Des officiers supérieurs sahéliens de retour au Collège
Bienvenue à la « première Ecole de guerre transnationale » d’Afrique (et peut-être du monde). C’est là, aux portes de la capitale mauritanienne que l’on tente de combler le déficit en officiers brevetés que rencontrent les pays du G5 Sahel (la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad) et d’améliorer l’interopérabilité de leurs forces armées.
En février, ce G5 Sahel a fêté ses 5 ans. Si, en 2014, l’accent était mis sur le développement, le pilier sécurité a vite pris le dessus. La faute à l’insécurité dans la sous-région et à la présence de groupes armés terroristes (GAT). Les chiffres témoignent de cette dégradation sécuritaire: 2 832 personnes ont été tuées dans les cinq pays du G5 Sahel en 2018, soit une hausse de 74% par rapport à 2017! D’où la création de la Force conjointe du G5 Sahel. Ses cinq bataillons de lutte antiterroriste sont déployés dans les zones où sévissent les GAT.
« Le défi est d’harmoniser leur équipement et leurs méthodes, de les faire manoeuvrer ensemble, avec des chefs qui se connaissent et qui partagent une doctrine commune. Et pour ça, la création d’un collège de défense a été décidée », explique un expert français qui a suivi de près cette mutualisation inédite.
L’impulsion est venue de la Mauritanie.
« La Mauritanie projetait de créer une école de Guerre et une école d’état-major. Grâce à un soutien financier de 9 millions d’euros des Émirats Arabes Unis, la construction des infrastructures a commencé dès 2014, aux abords de Nouakchott », explique le général mauritanien Brahim Vall Cheibani Cheick Ahmed, le commandant du Collège. « Finalement, le site a été en partie mis à disposition du G5 Sahel pour y former des officiers des cinq pays, renforcer l’interopérabilité de chefs amenés à lutter contre un ennemi commun ».
« Beaucoup d’Etats africains développent leur propre modèle de formation militaire. Ici, la démarche est originale puisque le G5 a choisi la formation commune de ses officiers », ajoute Camille Roux, la présidente de Themiis, une société française qui accompagne les Etats dans la mise en place de centres de formation d’excellence (voir mon post de 2016 sur le CHESD de RDC).
La première promotion de 36 officiers supérieurs est arrivée à Nouakchott en septembre 2018. « Gros défi », résume le général. « Défi relevé », répond en souriant le colonel Michel, un officier français détaché par la direction de la Coopération de sécurité et de défense. Premier directeur des études, il a plongé ses stagiaires dans « 7 semaines de remise à niveau, avant 13 semaines de formation opérationnelle et stratégique, et 4 exercices « sahéliens » avec des paramètres locaux ».
Dans l’amphi, l’osmose entre stagiaires fonctionne mais « il faudra plusieurs promotions avant que l’effet se fasse sentir sur le terrain », reconnaît Brahim Vall Cheibani Cheick Ahmed. Et Camille Roux d’ajouter: « L’initiative ne pourra être pérenne que lorsque les financements seront stabilisés ».
Source: lignesdedefense