26è Fespaco : « DAWA » ET « LA LANGUE ET LES DENTS » DES PHOTOGRAPHIES DE LA SOCIÉTÉ MALIENNE
Ces deux films dépeignent notre pays sous ses différentes facettes. Le premier, un documentaire, aborde le thème très actuel du djihadisme et le second, une série télévisée, dissèque les vicissitudes de la vie quotidienne
Les activités du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco) se poursuivent sous haute surveillance avec un impressionnant dispositif de sécurité. La projection de « Dawa, l’appel à Dieu », un documentaire réalisé par notre compatriote, Malick Konaté, était beaucoup plus surveillée.
Avec les nombreux attentats terroristes que le Burkina Faso a connus ces derniers temps, des actions revendiquées par des terroristes, la sécurité demeure une préoccupation essentielle pour les organisateurs. Pour rassurerles nombreux cinéphiles qui ont fait le déplacement dans la capitale burkinabé, les éléments des services de sécurité ont été déployés en nombre et veillent au grain pour prévenir toute velléité d’action terroriste pendant le plus grand festival cinématographique du continent. De mémoire de festivaliers, c’est un dispositif de sécurité sans précédent. Rues barricadées, fouilles systématiques à l’entrée des sites du festival et des hommes lourdement armés en faction gardent un œil sur le moindre mouvement suspect. Des unités mobiles à bord de pick-up ou à motos patrouillent pour dissuader les individus malintentionnés. Ouagadougou ressemble à une ville en état de siège. Les préoccupations de sécurité sont si fortes que certains se demandent pourquoi sélectionner un film qui aborde le thème du djihadisme au Sahel ? Malgré cette atmosphère pesante, la salle de cinéma Neerwaya a presque fait le plein, mercredi, en milieu de soirée. Tout ce beau monde voulait voir le documentaire « Dawa, l’appel à Dieu », et disséquer le message que le réalisateur entend véhiculer à travers son film. Malick Konaté est un jeune de Bamako, issue d’une famille musulmane qui s’était laissé convaincre par les thèses de la « Dawa ». Ce mouvement islamiste que certains décrivent comme étant l’anti chambre de l’extrémisme, préconise l’idée d’un retour à l’islam pur. Malick Konaté s’y était engagé à fond et a appris le Coran et les principes de la Dawa. Il finit par devenir même prédicateur et participait à des missions de sensibilisation à travers le pays.
Le film relate son expérience au sein de la « Dawa ». Il a expliqué avoir rencontré Iyad Ag Ghali, le leader terroriste le plus recherché du Sahel, et d’autres chefs du mouvement, dans une mosquée de Bamako. En 2012, quand éclate la rébellion dans le Septentrion et que les indépendantistes et les terroristes occupent les 3/4 du territoire, Malick Konaté commença à comprendre les objectifs réels du mouvement et a pris ses distances. Il a pris conscience de la réalité lorsqu’il a vu sur les écrans de télévision, ses condisciples se rendre coupables de tueries et d’humiliations de nos compatriotes. C’est cette prise de conscience qui est à l’origine de ce film documentaire autobiographique. Pour le réalisateur, le cinéma demeure un moyen de réflexion sur de telles situations.
Le documentaire est donc une succession d’interview, d’entretiens et d’images d’archives. A la fin de la projection, le cinéaste a expliqué à la presse que son objectif était de faire comprendre la différence entre le rite malikite (qui prône un islam de paix, de tolérance et rejette la violence) et la « Dawa », importée du Pakistan.
Un peu plus tôt dans la journée, « La langue et les dents », une série télévisée de notre compatriote Boubacar Sidibé, a été projetée dans la salle du Palais de la jeunesse et de la culture, Jean Pierre Guingané dans le quartier périphérique de Dasasgo. Boubacar Sidibé est aussi le réalisateur de « Les rois de Ségou » et « Dou, la famille ». Le réalisateur le plus prolifique des séries télévisées dans notre pays revient sur ses thèmes favoris : la société malienne et ses différentes ethnies, ses religions, ses histoires d’amour, etc.
La projection de la série télévisée « La langue et les dents » a enregistré la présence de l’ambassadeur du Mali au Burkina Faso, Amadou Soulalé. Le réalisateur a fait observer une minute de silence à la mémoire de l’actrice principale de son film, Aminata Doumbia dite Batoma, qui a perdu la vie au cours d’un tragique accident de la circulation, quelque temps après la fin du tournage. C’est donc très ému qu’il a rappelé devant le public, le souvenir de cette actrice qui n’a pas eu la chance de voir une minute de l’œuvre à laquelle elle a contribué.
Envoyé spécial
Youssouf DOUMBIA
Source: Essor