Éditorial : Et si nous créons plutôt les conditions pour sortir de l’aide et de l’assistanat ?
Meguetan Infos
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Tout simplement, répondront sûrement en chœur les Maliens conscients que nous ne devons plus compter sur l’aide étrangère pour résoudre les principaux de nos populations, pas plus sur les prélèvements imposes à coups d’ordonnances. Les voies de la Souveraineté à consolider ne doivent plus passer par le FMI et la Banque Mondiale, pas plus par l’Union Européenne, l’Amérique et son AGOA ou par ces machins d’aide à n’en pas finir. Quand on veut être souverain et qu’on en a réellement les moyens, on doit rompre ses amarres avec toutes les institutions et organisations d’asservissement, ce qui ne signifie point vivre en autarcie, dans le sens négatif que certains donnent facilement à cette conduite salvatrice. L’affaire de deux ordonnances (N° 2025- 007-PT-RM du 07 février 2025 et N° 2025 008-PT-RM de la même date) a déjà fait couler beaucoup d’encre et de salive, sans que le gouvernement parvienne encore à faire admettre leur bien fondé et a même échoué à en expliquer la pertinence. Tout est parti du communiqué du conseil des ministres du mercredi, 05 février dernier, qui a rendu publiques les deux ordonnances, non-encore signées, en tant que projets de loi et, comme telle, devant donc être soumis au CNT, l’organe législatif de la Transition. Face à la forte désapprobation qui a accueilli les deux projets, le gouvernement a vite tenu un point de presse animé par le Premier ministre lui-même appuyé par le ministre de l’Economie et des Finances, M. Alousséni Sanou, et celui de l’Economie numérique et de la Modernisation de l’Administration, Alhamdou Ag Ilyène. La communication sera un flop magistral, les deux intervenants, le chef du gouvernement et l’argentier, ont juste confirmé ce que les Maliens avaient compris et décrié, à savoir les prélèvements que l’on sait à titre de contribution et de solidarité nationales. Les relations faites par les participants au point de presse ont malheureusement contribué à divaguer sur le sujet, et naturellement à énerver. Malheureusement encore, le Premier ministre, qui avait affirmé avec une pointe d’énervement remarquée chez lui que les fameuses ordonnances n’étaient pas effectives pour l’heure, se fera démentir par la publication des deux documents qui portaient tous deux la date du 07 février 2025 (deux jours après le conseil des ministres et trois jours avant le point de presse à la presse à la Primature). Il y a problème avec la vérité et avec la manière. Il y a une cacherie derrière le manguier. L’opinion publique s’enflamme davantage, d’autant que ceux qui utilisent l’œil d’Argus ont regardé dans les textes. On relèvera qu’il existe bien une loi d’habilitation (2024-038) par laquelle le CNT a autorisé le gouvernement à prendre certaines ordonnances; mais que, parmi les ordonnances-ci, ne figure pas la créations de taxes et contributions.
D’où l’orientation des débats vers des considérations spécieuses, qui mettent à nue la gouvernance transitoire. Quelles explications à avancer et quels soupçons à ne pas soulever. Situation cornélienne, mais le management de la vie de la nation exige que la vérité soit dite aux citoyens… Tout porte à croire qu’il y a quelque chose de pourri au Royaume de Danemark. Les textes (007 et 008 du 07 février 2025) parce que signés déjà par le Président de la Transition, le Premier ministre, le ministre de l’Economie et des Finances et le ministre de l’Economie numérique et de la Modernisation de l’administration sont désormais des ordonnances prises, sans donc passer par le CNT pour une raison que seules les rumeurs tentent d’expliquer. A ce propos, si des “révélations” récentes de l’activiste basé aux USA, Sékou Tounkara, se vérifient, c’est une indication que la gestion au sommet connaît déjà un manque de transparence et de confiance entre les acteurs haut perchés. Des juristes ajoutent que nous sommes dans un imbroglio juridique entre deux dispositions conflictuelles dans la nouvelle constitution sur l’imprescriptibilité du coup d’État militaire dans son rapport avec le bénéfice d’une amnistie conjuguée avec les conséquences futures de la possibilité de nullité des actes administratifs et législatifs posés par les acteurs de la transition; nous risquerons alors de nous retrouver dans une crise inédite, si la correction par amendement constitutionnel n’est pas envisagée pour sortir le CNT de son imbroglio juridique parce qu’il désormais important de revoir la rémunération de ses membres (non élus) qui ne peut pas être alignée sur celle des députés élus. Sinon, cela ressemblerait à leur reconnaître indirectement un statut juridique et une légalité qu’ils n’ont pas. Une autre possibilité aurait été que leur nombre, la nature et les conditions de leur travail, notamment leur rémunération, soient déterminées par une recommandation du peuple (dialogue) et inscrites dans la Charte qui devait également être intégrée dans la nouvelle constitution par souci de cohérence constitutionnelle afin d’éviter la superposition et la séparation des documents constitutionnels, en considérant que la Charte représente une valeur constitutionnelle dans le contexte actuel du fonctionnement de nos institutions. En guise de remarque, il me semble qu’il y a une autre apparence de conflit entre la Construction et la Charte qui semble bénéficier de la primauté sur la constitution qui bénéficie de la légitimité populaire ainsi que la légalité qui découlent d’une consultation du peuple. Il aurait été beaucoup plus pratique d’intégrer la Charte dans la constitution et lui reconnaître la valeur supra législative et interprétative dans la hiérarchie des normes de la même façon qu’un juriste avait suggéré en son temps pour ce qui est de la Charte du Kurukan Fuga. Il semble que les deux ordonnances, en se passant de la loi d’habilitation(2024-038) pour être prises révèlent en fait la véritable pomme de discorde entre le PT et le Président du CNT au motif que le premier n’a pas daigné promulguer l’arrêt sur les primes que perçoivent malgré tout les members de son institution. Toute la situation, de confusion certaine maintenant et dont on ne peut présager à présent les évolutions futures, relève d’un manque de rigueur et de sérieux dans la gestion du pays. Or, au regard des hostilités permanentes dont notre pays est la cible, nous avons plutôt intérêt à créer les conditions à nous prémunir de l’assistanat que de prendre des mesures impopulaires grosses de tensions sociales.
Amadou N’Fa Diallo
Le National