D’une menace sanitaire à une remise en question de la gouvernance de l’OMS ?
Le Coronavirus menace notre existence. Etymologiquement, le Coronavirus tire son nom du fait de petites proéminences (observables au microscope) autour de son enveloppe pour lui donner un aspect de couronne, corona en latin.
Le terme “Covid-19″ est un diminutif : “CO” pour corona, “VI” pour virus, et “D” pour “disease”, maladie en anglais. Le chiffre 19 désigne l’année de son apparition, 2019 en Chine.
Aujourd’hui, l’origine de la maladie du Covid-19 n’est pas encore déterminée de façon officielle. Mais, quelques hypothèses scientifiques admettent que le virus serait transmis aux humains par un pangolin, petit mammifère prisé pour ses écailles et sa viande en Chine.
Pour la première fois, la maladie du Coronavirus apparait à Wuhan en Chine en décembre 2019 à cause d’une probable consommation de viande de pangolin. Les mesures de confinement, de gestes barrières, de port de masques, etc., n’ont pas limité la propagation du virus au-delà des frontières chinoises. Très vite, d’une épidémie à Wuhan, on est passé à une pandémie embrasant la Planète entière. Mais au-delà de la maladie et des morts qui en découlent, les sociétés sont marquées au fer rouge : angoisses quotidiennes (peur d’être malade et d’en mourir), insatisfaction des besoins vitaux (la faim, la soif), réactions de violence (peur de l’autre possible “contaminant”). A cela s’ajoutent des risques de crises sociale et alimentaire – insécurité, grande pauvreté – particulièrement dans les zones déjà fragilisées : Moyen Orient, Asie, Afrique…
Même si les “grands de ce Monde” n’échappent pas à cette détresse, comme on peut le voir dans certains pays européens ou aux Etats Unis d’Amérique.
En réalité, le Covid-19 remet à jour la fragilité des systèmes de santé des Etats-Nations, et soulève les difficultés de l’OMS, Organisation Mondiale de la Santé, à gérer les crises sanitaires émergentes. Par exemple, les Etats-Unis d’Amérique reprochent à l’OMS (fondée en 1948) de ne pas donner une orientation claire aux Etats membres sur les dispositions appropriées à prendre au sujet de la fermeture d’écoles ou des frontières.
Au même moment où l’OMS appelle les Etats membres à ne pas les fermer leurs frontières, des pays comme l’Italie, l’Autriche, l’Allemagne, tous Etats membres, ferment leurs frontières. L’OMS ne dit rien à l’Italie, l’Autriche et l’Allemagne alors qu’ils violent le règlement sanitaire international dont ils sont signataires.
D’autres critiques envers l’OMS pointent ses rapports complaisants avec le régime de Pékin dont l’institution onusienne salue ses efforts pour gérer la crise du Covid-19 sans jamais dénoncer son manque de transparence des chiffres donnés par Pékin sur le nombre de morts suite au Covid-19. Ce qui aurait généré un retard dans la prise en charge sanitaire, et le peu d’anticipation d’autres Etats membres de l’OMS pour mieux gérer la pandémie. Ils le paient cher aujourd’hui par le nombre de morts.
Ces différentes critiques envers l’OMS soulèvent l’inévitable question quant à sa neutralité : les experts de l’OMS n’alimentent-ils pas une certaine vision socio-politique de la crise ? La réponse à cette question implique une enquête sociologique, et nécessite du temps pour conduire l’enquête. Ce travail sera fait après le Coronavirus. Néanmoins, ces critiques appellent aussi à creuser la question des conflits d’intérêts avec les différents Etats membres, au nombre de 194.
Toutes ces questions méritent d’être traitées pour la réelle indépendance de l’OMS, mais aussi pour redorer son blason. Un autre défi majeur à relever pour l’OMS : la confiance de ses Etats membres se dégrade. De ce point de vue, l’organisation onusienne n’a pas intérêt à reproduire les erreurs du passé. Par exemple, lors de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest (2014-2015), l’OMS a attendu cinq mois avant de déclarer l’épidémie d’Ebola comme une urgence sanitaire de portée internationale. Son existence n’est peut-être pas menacée (reconnue pour ses campagnes de vaccinations contre la rougeole ou la lutte contre le Sida), mais son rôle de leader pour l’amélioration de l’état de santé de l’humanité est loin d’être atteint.
Mohamed AMARA
Sociologue-Essayiste
Université des Lettres et des Sciences Humaines de Bamako
Centre Max Weber-Lyon
Email : diffusionlivre@gmail.com
Auteur de plusieurs ouvrages dont : Marchands d’Angoisse, le Mali tel qu’il est, tel qu’il pourrait être, Ed Grandvaux, 2019
Source: Mali Tribune