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Kadidia Fofana, présidente du mouvement An Tan Sen Boala “Le 22 septembre est la seule date”

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Dans l’interview ci-dessous, Kadidia Fofana, présidente du mouvement An tan Sen Boala revient sur l’actualité de la semaine. Le débat sur la laïcité, l’agression du cortège du très respecté imam Mahmoud Dicko, le 14 janvier décrété comme Journée de la souveraineté retrouvée passent en revue… Entretien.

 Mali Tribune : Quel est votre avis sur la question de la laïcité qui défraie présentement la chronique au Mali ?

Kadidia Fofana : Beaucoup de gens parlent de la laïcité, mais peu connaissent à peine son sens. La laïcité n’est autre chose que la séparation de l’Etat et des organisations religieuses, c’est-à-dire la cohabitation de plusieurs organisations religieuses sur le même territoire.

Je pense que le Mali a toujours connu cette laïcité. Au-delà du Mali, Dieu même qui nous a créés (hommes et femmes à son image) est laïc. N’eut été la laïcité de notre Créateur, il aurait fait de nous tous des musulmans ou des chrétiens, voire des animistes exclusivement. Au lieu de cela, il a décidé de laisser le libre choix à chacun et chacune de ses créatures de décider de son plein gré la religion qui lui convient. Donc le débat de la laïcité est un faux débat qui fait couler beaucoup d’encre malheureusement et qui nous fait oublier les questions essentielles de notre pays.

Ma conviction est que dans un pays aussi fragile, il faut renforcer et entretenir ce qui nous lie. Et ce qui nous lie, c’est le Mali. Si on s’appesantit sur des choses qui nous séparent au détriment des choses qui nous unissent, je pense qu’on est mal parti. Il convient de rappeler que la religion musulmane aussi bien que chrétienne sont des religions importées. Et avant même que ces religions n’arrivent au Mali, nous avons des croyances. Vouloir faire du Mali un pays islamique, c’est travailler à la division des fils et filles de ce pays. Nous avons évité de justesse la catastrophe avec les problèmes ethniques et les conflits inter et intra-communautaires au centre du pays. Si on ajoute à cela des problèmes religieux, il nous serait très difficile de sortir du gouffre.

Mali Tribune : Dans le même registre, comment expliquez-vous l’agression du cortège du très respecté imam Mahmoud Dicko ?

K. F.: Nous avons tous déploré cet incident malheureux. Maintenant au-delà des lois et principes, nous avons des valeurs, des us et coutumes. Nos valeurs nous inculquent le respect des personnes âgées. Idem pour les autorités religieuses et coutumières. C’était juste dommage de voir le cortège d’un imam se faire agresser après que ce dernier a été honoré par un autre pays. A travers cette distinction, c’est tout le Mali qui a été honoré. Ceux qui ont fait cela auraient pu nous faire économie d’un tel acte.

Mali Tribune : Que pensez-vous du 14 janvier décrété Journée de la souveraineté retrouvée que les autorités ont fêté avec pompe pour la première fois ?

K. F.: Je trouve que c’est un jeu des mots. Et je pense aussi que nous assistons implicitement à une falsification de l’histoire de notre pays. C’est la raison pour laquelle je disais que nous devons faire attention aux mots, dates et événements qui surviennent dans notre pays.

Si nous ne prenons pas garde, il arrivera un moment où nos enfants ne feront plus la différence entre le 22 septembre et le 14 janvier. Après le renversement du 1er président, le 19 novembre 1968, feu Moussa Traoré avait initié que les Maliens fêtent cette date-là. En fin de compte, ils ont dit non parce que ce n’était pas une fête.

Pour le cas du 14 janvier, j’étais sur le terrain comme tout autre Malien, parce que ce jour-là, c’était le Mali et les Maliens qui ont été sanctionnés. Donc, il était de notre devoir d’être là pour dénoncer ces sanctions imposées à notre pays. J’aurais aimé entendre dire que c’était le jour où les Maliens se sont donnés la main pour faire face aux sanctions imposées par la Cédéao et l’Uémoa.

Mais on ne peut mettre cette date dans un contexte de souveraineté retrouvée. On parle de souveraineté lorsqu’on arrive à nourrir sa population, lorsque la sécurité est effective dans le pays et que l’Etat exerce son pouvoir sur toute l’étendue du territoire. Aujourd’hui tel n’est pas le cas, des millions de Maliens meurent de faim et nous, on est là à fêter à Bamako.

Sortons de cela. Nous avons beaucoup de choses à gérer. Nous sommes tenus par le temps. Nous avons des élections à organiser. Nous avons à faire face aussi à des djihadistes qui prennent déjà position à Bamako et ses environs. Je pense que le 22 septembre est la seule date où le Mali a obtenu sa souveraineté et son indépendance.

Mali Tribune : En tant que présidente du mouvement An tan Sen Boala quelle est votre position sur le projet de nouvelle Constitution ?

K F. : L’Etat n’est pas notre meilleur allié. Une Transition pour moi n’a d’autre vocation que de préparer des élections. Une Transition ne peut pas se donner un mandat électoral. Parce que ça peut créer d’autres problèmes aux gouvernants aussi bien qu’aux gouvernés. Parce qu’il arrivera un moment où on va vous faire des revendications auxquelles vous n’êtes pas préparés. Certes, tout le monde est d’accord que l’ancienne Constitution a montré certaines carences qu’il va falloir corriger. Mais ce n’est pas étant divisés qu’on peut le faire.

 Propos recueillir par

Ousmane Mahamane

Mali Tribune

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