La ruée sur le charbon de bois ne fait que commencer. Avec la cherté du gaz, les forêts maliennes courent le risque de disparaître plus tôt. La transition qui ne fait rien pour apporter du gaz bon marché est en train d’assister à la liquidation du couvert végétal. Le charbon de bois est la seule source d’énergie à la portée de la population. Pourtant, le Mali s’est doté en 2010, d’une nouvelle loi forestière visant à réorganiser l’exploitation forestière, le transport et le commerce de bois dans un cadre législatif nouveau, techniquement et socialement plus adéquat.
Mais la flambée des prix du gaz a fait que la demande de charbon de bois est devenue plus forte. La loi ne pourra pas sauver malheureusement les forêts dans ce contexte. Selon des experts, c’est une loi aux allures salvatrices mais restée lettre morte suite à son application devenue pratiquement impossible à cause de la force et de la pression des cartels qui détruisent les forêts. Car, la plus grande menace contre les forêts vient de l’exploitation industrielle.
Ainsi, des témoignages indiquent que la région Kéniéba-Faléa est l’illustration parfaite de la destruction des forêts maliennes. En effet, la zone de Kéniéba-Faléa est mise en coupe réglée par les grands exploitants de bois, les compagnies minières industrielles, une multitude de petites sociétés minières chinoises associées à des dirigeants politiques et hommes d’affaires locaux, pour un coupage systématique, massif et dans l’illégalité totale des ressources forestières.
En plus, cette destruction est aussi aggravée par l’exploitation artisanale de l’or qui demande beaucoup de bois pour soutenir les galeries ; ainsi, des milliers d’hectares de forêts sont anéantis annuellement. Les méthodes de travail de ces exploitants locaux de l’or sont attentatoires à la nature à travers la coupe des bois, mais aussi les galeries géantes qu’ils laissent sur place.
En 2020, l’Union européenne dans un rapport sur l’état des forêts au Mali, estimait que 82% des superficies forestières ont été détruites depuis 1960 au Mali. En 2014, le pays ne possédait que 788.111 ha de forêts contre 4.475.000 ha en 1960. La superficie de forêt défrichée par an est estimée alors à plus de 500.000 ha, selon plusieurs rapports. En ce qui concerne la destruction des forêts au Mali, les activistes pointent du doigt certaines autorités, élus politiques, hommes d’affaires et surtout certaines sociétés étrangères, notamment des sociétés d’origine chinoise.
Incontournable dans l’industrie alimentaire, la gomme arabique est prisée par les producteurs de chewing-gum. Les pâtes dentifrices aussi lui doivent leur efficacité. La région de Kayes bénéficie de la source de cette richesse naturelle dont les pays développés ont fortement besoin : la gomme arabique. En dehors de l’or, Kayes peut compter sur la gomme arabique que produisent les acacias, arbustes résistant à la sècheresse. Les acacias qui donnent la gomme arabique sont très nombreux dans la brousse, poussant naturellement partout dans la région.
L’or vert de Kayes
La protection du fragile couvert végétal malien peut transformer les économies locales. L’un des exemples est la gomme arabique. Le gouvernement se tourne timidement vers cette filière dont l’exploitation relève encore de l’amateurisme. En ce moment, les stocks de la gomme arabique sont très faibles dans les centres de production tandis que dans les magasins de gros, surtout à Kayes, on note un peu de stocks destinés à la vente aux partenaires commerciaux dont les Indiens et les Sénégalais. Les Maliens qui interviennent dans le secteur ne sont pas nombreux malgré l’importance de ce commerce.
A Kayes, Yélimané, Nioro, Diéma, Kita et Ségou, les prix bord-champ de la gomme dure et les échanges en gros se maintiennent au même niveau évoluant entre 350 FCFA et 375 par kilo. Parfois, les prix peuvent aller à 400 FCFA ou 450. S’agissant de la gomme friable, les prix bord-champ sont faibles. La demande est tellement forte que certains jeunes ont renoncé à la migration pour chercher de l’argent dans la cueillette de la gomme. Le commerce de la gomme arabique peut ainsi sortir de nombreuses familles de la précarité dans les villages de la région de Kayes.
La diaspora importante de la région doit investir dans la production de la gomme arabique en investissant dans la plantation des pieds d’acacia. Selon les experts, les retombées économiques d’un tel investissement sont rapides et rentables. Les compagnies étrangères peuvent être facilement séduites par des projets de plantation d’acacia. Les fonds d’investissement pour le climat constituent surtout une aubaine dont les Kayésiens doivent profiter.
On parle beaucoup de l’économie décarbonée. Il ne reste plus à la région de Kayes de donner un petit coup de pouce à la nature qui offre déjà de quoi dominer le marché ouest africain de la gomme arabique. La relance de ce commerce permettra au Mali de redevenir un pays fournisseurs des grandes firmes qui achètent la gomme arabique. Le développement des pays asiatiques qui disposent de nombreuses industries alimentaires donne au Mali et à la région de Kayes une grande opportunité commerciale.
Nampaga KONE
La Preuve