cou aux textes pour imposer sa volonté, il a pour cibles les enseignants-chercheurs et/ ou le personnel administratif. Jusqu’où iront ces agissements qui portent déjà atteinte à la qualité de l’enseignement dispensé dans cette jeune université ?
Depuis la nomination de Esaii Daou, en qualité de recteur de l’Université de Ségou (US) en 2022, tout marche sur sa tête. Non seulement, il a pollué le climat social de l’espace universitaire par ses agissements, mais il continue à semer les graines de la haine entre les travailleurs de l’US qui se regardent aujourd’hui en chiens de faïence. Il n’est pas exclu dans les jours qu’avec de telles rancunes et rancœurs que l’US se transforme en un champ de guerre. Que Dieu nous préserve !
Au secours !
Comme prévu dans le décret N°10-168/P-RM du 23 mars 2010 fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement de l’Université de Ségou, le recteur est normalement, le garant de la stabilité sociale et de la bonne marche des activités pédagogiques, de la recherche, de l’innovation, de la mobilisation, la planification budgétaire et l’anticipation des problèmes, malheureusement, celui de la première université régionale du Mali est le premier a violé les textes fondateurs, créant du coup un climat social qui ne permet plus l’exercice des missions de formation et de recherche assignées à l’Université de Ségou. Esaii Daou, de qui il s’agit, serait, selon nos informations, un homme d’un contact difficile qui manque d’approche et de management. Cela est attesté par le nombre de crises et conflits personnels avec les responsables de structures, de services, de chefs de Département d’études et de recherche (DER) et d’enseignants-chercheurs et son manque d’esprit d’anticipation dans la gestion courante des activités et le nombre de préavis de grèves déposés par les différents comités syndicaux de l’Université de Ségou. Selon nos sources, le déroulement des réunions de coordination des activités de l’Université de Ségou, d’ordinaire, marquées par la prise de décision concertée et partagée, notamment avec les chefs de structures de formation et de services, est devenu des rencontres de clash et d’insultes entre le recteur et ses collaborateurs directs. À cela, il faut ajouter de très nombreuses difficultés qui ont fini par atteindre le socle même de son mode de fonctionnement, marqué par une rupture totale de communication entre le recteur et certains chefs de structure de service, créant un climat social malsain, de démissions et des préavis de grève, empêchant la réflexion scientifique et la formation des étudiants.
S’agissant de la violation des textes, le recteur Daou, à la surprise générale, abroge la décision de nomination du Dr Amadou Traoré, élu chef de DER par ses collègues à la Faculté des sciences sociales (FASSO). Il le remplace par un enseignant-chercheur qui n’a jamais servi à l’Université de Ségou. Il a fallu l’implication personnelle du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Pr Bouréma Kansaye, pour qu’il soit remis dans ses droits. Comme si cela ne suffisait pas, il viole les textes en annulant les candidatures de Dr Amadou K. dit Amobo Waïgalo (IUFP) et de Dr Amadou Traoré (FASSO) en recevant les candidatures en lieu et place du directeur de l’Institut universitaire de formation professionnelle (IUFP) ou le doyen de la FASSO. Il s’illustre encore par la violation de l’exercice du droit de grève en procédant des retenues sur le salaire des responsables de structures et services, des administrateurs et non sur le salaire des grévistes. Ces retenues ont concerné pour certains jusqu’à 600 000 FCFA, a-t-on appris. Encore, il a fallu l’implication personnelle du ministre Kansaye pour que le syndicat (SECMA-US) lève le mot d’ordre d’arrêt de travail. Toute honte bue, il a promis de restituer les retenues sur le salaire. Malheureusement, l’irréparable a été commis.
Selon nos sources, Dr Abdoulaye Bengaly, dont le salaire avait été coupé en février 2023, est mort sans avoir reçu les 250 000 F CFA retenus sur son salaire. Il est mort d’amertume dans l’indifférence totale. D’autant plus que la semaine où il est décédé, le recteur lui aurait refusé son ordre de mission pour qu’il aille se soigner à Bamako.
Ces violations de textes, des cas d’injustice, des frustrations et le manque de communication ont conduit à des démissions en cascades à l’US (démission du Dr Daouda Traoré DGA de l’IUFP; démission du Dr Lassana Touré, chef de DER à la FAMA; démission de Dr Jean-Noël Keïta, directeur du CERAD; démission du vice-doyen de la FAGES, Dr Fodé Tounkara; démission du responsable du laboratoire de Biologie, Dr Abdoulaye Touré; démission de la directrice des Ressources humaines, Madame Keïta Mariame Diominé Traoré.
Sur le climat social tendu à l’US de Ségou, une de nos sources se prononce: «Nous voudrions attirer l’attention des autorités sur le fait que le climat social qui prévaut, les relations très tendues entre le recteur et ses premiers collaborateurs ne peuvent plus permettre à l’université de Ségou d’atteindre sa mission. La gestion chaotique marquée par le non-respect des textes, les décisions non concertées et de coup d’humeur du Recteur ne permettent plus le travail à l’université de Ségou. Si vous êtes considéré comme faisant partie de son «clan» vous serez épargné. Si vous êtes considéré comme n’étant pas de son «clan» alors vous serez châtié. Telle est la situation en cours à l’Université aujourd’hui où règnent l’arbitraire et l’injustice. Et les retenues de salaire doivent être analysées à l’aune de ce clanisme qui n’a pas sa place dans une université».
«Nous ne sommes plus dans un champ universitaire, mais dans un champ politique et le résultat est catastrophique pour l’Université de Ségou», dit-on à Ségou.
Au regard de ce climat social tendu, il faut sauver l’université de Ségou pendant qu’il est encore temps.
Brin COULIBALY
Inter De Bamako