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19 novembre1968-19 novembre 2018 : Il y a 50 ans que la soldatesque mettait un coup d’arrêt brutal à la marche progressiste du Mali

Rentrée par effraction dans l’histoire politique de notre pays, la soldatesque du 19 novembre 1968 a sauvagement mis fin à l’ambition des pères de l’indépendance de construire un Mali émergent. Cette malédiction poursuit toujours notre pays dont la destinée est entre les mains des élèves du général Moussa Traoré dont l’un l’a relevé au statut de ‘’grand républicain’’.

Réalisé au nom du redressement de la situation économique du pays pour, disait-on, donner une bouffée d’oxygène au peuple malien, le coup d’Etat n’a pas tardé à montrer le vrai visage des putschistes qui ne voulaient pas, en réalité, supporter les sacrifices consentis par leurs compatriotes pour l’édification d’un Mali de demain dont le socle était la justice sociale. Quelques heures seulement après la chute du président Modibo Keïta, bonjour les dégâts !

Quand ils ont investi le palais de Koulouba, où se trouvait encore la famille du président Modibo Keïta, ils ont volé l’or de Mme Keïta Mariam Travélé, épouse du chef de l’Etat. Jusqu’à présent aucune lumière n’a été faite sur cette affaire. Comme si cela ne suffisait pas, ils ont dérobé les biens de l’Etat pour se faire une place de choix auprès de la gent féminine bamakoise.

La tragédie ne s’arrête pas là. Quand ils se sont trahis, en février 1978, des révélations fracassantes ont été faites. Lors du procès crimes économiques, organisé pour juger les auteurs de la tentative du coup d’Etat du 28 février 1978, un élément clé du 19 novembre 1968, le plus en vue d’ailleurs, n’a pas su se contenir.

Il a lâché le morceau: «Les membres du Comité militaire de libération nationale (CMLN) se sont partagés les 300 millions de Franc malien (FM) qu’ils ont trouvé dans les caisses de l’Etat». Et pour boucler la boucle, ils ont systématiquement démoli les grandes réalisations faites par la première République pour assurer le bien être de la population malienne.

Cinquante (50) ans après le coup d’Etat du 19 novembre 1968, le Mali ne s’est jamais relevé de cette descente aux enfers. Il a plongé notre pays dans l’obscurantisme, comme si une malédiction qui venait de frapper le peuple malien. Il a mis un arrêt brutal à la marche patriotique et progressiste que Modibo Keïta et ses compagnons avaient initiée pour doter le Mali d’infrastructures adaptées à nos besoins, des réformes dont la finalité était la construction du citoyen de demain. Ils (les putschistes) n’ont épargné aucun secteur de développement dans leur destruction du tissu socioéconomique. A commencer par les ressources humaines.

Arrivés au trône au bout du fusil, les auteurs de la dépravation de nos mœurs se sont acharnés contre l’élite malienne, notamment les enseignants considérés par les putschistes comme ceux qui pouvaient prendre le flambeau de la lutte de Modibo Keïta pour débarrasser le pays de ces hommes aux ambitions démesurées. C’est pourquoi une véritable chasse à l’homme a été organisée contre les opposants au régime militaire qui n’avait aucune assise populaire, sauf la force. Ils (Bakary Pionnier, Modibo Diakité, Adama Samassekou, Ibrahim Ly, Victor Sy, Kary Dembélé, V. Zéro, Yoro Diakité, Komakan Keïta, Nanpaga Otian Koné, Many camara, Mamadou Lamine Traoré, Tiébilé Dramé, Oumar Mariko, etc.) n’ont connu que bastonnade, torture, humiliation, déportation, prison, exil ou assassinat (Abdoul Karim Camara dit Cabral) durant les vingt-trois longues années du règne des officiers subalternes qui avaient pris le pouvoir au nom de la liberté et du redressement économique.

Autre cible de la junte du 19 novembre 1968, l’école. Arrivés au pouvoir sans formation politique et idéologique, les quatorze membres du CMLN ont enterré la Réforme de 1962 qui avait été élaborée par le régime de l’Union Soudanaise-République démocratique africain (US-RDA) pour décoloniser notre école et préparer le citoyen malien à relever les défis du développement et à faire de ce dernier un acteur de son propre développement.

Cette réforme est à l’origine de toutes les grandes écoles du Mali (ENA, ENI, IPR, ENSUP), les écoles de formation des enseignants (IPEG, ENSEC), les écoles professionnelles. Le Mali était bien parti pour la formation de ses ressources humaines de bonne qualité sans lesquelles tout projet de développement est voué à l’échec. Mais hélas !

Les princes du jour n’entendaient pas de cette oreille. Car un cadre bien formé était un danger permanent contre les intérêts de l’ordre kaki. Ils comptaient sur une formation au rabais pour maintenir les Maliens dans les ténèbres afin de mieux se servir des richesses destinées à tout le peuple malien. C’est ainsi qu’ils ont fait appel au Programme d’ajustement structurel (PAS) du FMI et de la Banque pour saborder le système éducatif national.

Conséquences: la fermeture des écoles de formation des enseignants (ENESEC de Badalabougou, de San, IPEG de Bamako, de Niono, etc.), et le départ à la retraite anticipée d’un grand nombre d’enseignants.

Sur le plan économique, des sociétés et entreprises d’Etat avaient été créées pour la transformation de nos produits locaux. Elles avaient l’avantage de donner du travail aux Maliens mais aussi de créer de la valeur ajoutée. Parmi elles, on citera entre autres la SOMIEX, SOCOMA, SONAREM, OCINAM, COMATEX, SONATAM, MALIGAZ, SOCORAM, OPAM, EDM, Librairie populaire du Mali, Air Mali.

Au moment du coup d’Etat de 1968, la compagnie aérienne disposait dans son parc dix-huit (18) avions. Mais durant les vingt-trois (23) ans, le régime militaro-fasciste a enterré un à un ces avions qui faisaient la fierté du Mali, car tout l’équipage était Malien (pilotes, mécaniciens, hôtesses…).

Quant à l’armée, son essoufflement avait été constaté lors de la guerre de la zone de l’Agacher, en décembre 1985. Lors de ce conflit frontalier entre le Mali et le Burkina Faso, deux (02) chars de l’armée malienne, tombés en panne et abandonnés sur le champ de bataille par nos soldats ont été remorqués par les soldats du Faso et garés à portée de vue à l’aéroport international de Ouagadougou.

Notre armée ne reflétait plus la vision que le président Modibo Keïta se faisait d’elle à savoir une armée de métier au service du développement. Elle était minée par la corruption, le recrutement par népotisme, l’affairisme, mise à l’écart des meilleurs officiers, promotion liée aux humeurs du maître des céans.

La liste de l’incroyable gâchis du coup d’Etat du 19 novembre 1968 contre l’intérêt général des Maliens est longue. On ne pourra pas tout aborder ici. Mais une lueur d’espoir était née en notre peuple avec la chute du régime totalitaire du régime de Moussa Traoré qui a mis le Mali sens dessus dessous, en mars 1991.

Malheureusement encore pour le peuple malien. Ceux qui sont arrivés à la tête de l’Etat n’étaient autres les élèves de Moussa Traoré. Il s’agit d’Amadou Toumani Touré (ATT) et d’Alpha Oumar Konaré. Ces deux (02) hommes ont pris en otage les aspirations du peuple malien en continuant la même politique que leur mentor.

Ils ont industrialisé toutes les pratiques artisanales du général Moussa Traoré à savoir: la déliquescence de l’Etat, la corruption, la délinquance financière, etc. Et celui qui est présentement le chef de l’Etat, IBK n’a d’autre modèle que le sanguinaire Moussa Traoré.

Il a qualifié ce dernier de grand républicain lors de sa prestation de serment du 4 septembre 2013 au Centre international de Conférence de Bamako (CICB) pour choquer davantage les Maliens. A sa façon de blanchir Moussa Traoré des crimes qu’on lui attribuait durant son long règne à la tête du Mali.

Ces gens là ont le même dénominateur commun: destruction du Mali.

Leur bilan est édifiant pour les juger. Les Maliens ont intérêt à choisir des gens capables de réflexion, d’imagination et d’anticipation sur les événements pour redonner à notre pays le rayonnement qui s’est assombri aux premières heures du coup d’Etat du 19 novembre 1968.

Yoro SOW

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