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Culture : Bama-Art, producteur de revenus

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La grande majorité de mes publications promeut la culture comme principal outil de construction et d’entretien du lien social. Je demeure convaincu, en tant qu’acteur de la culture, que les pratiques artistiques et culturelles sont de puissants leviers d’émancipation personnelle et de cohésion sociale. Surtout dans un pays en construction et qui ne lit pas, comme le Mali.

J’ai toujours milité contre la politique actuelle de la Biennale artistique et culturelle. Et j’ai proposé comme alternative à cette politique une réorganisation systémique du secteur avec au cœur un réseau de diffusion régulière des arts et de la culture sur l’essentiel du territoire malien. Ce qui permettra :

une quotidienne artistique et culturelle
un accès organisé et régulier à la culture pour une grande partie des citoyens maliens
la mise en place d’une régulière médiation sociale et culturelle
un marché intérieur de la culture
aux artistes et aux acteurs de la culture de vivre décemment de leur travail et de bénéficier d’un statut concret
de créer et d’entretenir un univers symbolique moderne commun au Mali

Mon engagement militant s’est tellement focalisé sur cet aspect de constructeur citoyen de la culture que j’aborde très peu ses volets “beaux-arts” et “producteur de revenus”.

Ce dernier volet “producteurs de revenus” est très cher à Monsieur Mamou Daffé, notre actuel ministre chargé de la Culture qui, à mon avis, en fera un axe majeur de sa politique de promotion d’industrie culturelle.

Dans ce volet, aujourd’hui au Mali, Bama’Art d’Abou Guittèye, est le principal producteur de revenus du secteur de la culture au Mali. Il y a quelques mois, à Kayes, Abou Guittèye a lancé à Kayes la nouvelle dynamique du Bama’Art, dénommé Bama’Art Tour, qui couvrira désormais les régions.

Bama’Art Tour à Kayes a mis en action plus de 10 000 personnes soit près de 10 % de la population de la ville de Kayes.

34 personnes ont été déplacées de Bamako pour l’organisation technique, dont 3 éclairagistes, 8 opérateurs son, 3 opérateurs vidéo, 1 ingénieur son, 1 menuisier métallique, 1 décorateur, 3 électriciens, 5 assistants techniques de scène, 6 chauffeurs et 4 managers. 11 artistes venus de Bamako et 1 de Tombouctou y ont été programmés accompagnés par 54 musiciens. Plus de 150 artistes en herbe de Kayes ont participé à des opérations de détection de talents.

Cet événement a créé plus de 450 000 revenus d’une moyenne de 650 F CFA. Soit plus de 292 millions de F CFA dont une moyenne de 11 % sous forme de taxes pour le Trésor public.

Qu’est-ce que je définis comme revenus dans cette publication ?

C’est toute activité qui va produire une dépense, donc une rémunération pour un fournisseur de service. Il faut plus de 100 pages pour présenter tout le processus de générations de ces revenus. Je vais donc simplement présenter quelques exemples ici. En espérant que notre Faculté chargée de l’économie va s’en emparer et le donner régulièrement comme thématique de recherche à ses étudiants.

A Kayes, plus de 10 000 personnes ont été mises en action par Bama’Art. Chacune d’elle s’est déplacée soit à moto, soit en katakatani, soit en voiture personnelle, soit en taxi. On va dire que chacune d’elle a consommé en moyenne 1,5 litre de carburant, soit 14 500 litres multiplié par 800 F CFA. Soit onze millions six cent mille F CFA dont 18 % de TVA pour le Trésor public. Un parking moto a permis à une trentaine de personnes de monter un business provisoire pour plus de 2 000 motos parquées 2 fois. Soit 4 000 services multipliés par 300 F CFA. Soit 1 200 000 F CFA de chiffres d’affaires.

Environ, les 10 000 personnes mises en action par Bama’Art Tour auront consommé une moyenne de 250 Mo de data pour communiquer, archiver et partager les bons moments passés. On aura eu une consommation moyenne de 10 000 data de 250 Mo à 250 F CFA. Soit 2 500 000 F CFA, dont 18 % pour le Trésor public. Une centaine de commerçants ambulants auront fait pendant les 3 jours un chiffre d’affaires moyen de 8000 F CFA par jour pendant 2 jours. Soit 16 000 F CFA multiplié par 100 pour un total de 1 600 000 F CFA.

Plus d’une centaine de personnes sont venues de Bamako et autres villes et ont fait un séjour moyen de 4 jours. Si je vous présente une évaluation moyenne de leur consommation en transport (avion et voitures), restauration, hébergement, déplacement local, achats dans le marché, etc… vous serez étonnés du nombre de revenus créés.

Jusqu’à cette dernière année, Africa Scène nous proposait ces productions de revenus chaque mois avec les Bama’Art mensuels de Bamako. Des premiers résultats de nos observations, les événements à Bamako produisent 2 fois plus de revenus que celui de Kayes. Et un aussi un plus grand revenu moyen, soit une moyenne de 950 F CFA.

Aujourd’hui Bama’Art a changé de périodicité à Bamako, désormais trimestriel, et étendu son territoire sur les régions et les capitales de la sous-région. Ce serait un outil extraordinaire de construction de lien social et de production de revenus.

C’est dans ce cadre que Bama’Art mérite une reconnaissance d’événement d’utilité publique et apparaitre ainsi dans le budget national de 2026. Aujourd’hui, nous avons la possibilité d’y arriver avec la nouvelle gouvernance au ministère de la Culture.

Le début d’une articulation des politiques publiques avec les acteurs concrets de la culture ?

Amen !

Alioune Ifra Ndiaye

Mali Tribune

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