Edito : Un beau discours du PMPI, mais pour quelles retombées positives ?
Meguetan Infos
Le Premier ministre par intérim, le Colonel Abdoulaye Maiga a eu droit à un accueil triomphal le mardi 27 septembre 2022 à son retour de la 77ième Assemblée Générale des Nations Unies. Pour avoir tenu un discours à la tribune des Nations Unies, le Premier ministre par intérim du Mali est devenu « la star de la semaine ». Pour les partisans de la transition et tous les adeptes du panafricanisme, il a fait honneur à la patrie et la voix du Mali résonne désormais un peu partout à travers le monde. Rien qu’à en juger par la chaleur de l’accueil, il semble dire plus haut ce que des nombreux maliens murmurent plus bas, à savoir que le Mali serait victime d’un complot international ourdi par la France en complicité avec ses alliés occidentaux et leurs collabos africains.
Rarement un accueil a été aussi massif que celui réservé au PMPI. La population de Bamako est sortie de l’aéroport jusqu’au boulevard de l’indépendance pour célébrer « l’un des dignes fils du pays ». En analysant lucidement et sans passion le discours dit historique du PMPI, deux questions mériteraient d’être posées, la première est celle de savoir si la foule qui est sortie massivement pour accueillir le Colonel Abdoulaye Maiga a pris réellement connaissance du contenu du long discours et surtout de sa portée sur un pays en crise multidimensionnelle comme le Mali. La deuxième question est relative aux retombées véritables d’un discours qui n’a été qu’une longue diatribe vexatoire contre certains de nos voisins, contre la France et contre le secrétaire général des Nations Unies. Pour tout bon analyste ce discours causera plus d’inconvénients que d’avantages dans la résolution de la gravissime crise que traverse le Mali.
En effet, les propos tenus par le Colonel Abdoulaye Maiga, hors mis ceux relatifs à la montée en puissance de l’armée, qui aux dires des acteurs sur le terrain, semble neutraliser des djihadistes et libérer des zones. Le Premier ministre par Intérim a affirmé sans ambages que la peur a changé de camp et que les forces du mal sont en débandade totale. Autre déclaration positive dans son discours est le nouvel engagement pris pour la tenue des élections libres transparentes et crédibles au terme de la transition. Il a promis devant l’Assemblée Générale que le pouvoir serait remis à un Président démocratiquement élu le 26 Mars 2024. Et après patatras ! Le Colonel Maiga a passé le plus clair de son temps à tirer à boulets rouges sur ceux que les autorités maliennes considèrent comme des ennemis jurés du Mali. Des diatribes vexatoires contre le secrétaire général des Nations Unies, après c’est le tour des autorités françaises, ensuite le Président de la Côte d’Ivoire et celui du Niger, et enfin le Président en exercice de la CEDEAO le Bissau Guinéen Sissoco. Bref dans un langage totalement dépourvu de diplomatie et non empreint de courtoisie, le Premier ministre par intérim a fait feu de tout bois en dénonçant ce qu’il a appelé une ingérence coupable dans les affaires intérieures du Mali.
Le discours est beau pour ceux qui n’aspirent qu’à une souveraineté, qui loin de s’acquérir par le discours, devrait être le fruit du travail. La meilleure manière de s’affranchir de la tutelle des autres est de travailler. Il est beau pour ceux qui, naïvement ou par ignorance, pensent que le Mali peut vivre en autarcie dans un monde globalisé et interdépendant. Il est enfin beau pour ceux qui pensent que la dignité et l’honneur du Mali ont été défendus, oubliant que ces deux valeurs ne peuvent s’acquérir que par le travail et non des invectives.
Par ce discours du PMI, le Mali s’isole non seulement, mais aussi et surtout commence à sentir les effets négatifs de cette autarcie. Par réciprocité le Niger prive le Mali de l’accès aux produits pétroliers, à travers son territoire. Bien que le Ministre des finances de ce pays frère, a affirmé qu’il n y a aucun lien entre cette décision qui serait antérieure à la polémique qui oppose le Mali au Niger, mais qu’elle est la résultante d’un constat. Pour ceux qui savent analyser il y a mis un peu de diplomatie, sinon c’est bien une réponse aux attaques verbales du PMPI. Que dire du délestage électrique en pleine saison de pluie après que la Côte d’Ivoire ait décidé d’arrêter la fourniture du courant ? Là également le porte-parole du gouvernement ivoirien, en fin diplomate a balayé d’un revers de la main l’allégation qui consiste à dire que c’est la réponse du berger à la bergère. Il aurait expliqué le délestage par une panne technique. En tout état de cause le Mali doit s’attendre à d’autres actions de la part de ses voisins.
Youssouf Sissoko
L’Alternance