Affaire des « fausses garanties bancaires de EDM-SA : Les banquiers arrêtés clament leur innocence Fort soupçon de manque de rigueur de l’EDM-SA !
Meguetan Infos

Nos investigations dans ce dossier qui alimente la chronique bamakoise démontrent que le secrétariat général de la société Energie du Mali (EDM-SA) n’a pas fait preuve de proactivité dans la gestion de ce dossier. Visiblement, il a laissé pourrir la situation avant de s’en laver les mains. Notre enquête.
Dans sa note d’information du 11 mars 2025, le secrétaire général d’EDM faisait état de l’ouverture d’une information judiciaire pour des préjudices causées à un projet de la société EDM-SA, le Projet de développement de mini centrales hydroélectriques au Mali (PDM-Hydro), à la suite de délivrance de fausses garanties bancaires par deux groupements.
Pis, la responsable suivi évaluation dudit Projet, qualifiait la banque émettrice de ces garanties de “fausse banque ou banque fictive du nom d’Acumen Bank LTD Londres” dans sa lettre de demande de retrait du Projet, adressée au directeur général d’EDM en date du 28 octobre 2024.
Cela a justement conduit au placement sous mandat de dépôt de deux banquiers, un Indien, le coordonnateur de projet et un sous-traitant par le Pôle national économique et financier de Bamako. Ces individus sont soupçonnés de “faux et usage de faux, blanchiment de capitaux et complicité”. Paradoxalement, la banque dont les agents sont incriminés, en l’occurrence Ecobank-Mali, le Groupe Ecobank et l’Association professionnelle des banques et établissements financiers du Mali (APBEF) sont formels pour dire que la transmission des notes d’information signée par les deux banquiers mis en cause est conforme aux procédures d’Ecobank-Mali et à la pratique bancaire au Mali.
En effet, Ecobank-Mali a reçu plusieurs messages “Système de communication entre l’ensemble des banques du monde” (Swift) authentiques MT 760 de sa filiale sœur Ecobank-Tanzanie, qui a une relation avec Acumen Bank LTD Londres. Les différents messages Swift consistaient à informer EDM (le projet PDM-Hydro) que les garanties physiques qui leur ont été délivrées par Mecamidi HPP/PRIL venaient effectivement d’elle.
Ecobank-Mali a transmis ces différents messages Swift authentiques reçus accompagnés chacun d’une lettre d’information dans laquelle elle précise qu’elle est “sans aucune responsabilité, ni engagement de sa part” par rapport au contenu du message Swift joint. Et dans le message Swift, Ecobank-Tanzanie a également décliné toute sa responsabilité dans le cadre de la transmission.
Quant à Acumen Bank LTD, elle a renouvelé dans le message Swift son engagement de façon irrévocable et inconditionnelle à rembourser EDM (le projet PDM-Hydro) de la totalité des sommes perçues par son client Mecamidi HPP/PRIL dans la limite de sa garantie, au cas où ce dernier n’honore pas ses engagements contractuels vis-à-vis de EDM.
Il suffisait seulement qu’EDM en fasse la demande avec les éléments justificatifs auprès de Acumen Bank LTD dans la limite de validité de la garantie physique reçue. Cette information a également été rappelée par Acumen Bank LTD dans le message Swift transmis par Ecobank Mali.
Tout d’abord, il faut comprendre qu’à chaque fois qu’EDM bénéficie de l’accompagnement des bailleurs de fonds (Banque mondiale, Bad, Bid, Boad, etc.) pour la réalisation d’un projet d’intérêt national, elle a coutume de créer une UGP (unité de gestion de projet) pour chaque projet. L’objectif étant de scinder la gestion du projet ainsi que les fonds alloués à la gestion courante de la société EDM.
Attentisme
Chaque UGP a son propre compte bancaire, bénéficie d’une autonomie de gestion et dispose une équipe de projet résolument dédiée. Les demandes de décaissement sont adressées directement aux bailleurs de fonds par l’UGP qui en assure la gestion, pour validation. Les décaissements des fonds sont faits directement dans le compte des bénéficiaires par les bailleurs. L’UGP est principalement constituée : d’un coordonnateur (coordonne toutes les activités de l’UGP), d’un responsable administratif et financier (responsable de la conformité de tous les décaissements), d’un responsable suivi et évaluation de projet (responsable de la conformité des travaux par rapport au cahier de charges et a l’obligation de produire un rapport d’étape à l’attention de la direction générale d’EDM tous les 3 mois) et d’un responsable de passation des marchés (responsable de la conformité des passation de marché conformément à la politique du bailleur). Chacun d’entre eux a une responsabilité spécifique dans son champ de compétence.
Alors quel est le problème ? qu’est-ce qui explique la plainte de EDM ?
Plus de 5 milliards de F CFA ont été perçus par les Groupements Mecamidi HPP/PRIL et AEEPL NEPL Suncity depuis 2022 soit il y a 3 ans sur un montant total de 13 milliards de F CFA et les travaux n’ont toujours pas commencé !
Beaucoup de zones d’ombre méritent des clarifications :
Sachant que la responsable suivi évaluation avait l’obligation de produire un rapport d’étape tous les trimestres, pourquoi porter plainte maintenant après 3 ans soit 9 trimestres pour non-démarrage des travaux ? Les rapports n’étaient-il pas produits et/ou pas transmis à la direction générale ? S’il était produit, n’était-il pas lu par la direction générale ? Qu’en est-il alors pour les autres projets de la société EDM-SA ?
Pourquoi la responsable suivi évaluation se focalise sur “les fausses garanties et/ou fausses banques” dans sa notification du 28 octobre 2024 pour rendre le tablier sans faire aucunement mention des rapports d’étapes trimestriels, qu’elle-même devrait produire ?
De la date du premier décaissement en mai 2022 à sa demande de rendre le tablier le 28 octobre 2024, quelle alerte a-t-elle formulé à attention du chef de projet ou de la direction générale pour non-démarrage des travaux ?
Sachant qu’en plus d’être la responsable suivi-évaluation du projet, elle est aussi le chef de département suivi et évaluation de l’ensemble des projets de EDM, un département rattaché directement au directeur général d’EDM, pourquoi attendre plus de 2 ans ? Sa demande de rendre le tablier n’est-elle pas une fuite en avant ?
Comment les demandes de décaissement ont pu être formulées par EDM (le projet PDM-Hydro) et approuvé par le bailleur, si les garanties sont fausses ?
Acumen Bank a émis des garanties pour la société Mecamidi IIPP/PRIL tandis que la responsable suivi évaluation du projet parle des garanties pour les groupements Mecamidi HPP/PRIL et AEEPL NEPL Suncity dans la correspondance du 28 octobre 2024. Que devrons-nous retenir ?
Suivant les procédures d’EDM, toutes garanties devaient être confirmées auprès de la banque émettrice avant son acceptation. Qu’en est-il pour ces garanties dites fausses par EDM mais quand même acceptées pour effectuer des décaissements de plus de 5 milliards ?
Suivant les procédures d’EDM, toutes les garanties y compris celles des projets doivent être logées au département juridique qui relève directement du secrétaire général d’EDM. Au plus tard un mois avant l’échéance, EDM doit faire systématiquement appel à la garantie qui sera soit payée, soit prorogée afin qu’elle puisse entrer en possession de ses fonds au cas où le prestataire serait défaillant. Dans le cas de la présente plainte, l’inquiétude demeure car la garantie bancaire référencée ACB8272152 émise le 25 avril 2022 en faveur d’EDM (le projet PDM-Hydro) d’un montant de 5 222 450 euros, soit 3 425 702 635 F CFA est échu depuis le 31 mai 2024 sans que le secrétaire général d’EDM ne fasse appel à la garantie ou demander tout au moins son renouvellement conformément aux procédures en vigueur à EDM !
Quel traitement le secrétaire général d’EDM réserve aux autres garanties émises et non encore échues par Mecamidi HPP/PRIL en faveur d’EDM (le projet PDM-Hydro) ?
Est-ce un problème de compétence ou une méconnaissance de ses propres procédures au niveau du top management de EDM ?
Que faut-il faire pour qu’EDM (le projet PDM-Hydro) puisse rentrer en possession de ses fonds ?
Il est impératif que la direction générale d’EDM mette tout en œuvre pour réparer le manquement à la procédure qui a entraîné la caducité de la garantie bancaire référencée ACB8272152 de 5 222 450 euros sans appel et sans prorogation. Comment ? En demandant à la société indienne Mecamidi HPP/PRIL, émettre une nouvelle garantie bancaire d’égale valeur.
Une fois cela fait, deux alternatives se posent à EDM :
1-Elle décide de rompre le contrat avec la société Mecamidi HPP/PRIL, dans ce cas de figure, elle appellera les garanties bancaires à hauteur de ses décaissements ;
2-Elle décide de continuer avec la même société en lui mettant la pression pour démarrer le projet, auquel cas, le secrétaire général devrait suivre les échéances des garanties conformément aux procédures déjà en vigueur.
El Hadj A.B. HAIDARA
Aujourd’hui-Mali