ÉLECTIONS AU MALI : QUI POURRA RESTAURER L’AUTORITÉ DE L’ETAT ?
Comme sept autres pays africains cette année, le Mali s’apprête à élire son futur chef de l’État, le 29 juillet 2018. Pour s’imposer face au président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, Soumaïla Cissé, qui entend réunir les partis d’opposition derrière l’URD et son mouvement « Ensemble, restaurons l’espoir » cumule les soutiens dont celui de Salif Kéita.
Après le Sierra Léone, l’Égypte et avant le Cameroun, Madagascar, la République Démocratique du Congo, le Soudan et le Zimbabwe, le Mali doit élire celui ou celle qui dirigera le pays pendant les cinq prochaines années. Sans difficulté particulière dans de nombreux pays, l’organisation du scrutin s’annonce cependant délicate dans la patrie de l’écrivain Amadou Hampâté Bâ et ses 18 millions d’habitants, comme l’a prouvé le report des élections territoriales du mois de décembre au mois d’avril. Et pour cause, « en dehors des villes chefs-lieux de cercle ou de communes, l’administration d’État n’a de présence territoriale effective que sur moins de 50 % des 49 cercles du pays, affirme Ousmane Sy, ancien ministre de la décentralisation d’Ibrahim Boubacar Keïta. Rien n’indique qu’une amélioration est envisageable à court terme. »
À l’origine des difficultés rencontrées par les autorités pour contrôler l’ensemble du territoire, le terrorisme et le trafic de drogue ont instauré depuis plusieurs années un état d’insécurité qui perdure dans le nord et, dans une moindre mesure, le centre du Mali. « Le régime est incapable d’organiser des élections transparentes », aurait même décrété Oumar Mariko, député et président du parti SADI.
Malgré la présence sur place de l’armée française depuis janvier 2013, la menace djihadiste continue de sévir, ainsi que l’a rapporté le journal L’Observateur Paalga. Fin avril, deux attaques perpétrées par des hommes présentés comme membres de l’État islamique ont causé près de 40 victimes dans la région de Ménaka, au nord du pays. Si des incertitudes pèsent toujours sur la tenue des élections, leur résultat suscite lui aussi de nombreuses spéculations par le peuple malien. Ce dernier attend en effet beaucoup du prochain mandat, à l’heure où l’indice de développement humain figure parmi les plus faibles au monde (175e sur 188), selon le ministère des Affaires étrangères.
En coulisse, la classe politique est, elle aussi, déjà focalisée sur le scrutin de juillet. Le 6 mai, le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), a été investi candidat lors d’un rassemblement de près de 70 partis, tandis qu’une soixantaine d’autres ont formé une coalition de l’opposition le même jour à Bamako, afin d’obtenir « l’alternance et le changement » promis mais, selon eux, non délivrés par IBK. Parmi les signataires, Soumaïla Cissé veut « mettre fin à l’immense gâchis » de ce quinquennat.
Cissé veut « restaurer l’autorité de l’Etat »
Soumaïla Cissé le principal opposant au gouvernement actuel accumule les soutiens. Le dernier en date, Me Hassan Barry ancien ambassadeur du Mali en Guinée et de l’artiste Salif Kéita. C’est sans surprise que le 13 Mai dernier, Cissé, avait été choisi comme candidat par l’Union pour la République et la Démocratie (l’URD). Sa plateforme « Ensemble, restaurons l’espoir » réuni une trentaine de partis politiques et plus de 200 associations. Une investiture qui fait suite à un rassemblement, le 26 Mars à Bamako, où entre 60 000 et 80 000 personnes étaient réunies. Selon RFI, Soumaïla Cissé avait « cassé la baraque ». Le 8 juin dernier, une nouvelle marche avait rassemblé des dizaines de milliers de maliens à Bamako. Une marche qui s’était déroulée sans encombre cette fois, après celle du 2 Juin où les forces de l’ordre avaient dispersé des manifestants à l’aide de gaz lacrymogènes.
Des mobilisations qui traduisent une volonté d’alternance. L’un des quotidiens de la capitale L’Aube, a récemment énuméré les scandales qui ont émaillé le quinquennat d’IBK. « De l’achat de l’avion présidentiel à l’achat d’équipements militaires pour l’armée malienne, en passant par la sulfureuse affaire d’acquisitions des pick-up, des tracteurs et de l’engrais frelaté… Le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta s’est abonné tout au long de son mandat aux magouilles, détournements de deniers publics et aux surfacturations.»
Face à la dizaine de candidats déjà déclarés en dépit de son appel à l’union de l’opposition, Soumaïla Cissé veut rétablir la sécurité dans l’ensemble du pays. « Il faut restaurer l’autorité de l’État. Nous devons être unis devant ces groupes [terroristes] et dégager une force suffisante pour leur faire face », estime-t-il. Le gouvernement ne fait pas suffisamment son travail. Ministre à plusieurs reprises entre 1993 et 2002, le concurrent le plus sérieux d’IBK tient peut-être là la chance d’enfin prendre les rênes du pays, après deux apparitions au deuxième tour de la présidentielle, dont la dernière en 2013. La troisième fois sera-t-elle la bonne pour le fondateur de l’Union pour la République et pour la Démocratie (URD) ?
Source: afrique-centrale.fr