Crise sécuritaire au Sahel : La bataille des puissances internationales pour les ressources en tous genres
Plusieurs journalistes ouest-africains sont actuellement en conclave à Niamey au Niger sur la question du journalisme d’investigation dans la zone. Les débats sont dominés par la situation sécuritaire dans le Sahel et les difficultés liées à la couverture d’attaques terroristes. La rencontre de Niamey bénéficie de la contribution du colonel-major Ali Mahamadou et du professeur Issoufou Yahya. Plusieurs autres partenaires comme la Fondation Hirondelle et l’URTEL ont pris part à cette réunion annuelle doublée de la réunion des acteurs médias.
Les acteurs médias et développement au Burkina Faso, Mali et Niger étaient en réunion de démarrage de réseau régional Sahel à Niamey. Le président de l’Union des radios libres et télévisions (URTEL) a pris part aux travaux. Bandiougou Danté a participé à la table ronde internationale des partenaires de l’IMS. Cette partie était réservée aux partenaires clés.
Quant à la seconde partie ouverte à tous les participants, elle s’est focalisée sur la situation sécuritaire au Sahel qui dépasse tout commentaire. C’est pour cela que l’IMS et ses partenaires ont consacré un panel aux enjeux socio-économique et sécuritaire au Sahel. Et ce sont l’historien et professeur Issoufou Yahya et le colonel-major Ali Mahamadou qui ont entretenu l’assistance sur ce thème. Les premiers jours de la rencontre des journalistes d’investigation ont été marqués par des témoignages sur la crise sécurité.
«Nous avons la situation en Libye où le sud libyen est occupé par les jihadistes et les trafiquants de tous genres. Vous avez la situation au Nigéria où la secte Boko Haram occupe toutes les villes frontalières du Niger et du Nigéria et vous avez la situation malienne jusqu’à celle de la frontière du Burkina Faso où les groupes jihadistes sont en train de se réorganiser. Ils mènent des attaques contre les postes frontaliers isolés, causant la mort des soldats et des innocents dans les écoles et autres bâtiments publics», témoigne Moussa Ag Aksar, un journaliste nigérien.
Comment mieux couvrir les attaques terroristes ? La question a été traitée par Ibrahim Moussa du Niger. «Généralement, pour les experts, ce qui est conseillé c’est essayer de voir comment est-ce qu’il faut approcher une situation d’attaque terroriste, quand elle se présente. Parce que généralement, quand la situation se présente, les journalistes, sans le savoir, de façon inconsciente donc, ont pendant longtemps joué le jeu des terroristes. Dès qu’une attaque se passe, les médias relaient les informations, qui, au lieu de desservir les terroristes, les gens, sans le savoir, ont joué le jeu», poursuit-il.
De fait, les enjeux géostratégiques du Sahel font que plusieurs acteurs y interviennent : les pays africains mais aussi les puissances internationales. «Aujourd’hui c’est une course mondiale pour l’énergie, les meilleures sources d’énergie sont au Sahel. Aujourd’hui, les ressources minérales, on les a à moindre frais. Les investissements font que tout le monde crée un mouvement pour venir au Sahel, parce que c’est un eldorado du point de vue stratégique, en ce qui concerne les matières premières où tout est à moindre frais, avec des dirigeants peu responsables et peu regardants, si bien que chacun trouve son compte. Malheureusement, sauf le Sahélien», analyse le professeur Issoufou Yahya du Niger.
Dans cette situation, la collecte de l’information est difficile pour certains médias comme les radios communautaires, selon Bandiougou Danté, président de l’URTEL. «Il y a des défis parce que du côté même des acteurs de la sécurité, il y a une interprétation, il y a souvent un sentiment de mea-culpa, si je peux m’exprimer ainsi. Et même un sentiment de faiblesse et d’abandon dans un tel contexte, quand vous avez des acteurs politiques, des acteurs militaires qui, parfois, pour trouver des explications à des choses, sont dans l’accusation. Ça montre que nous avons une responsabilité partagée», ajoute-t-il.
La question de l’équilibre de l’information a aussi été évoquée par Ibrahim Moussa du Niger, qui a surtout insisté sur le droit à l’information. «Même s’il faut faire l’équilibre de l’information, il faut essayer de prendre dans l’extrait de ce que les terroristes ou jihadistes disent, quelque chose qui arrange la communauté. Mais pas des informations ou des déclarations qui peuvent créer la psychose chez nos populations. Les confrères ont parlé de leur sécurité sur le terrain parce que l’ennemi n’a pas de visage. Tout cela peut avoir une solution avec les autorités en place en suivant leurs conseils», estime-t-il.
Selon le colonel-major Ali Mahamadou du Niger, ces deux dernières années, il y a eu 133 morts lors de 80 attaques au Burkina Faso, des milliers de morts au Mali à la même période. Tandis que le Niger enregistrait 40 attaques de Boko Haram entre 2015 et 2018.
«Ce qui rend la lutte contre le terrorisme difficile au Sahel, c’est le manque de partage d’informations entre les services de renseignements des différents pays. Le manque de confiance et de communication. Or, cela peut aggraver la situation», explique-t-il.
Aujourd’hui force est de constater que le Sahel est le lieu de bataille des puissances internationales à cause des ressources en tous genres.
Kassim TRAORE