Climat social mis à rude épreuve : Les syndicats de l’éducation et les travailleurs de la santé vent debout contre le pouvoir
Au Mali, deux syndicats sont vent debout contre le pouvoir. Les enseignements grévistes poursuivent leur mouvement de grève. Les syndicats de l’Education signataires du 15 octobre 2016 continuent d’exiger l’application immédiate de l’article 39 de la loi n° 2018-007 du 16 janvier 2018, portant statut du personnel de l’enseignement secondaire, de l’enseignement fondamental et de l’éducation préscolaire et spéciale. Le syndicat national de la santé et de l’action sociale et de la promotion de la famille menace aussi d’observer une grève de trois jours à partir du lundi prochain.
C’est toujours le statuquo dans les négociations entre le gouvernement et les enseignants grévistes. Ces derniers, après plusieurs grèves, ont déposé un nouveau préavis de grève de vingt jours, soit 480 heures (du lundi 17 au vendredi 21 février 2020, du lundi 24 au vendredi 28 février 2020, du lundi 2 au vendredi 6 mars et du lundi 9 au vendredi 13 mars 2020 inclus.) Les syndicats de l’Education signataires du 15 octobre 2016 (le SYPESCO, le SYNEB, SYNEFCT, SYNESEC, SYLDEF, FENAREC, COSES et le SNEC) continuent d’exiger l’application immédiate de l’article 39 de la loi n° 2018-007 du 16 janvier 2018, portant statut du personnel de l’enseignement secondaire, de l’enseignement fondamental et de l’éducation préscolaire et spéciale. Pour se faire entendre, les enseignants grévistes ont battu le pavé, le jeudi, 24 janvier 2020, à Bamako et dans plusieurs localités(les capitales régionales, les cercles et arrondissements).
Le gouvernement malien a mis en exécution sa décision de faire appel à des enseignants volontaires pour sauver l’année scolaire. En effet, le Centre national de promotion de volontariat au Mali (CNPV) a lancé, le lundi 27 janvier 2020, le recrutement de 15300 enseignants volontaires pour six mois. Les 10300 nouvelles recrues seront affectées à l’enseignement fondamental (cycle 1 et 2) et les 5000 autres à l’enseignement secondaire, précise le communiqué du CNPV. En plus des diplômés des Instituts de formation des maîtres (IFM), le CNPV explique que les «enseignants retraités à compter de 2018-2019, aptes à enseigner peuvent faire acte de candidature.»
Le syndicat national de la santé, de l’action sociale et de la promotion de la famille vient aussi de déposer un préavis de trois jours (du lundi 17 février au mercredi 19 février 2020) sur la table du gouvernement. Les revendications du syndicat sont les suivantes :l’octroi, sans délai, du reliquat de la prime de fonction spéciale d’un montant de 50 000 FCFA, l’augmentation de la prime de risque de 10% à 15%, le maintien et l’autonomie administrative et financière de l’Agence Nationale de la Sécurité Sanitaire des Aliments( ANSSA), conformément au règlement 07/2007/CMUEMOA, l’augmentation des primes de garde et l’intégration des émoluments des biappartenants dans leur salaire, le maintien et l’extension des ristournes dans leur esprit d’antan et la riposte en charge à 100% des soins et du médicament du personnel socio sanitaire assujettis à l’AMO, la transformation de la carte AMO en carte de gratuité pour les socio-sanitaires, l’intégration dans la fonction publique des contractuels payés sur ressources propres et le recrutement des nourrices du centre d’accueil et de placement familial dans la fonction publique, l’amélioration des conditions de travail par le recrutement du personnel qualifié, l’amélioration du plateau technique…
Trêve sociale ?
Ibrahim Boubacar Keita, le président de la République du Mali, lors de la traditionnelle adresse à la Nation, à l’occasion du nouvel an, le mardi 31 décembre 2019, a, une fois de plus, appelée les syndicats à une trêve sociale. «Je ne saurais, terminer cette adresse sans une fois de plus en appeler à l’esprit civique, toutes et tous, quant à l’impérieuse nécessité d’une trêve sociale», a-t-il indiqué. «Garant du bien-être individuel et collectif de nos concitoyens, je ne suis pas en train, ce faisant, de mettre en cause la légitimité ni la légalité des revendications matérielles, car aucune misère n’est acceptable, ni matérielle ni morale ni spirituelle », a déclaré IBK. Selon le Président, il trouve « noble et démocratique » le combat des syndicats. « A fortiori lorsque ce combat est celui de syndicats de l’éducation se battant pour le mieux-être du corps le plus essentiel de la nation, à savoir le corps enseignant qui mérite le meilleur de ce que peut lui offrir une nation ». Pour le président de la République, le gouvernement essaie de pourvoir à tous les secteurs, malgré ses ressources modiques, « Il est pris à la gorge par l’effort de guerre », a-t-il dit. Il ajoutera que le Mali lui-même est ébranlé dans ses fondements, parce qu’il faut tout faire pour empêcher l’effondrement de notre Etat. « Une proportion de plus en plus importante du budget est consacrée à l’équipement, au recrutement, à la formation et la montée en puissance de nos forces de sécurité et de défense, face à des adversaires qui gagnent redoutablement en efficacité. Par la force des choses, l’investissement dans la guerre est devenu notre première source de dépenses. Ce secteur absorbe 24% des ressources budgétaires de notre pays où tous les investissements sont prioritaires et urgents », a expliqué le Président IBK. « Je sais la prévalence du chômage, malgré les efforts pour promouvoir l’entreprenariat-jeunesse. Je sais la soif d’eau potable. Je sais le besoin d’électricité de nos villes et de nos campagnes. Je sais l’urgence de démocratiser l’accès à la santé, une santé digne d’un pays aux ambitions d’émergence. Je sais l’urgence de démocratiser l’accès à l’éducation, une éducation digne d’un pays aux ambitions d’émergence. Le gouvernement est à pied d’œuvre, se battant sur plusieurs fronts et remportant, dans des biens des domaines, des victoires. Je ne saurais m’en vanter, ce qui est à faire ou à parfaire restant énorme ».
K. Diakité