Le Ministre Malien des Affaires Etrangères, Abdoulaye Diop, a rencontré son homologue russe, Sergueï Lavrov, à Moscou, le 11 novembre 2021. Les deux Ministres ont eu une séance de travail élargie aux deux Délégations et ont animé une conférence de presse. Au cours de l’entretien, le Ministre Diop a remis un message personnel du Colonel Assimi GOÏTA, Président de la Transition, Chef de l’Etat, destiné au Président de la Fédération de Russie, Son Excellence Vladimir POUTINE. Cette visite du Ministre Diop à Moscou marque un tournant décisif dans la coopération entre les deux pays. Alors, bien bienvenue à la Russie.
Au cours de cette visite, la défense et la sécurité, la lutte contre le terrorisme, l’énergie, l’exploitation des ressources minières, l’agriculture ont été les principales questions abordées par les personnalités.
En outre, le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, Abdoulaye Diop, et son homologue russe, Sergueï Lavrov, ont co-animé une conférence de presse au cours de laquelle ils ont évoqué les grands axes de la coopération entre les deux pays.
Face aux Hommes des médias, le Ministre russe des Affaires Etrangères a indiqué avoir eu des discussions constructives avec son homologue malien sur les questions de la coopération bilatérale et qui s’appuient sur des relations historiques entre leurs deux Etats. « Nous avons convenu de renforcer le dialogue politique avec le Mali. Les discussions se sont déroulées de façon tout à fait positive, avec une grande attention sur la coopération économique et commerciale », a-t-il expliqué.
Le Chef de la Diplomatie russe a réaffirmé le soutien de son pays au Mali, en pleine transition vers des élections démocratiques. « Nous avons convenu de renforcer le dialogue politique qui se déroule de façon tout à fait positive. Monsieur le Ministre m’a décrit la situation interne au Mali, il m’a parlé de l’Accord conclu avec les Autorités algériennes et de la situation sur le terrain telle qu’elle est, avec l’activité des Groupes terroristes dans le Nord du pays ; ce qui ne permet pas de mettre en place les conditions normales d’une campagne électorale et les dates de ces élections devraient être définies, avant la fin de cette année », a-t-il déclaré. Et d’ajouter : « nous comprenons bien la nécessité de renforcer le potentiel de lutte antiterroriste et nous fournissons au Gouvernement du Mali un certain nombre de munitions et nous allons tout faire pour éviter que la menace terroriste ne pèse sur la structure de l’Etat ».
Ces déclarations interviennent alors que l’actuel Gouvernement de transition au Mali subit une forte pression de la communauté internationale pour l’organisation des élections en février 2022, conformément aux engagements pris. Estimant que toutes les conditions nécessaires ne sont pas encore réunies pour respecter ces échéances, Bamako avait annoncé à ses partenaires son intention de repousser le calendrier de ces élections. Une décision qui lui avait valu des sanctions de la part de la CEDEAO qui a appelé la Communauté internationale à faire de même jusqu’au retour de l’ordre constitutionnel dans le pays.
« Nous avons souhaité à ce que les Maliens puissent, dans le cadre d’un dialogue, convenir d’une feuille de route pour pouvoir terminer cette transition par des élections transparentes et crédibles et nous espérons que nos partenaires de la CEDEAO, de l’UA et des Nations Unies puissent faire preuve de plus de compréhension. Parce qu’aujourd’hui les sanctions imposées à notre pays, lors du dernier Sommet de la CEDEAO, ne sont pas des sanctions qui aident à avancer », a commenté le Ministre Abdoulaye Diop. Et d’ajouter : « ces sanctions ne peuvent que fragiliser une situation qui est déjà complexe ».
Renforcement des relations russo-maliennes sur fond de détérioration des relations franco-maliennes
Développant ses propos, Sergueï Lavrov a commenté l’évolution récente des relations entre la France et le Mali. Il a notamment déploré le retrait de l’Armée française des « zones où les terroristes ont de plus en plus les mains libres », compliquant, selon lui, la situation sécuritaire du pays.
Ainsi, indiqua-t-il, la Russie « poursuivra son soutien aux forces armées maliennes en leur fournissant des équipements et en formant les Officiers Supérieurs par notre Ministère de la Défense ». Ce, tout en continuant à nier l’implication du Gouvernement russe dans d’éventuelles négociations entre les Autorités maliennes et des « compagnies privées de sécurité ».
De son côté, le Ministre Diop, soulignant la gratitude du Mali pour les actions sécuritaires menées par la France jusque-là, a tenu à réaffirmer la souveraineté de son pays dans le choix de ses partenaires. « La relation entre la Russie et le Mali est une relation d’Etat à Etat. Et le Mali ne permettra à aucun autre Etat ou à aucune Institution de lui dire avec qui il peut traiter », a-t-il indiqué. Une déclaration qui réveille des inquiétudes chez plusieurs Dirigeants européens concernant le rapprochement russo-malien.
Le Ministre Diop a souligné que sa présence dans la capitale russe consiste également à donner une « impulsion à la coopération de défense et de sécurité », expliquant que le « Mali, en tant qu’État souverain, est en train aujourd’hui de se battre pour sa survie. Parce qu’il y a des plans de partition du Mali qui existaient depuis longtemps et nous souhaiterons que le Mali soit mis à l’abri. Qu’on aide les Maliens dans le cadre de l’Accord pour la paix et la réconciliation ».
Pour le Ministre Diop, son pays attend beaucoup de la Russie qui est un partenaire pragmatique, un partenaire réaliste qui a su faire la preuve de son efficacité dans le cadre de lutte contre le terrorisme dans d’autres théâtres d’opération.
« Aujourd’hui, nous souhaitons pouvoir compter sur les appuis que nous avons demandés sur le plan des équipements militaires, sur le plan de la formation et de tous les moyens qui permettent à nos forces de défense et de sécurité d’être les premiers responsables de la sécurité du Mali. C’est extrêmement important et cela doit être compris par tous que le Mali n’est pas en train de sous-traiter sa sécurité ». Le Chef de la diplomatie malienne a dit que le Mali n’a signé aucun contrat avec la société paramilitaire Wagner, précisant que la relation entre le Mali et la Russie est une « relation d’État à État ».
Le Mali veut avoir les capacités nécessaires pour pouvoir assurer sa sécurité. Dans ce cadre, il est absolument normal pour le Mali de diversifier ses partenaires. Notre pays apprécie déjà les premières livraisons d’équipements de la Russie du mois dernier et espère que les autres en chantier puissent se matérialiser », a-t-il ajouté.
D’ailleurs, Moscou souhaite étendre sa coopération avec Bamako au-delà du secteur sécuritaire, tout en la plaçant sous le signe du renforcement global des investissements en Afrique, conformément aux Résolutions prises lors du Sommet Afrique-Russie de Sotchi en 2019. D’après les deux Ministres, de nouveaux investissements russes sont attendus au Mali dans les secteurs de l’énergie, de la technologie agricole, de l’exploration des sols, des télécommunications. Un renforcement de la coopération qui devrait être marqué par une prochaine visite du Ministre Sergueï Lavrov au Mali, à une date qui n’a, cependant, pas été précisée.
Mémé Sanogo
L’Aube