Bakary Togola, président de l’UN-SCPC : « Ma dignité ne me permet pas de détourner 18 milliards FCFA »
Par L'Alerte -
L’ancien président de l’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture du Mali (Apecam) non moins président de l’Union nationale des Sociétés coopératives de Producteurs de coton du Mali (UN-Scpc), Bakary Togola, après son séjour de 19 mois à la Maison centrale d’arrêt de Bamako, rompt le silence. Dans une interview qu’il a accordée aux journalistes Seydou Oumar Traoré de ‘’Baoulé FM’’ et Ibrahim Djonkoloni Coulibaly de la radio ‘’Sikida kunkan’’, il balaie d’un revers de main les accusations de détournement des ristournes des producteurs de coton.
Bakary Togola, c’est son nom. Il dit n’être de rien dans l’hémorragie financière qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive. Elle a même conduit à son emprisonnement. Après un an et 7 mois d’incarcération à la Maison centrale d’arrêt de Bamako, l’enfant de Koumantou a libéré la parole au micro de ces deux confrères animateurs de radio. Il a décidé de dire sa part de vérité dans cette affaire de détournement des ristournes destinées aux producteurs de l’or blanc.
L’ancien patron de l’Apecam n’a pas tardé à faire savoir qu’il respecte sa dignité pour s’adonner à un tel acte au sein de l’association dont il a contribué à l’essor. Après avoir dressé la genèse de l’Apecam et cité ses différents présidents, il a laissé entendre qu’il est devenu président quand l’association sonnait sa 17ème année.
Pour lui, le réseau de plus de 77000 coopératives, 41 secteurs, 28 communes et 4 filiales fonctionne avec les 15% alloués au développement de l’agriculture. A l’entendre, en cas de bénéfice, 45% reviennent aux producteurs et 40% constituent le fonds de soutien.
Bakary Togola lève le voile sur les sommes non versées par la Cmdt sous la direction de Modibo Koné et Baba Berthé
Selon le patron de l’UN-Scpc, pour la campagne de 2016-2017, Modibo Koné étant le Président directeur général de la Cmdt, il y a eu 3 milliards FCFA d’impayés. Partant, il a ajouté qu’au titre de la campagne 2017-2018, c’est-à-dire au temps de Baba Berthé, la Cmdt n’a pas pu s’acquitter de 9 milliards 846 millions 118 mille 348 FCFA. Concernant la campagne de 2018-2019, la Cmdt étant toujours sous la direction de Baba Berthé, 6 milliards 914 millions 824 mille 576 FCFA sont restés impayés. De son avis, cela fait un total de 19 milliards 760 millions 942 mille 924 FCFA plus les 2 milliards 410 millions 286 mille 357 FCFA de fonds de soutien. Du point de vue de l’interlocuteur de Seydou Oumar et Djonkoloni, l’ensemble donne un total global de 22 milliards. « Si j’entends que 18 milliards ont fait l’objet de détournement, il faut se poser la question pour connaître l’auteur de cette hémorragie financière. Je sais que ce n’est pas moi. Quand on m’arrêtait, j’avais des dettes au niveau de la Cmdt et je possède les documents. La Cmdt en possède aussi. Ce n’est pas bon de chercher à salir le nom des gens », a balancé l’ancien président de l’Apecam, le nerf apparemment à fleur de peau.
Si l’on en croit Bakary Togola, la forfaiture a été perpétrée lorsqu’il était en prison. Juridiquement, explique-t-il, pour décaisser l’argent, le trésorier, le ministre des Finances, la banque et moi signons. Après, ajoute-t-il, la lettre est envoyée à la BIM pour versement dans les comptes. « Je ne voyais que le papier. Après l’adoption, le consultant faisait le rapport », a-t-il martelé. Avant d’ajouter qu’il n’est pas quelqu’un qui est capable de détournement car il respecte sa dignité.
Bakary Togola déterminé à atteindre la prévision des 850 000 tonnes
Revenu à la tête de l’UN-Scpc par voie consensuelle, les actions posées plaidant aussi en sa faveur, Bakary Togola n’entend pas dormir sur ses lauriers. Il compte atteindre la prévision des 850 000 tonnes pour la campagne de cette année. Pour y arriver, il a en sa possession une avalanche de mesures salvatrices pour la filière coton. Cela passe par la dotation des cotonculteurs en engrais et beaucoup d’autres moyens.
Pour lui, c’est le travail qui doit prévaloir pour sauver la filiale du coton. De ce fait, il croit en l’union des producteurs de coton. « Si on dit qu’un village est loin, un autre se trouve derrière. Tout ce qu’on fait dans la vie, on le fait pour soi. Au moment où j’ai eu des problèmes, j’ai appelé mon vice-président pour qu’il prenne les rennes de l’UN-Scpc. La loi dit qu’en cas d’empêchement du président, son adjoint prend sa place directement. C’est ainsi jusqu’à la dernière personne du bureau. Il a travaillé durant presque 22 mois. Comme je suis libre maintenant, l’assemblée a décidé qu’il me remette le poste de président de l’UN-Scpc. Il n’en a pas fait un problème, je l’en remercie bien. Nous travaillons ensemble puisqu’il est toujours vice-président. Mon premier travail consiste à réunir tous les présidents de l’UN-Scpc, vider les différends afin de procéder au renouvellement du bureau », a expliqué l’enfant de Koumantou.
A ses dires, quand il a pris la décision du renouvellement du bureau, il y a eu trop d’entraves du côté de Koutiala. Après la mise place des secteurs, des plaintes ont été introduites. « De plainte en plainte, cela n’est pas bon. Quand ils se sont précipités de faire l’élection du bureau national de l’UN-Scpc, le pouvoir s’y était opposé. Si le pouvoir prend une telle décision, cela veut dire qu’il n’y a pas de bureau. Donc c’est l’ancien bureau qui continue de travailler. Que ce soit le bureau national, communal ou sectoriel, tous les anciens travaillent. Si nous sommes d’accord sur le renouvellement du bureau, nous le ferons car ce n’est pas l’affaire d’une personne », a-t-il tenu à faire savoir.
Il ne veut pas être toujours à distance des cotonculteurs. Pour cela, ensemble, des sorties sur le terrain auront lieu. L’objectif, précise-t-il, c’est de rencontrer les cotonculteurs afin de recenser leurs difficultés et leur apporter des solutions. « Dans la mesure du possible, nous trouverons la solution à certains problèmes. D’autres difficultés auxquels il est difficile de trouver la solution cette année attendront l’année prochaine. Les producteurs sollicitent ma visite », a-t-il martelé.
Et de rendre grâce à Allah. « C’est Dieu qui est grand. Je suis sorti de la prison et on m’a mis à ma place, je ne ferai que remercier les uns et les autres. C’est une salutation sans limite car celui qui reconnaît la bonté vaut mieux que celui qui l’a faite. Si ceux qui reconnaissent la vérité sont nombreux, les auteurs se multiplieront davantage. Que le bon Dieu récompense infiniment tous ceux qui ont eu une pensée envers moi au moment difficile. Je sollicite leur bénédiction pour le redressement de la culture du coton au Mali. Un moment, nous avons lutté contre la privatisation de la Cmdt, aujourd’hui nous ne devons pas assister à la destruction de cette filière. Cela fait honte mais chacun a sa compréhension de la situation », dit-il. Avant d’ajouter que la filière du coton est pour tous et qu’il faut tout faire pour la sauver.
Pour atteindre cet objectif, il pense que l’entente entre les producteurs du coton est primordiale. « Si les producteurs ne s’entendent pas, la filière ne s’épanouira pas. Pour parler de filière, il faut qu’il ait le coton. A cause de son manque, les banques, les fournisseurs, les semencières, les agents de la Cmdt, même les producteurs sentiront les effets. Nous ne devons pas accepter que cela arrive. La filière, c’est comme une chaîne. Chacun trouve y son intérêt. J’assume ma responsabilité. Quand j’étais président, les gens étaient unis comme des frères. Se soumettre aux autres est le seul secret dont je possède pour atteindre l’objectif. Que ceux qui me suivent sachent que je travaille pour eux. Je salue les producteurs de coton pour leur effort », a-t-il conclu.
Bazoumana KANE